Mercredi, Geert Wilders a comparu pour la première fois devant un tribunal d’Amsterdam. Le député, leader d’extrême-droite, est poursuivi pour incitation à la haine raciale et à la discriminationà travers son film "Fitna".
Mohamed Ali Adraoui est chercheur et enseignant à Sciences Po ainsi que spécialiste du salafisme et des mouvements islamistes. Il nous livre son opinion au sujet du film "Fitna", signé Geert Wilders.
France 24 - Le député d’extrême droite comparait en ce moment aux Pays-Bas pour incitation à la haine raciale. Selon vous, est-ce que son film appelle à la haine raciale ?
Mohamed Ali Adraoui - Le film n’est fait que de préjugés sur l’Islam et il est bien évidemment dirigé contre l’Islam. Geert Wilders est islamophobe. Pour lui, Islam et appartenance à la nation néerlandaise sont incompatibles.
F24 - Les Pays-Bas sont divisés en deux camps : ceux qui pensent qu’un procès est justifié et ceux qui défendent la liberté d’expression du député d’extrême droite. Qu’en pensez-vous ? Mérite-t-il un procès ?
MAA - La question n’est pas de savoir s’il a le droit ou non de s’exprimer. Il a bien entendu le droit de dire ce qu’il veut. Reste à savoir si ce qu’il dit appelle à la haine raciale. Appeler à la haine raciale mérite des poursuites. Cependant, personne n’est dupe : on ne peut tenir ce genre de propos sans s’attendre à des conséquences. Geert Wilders sait très bien quoi dire ou faire pour attirer la lumière sur lui et mettre son islamophobie sur le devant de la scène.
F24 - En France, une éventuelle loi sur le voile intégral agite l’opinion publique ainsi que la classe politique. Il en a été de même en Suisse, lors du référendum sur l’interdiction des minarets. Certains partis politiques semblent faire leur miel de la crainte de l’islamisation de l'Europe… Qu’en pensez-vous ?
MAA - Dans certains pays européens, le fait islamique est en train de devenir une variable d’ajustement pour les politiques. C’est devenu une manière très pratique de se racheter une virginité républicaine, en attirant notamment l’attention sur le nombre de femmes portant le voile intégral ou sur la multiplication des hommes portant la barbe, dans certaines banlieues. Mais il y a un double discours : les politiques ne cessent de dire qu’il n’y a pas - et qu'il ne doit pas y avoir - d’exception musulmane, mais leurs actes démontrent le contraire, stigmatisent une communauté et créent donc une exception musulmane.