logo

La Journée internationale des droits de l’enfance, lundi, est l’occasion de mettre en lumière le sort des enfants victimes de la guerre Israël-Hamas. Depuis le 7 octobre, plusieurs milliers d’entre eux ont été tués ou blessés par l’armée israélienne dans la bande de Gaza. Des dizaines d’autres sont aussi retenus en otage par le Hamas. Une "situation terrible" pour Jonathan Crickx, directeur de la communication de l’Unicef Palestine, qui appelle à "un cessez-le-feu humanitaire immédiat".

"La tragédie des enfants" depuis le 7 octobre. Voilà les mots employés par le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef), dans un communiqué publié le 17 novembre, pour désigner la guerre en cours depuis plus d'un mois entre Israël et le Hamas. Des mots qui résonnent encore plus fort, lundi 20 novembre, à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’enfance.

Les Nations unies ont coché cette date du calendrier de la communauté internationale au milieu du XXe siècle en écho à deux 20-Novembre symboliques : l’adoption par l’Assemblée générale de l’ONU de la Déclaration des droits de l’enfant, en 1959, et l’adoption de la Convention relative aux droits de l’enfant, en 1989.

Cette dernière Convention – signée par 197 États, faisant de ce traité concernant les droits humains le plus ratifié de l’Histoire – définit notamment une liste de droits de l’enfant dont "le droit à la vie, à la santé, à l’éducation et le droit de jouer, ainsi que le droit à une vie de famille, à être protégé de la violence et de la discrimination, et de faire entendre sa voix".

Les enfants sont particulièrement exposés dans la guerre Israël-Hamas depuis le 7 octobre. Sur environ 240 personnes prises en otage par le Hamas, quelque 40 bébés et enfants sont retenus dans la bande de Gaza, selon les autorités israéliennes qui ont appelé lundi sur X à "les ramener à la maison".

Gaza est, pour sa part, "devenue un cimetière pour des milliers d’enfants", selon les mots  du porte-parole de l’Unicef, James Elder, fin octobre. L’offensive israélienne y a fait au moins 13 300 morts, dont plus de 5 500 enfants, selon le dernier bilan du gouvernement du Hamas. Jonathan Crickx, directeur de la communication pour Unicef Palestine, fait état, quant à lui, sur l’antenne de France 24, de "4 700 enfants palestiniens tués" et de "7 000 enfants blessés".

"Un drame est en train de se dérouler devant nos yeux", alerte celui qui appelle à "un cessez-le-feu humanitaire immédiat", comme le fait l’Unicef depuis le début de la guerre.

France 24 : Le transfert, ce lundi, de 28 bébés prématurés de l’hôpital Al-Chifa vers l’Égypte est une bonne nouvelle. Que va-t-il advenir d'eux ?

Jonathan Crickx : C’est une très très bonne nouvelle. Nous sommes - l'Unicef, l’OMS et tous les partenaires - très heureux d'avoir pu aider à faire sortir ces enfants. Ce sont des prématurés dans des unités de soins qui ont besoin d'électricité de manière constante pour garder leur corps à température. Certains d'entre eux ont des respirateurs qui nécessitent aussi de l'électricité. Et comme les hôpitaux de la bande de Gaza font face à un grand problème de manque d'électricité, c'était vraiment très important que nous puissions les évacuer.

Les conditions (de transfert) sont particulièrement difficiles. On connaît les difficultés qu'il y a en termes de déplacements dans la bande de Gaza avec les opérations (militaires de l’armée israélienne, NDLR) en cours. Cela a demandé énormément de coordination.

C'est important aussi de voir que ces enfants vont être accueillis et avoir un suivi. Certains d'entre eux sont accompagnés. Pour d’autres, on ne sait pas qui sont leurs parents. Il y a tout un système qui est mis en place pour les identifier, pour qu'ils aient un tuteur légal quand ils passent en Égypte, pour pouvoir continuer à s'occuper d'eux une fois qu'ils ont passé la frontière. 

Ces évacuations restent symboliques alors que l’Unicef estime que “la vie d’un million d’enfants ne tient qu’à un fil”, soit près de la moitié de la population (2,3 millions d'habitants au total) de la bande de Gaza. Quelle est leur réalité aujourd'hui ?

Leur réalité est absolument horrible. Je suis encore en contact avec une de mes collègues à Gaza qui a deux petites filles âgées de 4 et 7 ans. Elle m’a expliqué qu’elle ne pouvait pas leur fournir de l'eau normale comme elles ont d'habitude. La seule eau (disponible) a une très forte salinité. Et donc les petites filles de ma collègue ont des problèmes de diarrhée chronique, de déshydratation. Elles sont dans un combat quotidien pour trouver un peu d’eau et de pain, et on le voit de plus en plus.

À côté de ça, il y a les soins élémentaires. Plus de 7 000 enfants sont blessés, d'après les rapports qui nous parviennent, alors que deux tiers des hôpitaux ne fonctionnent pas. Voilà la situation à laquelle ils doivent faire face. Il y a aussi énormément de problèmes de santé mentale, d'absence de suivi psychosocial, de traumatismes, auxquels s'ajoutent évidemment les problèmes liés au manque d'eau et au manque de nourriture.

Face à cette situation, qu'espérez-vous ?

À un cessez-le-feu humanitaire immédiat. C'est ce à quoi on appelle depuis le début (de la guerre Israël-Hamas, NDLR). Par ailleurs, on appelle à un corridor humanitaire avec beaucoup plus d'aide : de l'eau, de la nourriture, des médicaments, du matériel médical et du carburant.

On appelle aussi, et c'est très important de le rappeler, à la libération inconditionnelle des otages israéliens qui sont encore détenus - dont des enfants, justement.

La situation est absolument terrible. Plus de 4 700 enfants palestiniens sont morts. Et il faut ajouter à cela, d'après les rapports qui nous sont parvenus, les enfants israéliens qui ont été tués dans les terribles attaques de début octobre et ceux toujours détenus en otage à Gaza. Pour nous, un enfant est un enfant et on appelle à la cessation immédiate des hostilités, à un cessez-le-feu humanitaire et la libération des enfants. C'est absolument fondamental pour l'Unicef.

Le dernier décompte du ministère de la Santé du Hamas fait état de 13 300 Palestiniens tués, dont plus de 5 500 enfants. Au regard de ce bilan, les enfants ne paient-ils pas un lourd tribut dans cette guerre ?

Des chiffres que j'ai, ce sont actuellement plus de 4 700 enfants palestiniens qui ont été tués. Ces chiffres dépassent l'entendement. Évidemment, quand ce sont des chiffres, on ne parvient pas à imaginer le drame que c’est derrière pour les familles.

On voit des situations absolument inimaginables, avec des enfants recueillis dans les décombres. On a aussi des enfants dont on ne connaît pas les parents, on ne sait même pas leurs noms. Ils sont parfois âgés de 2, 3 ou 4 ans. Ils ne peuvent pas parler, quand ils peuvent. Quand ils sont en âge de parler, ils sont tellement sous le choc qu'ils ne peuvent même pas donner leur nom. Une catastrophe, un drame est en train de se dérouler devant nos yeux et il doit, je le répète une fois encore, s'arrêter.

Pour regarder en intégralité cette interview menée par Elisabeth Allain :

À savoir : le nombre des victimes est fourni par le ministère de la Santé de Gaza dirigé par le Hamas

Le ministère recueille les informations fournies par les hôpitaux de l'enclave et par le Croissant-Rouge palestinien.

Le ministère de la Santé à Gaza n'indique pas comment les Palestiniens ont été tués, que ce soit par des frappes aériennes et/ou des tirs de barrage israéliens ou des tirs de roquettes palestiniens ratés. Il décrit toutes les victimes comme des victimes de "l'agression israélienne" et ne fait pas non plus de distinction entre les civils et les combattants.

Au cours des quatre guerres et des nombreux accrochages entre Israël et le Hamas, les agences des Nations Unies ont régulièrement cité les chiffres du ministère de la Santé dans leurs rapports. Le Comité international de la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge palestinien utilisent également ces chiffres.

Au lendemain des précédents épisodes de guerre, l'Office humanitaire des Nations Unies a publié des chiffres des victimes sur la base de ses propres recherches dans les dossiers médicaux. Les chiffres de l'ONU concordent largement avec ceux du ministère de la Santé de Gaza, à quelques différences près.

Pour en savoir plus sur les bilans du ministère de la Santé de Gaza, cliquez ici ou ici.

France 24 avec AP