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Birmanie : les Chins en résistance

En Birmanie, depuis le coup d'Etat militaire de février 2021, l'ethnie minoritaire chrétienne des Chin a pris les armes pour défendre son territoire, son identité et ses idéaux contre la toute puissante junte au pouvoir. Reportage de nos correspondants.

En Birmanie, dans les zones reculées à la lisière de la frontière indienne, se joue une guerre totale depuis deux ans et demi, à l'abri des regards et loin des caméras occidentales. Les rebelles de l'Armée nationale Chin (CNA) combattent sans relâche les soldats de la Tatmadaw, l'armée régulière birmane, pour garder le contrôle de leur territoire. Fusils de chasse contre lance-roquettes, mitraillettes contre mortiers, mines artisanales contre tanks… Le rapport de force est déséquilibré. Mais dans la jungle qu'ils connaissent par cœur, les combattants de la CNA tiennent la dragée haute aux militaires birmans.

Depuis le coup d'État militaire du 1er février 2021, comme quatre autres groupes ethniques minoritaires à travers le pays, les Chins ont pris les armes pour défendre leur territoire, leur identité et leurs idéaux face à la junte. Pourtant, à l'inverse des Karens ou des Kachins, engagés dans des conflits armés contre le pouvoir central depuis des décennies, les Chins, en grande majorité chrétiens dans ce pays à majorité bouddhiste, sont longtemps restés en retrait de la guerre civile. En 2015, la branche politique de la CNA avait même signé un accord de cessez-le-feu avec les militaires. Or le coup d'État et les exactions de l'armée ont fait voler en éclats cette paix fragile.

Dans les montagnes reculées à l'ouest du pays, les Chins résistent férocement face aux soldats de la junte. Ils contrôlent la quasi totalité de leur territoire et enregistrent régulièrement le renfort de civils, désireux de participer à la résistance. Ils sont coiffeurs, infirmiers, garagistes, chanteurs, hommes et femmes et refusent de rester inactifs face au déchaînement de violence de l'armée régulière. Mais sur les terres des Chins, le soutien des villages et de leurs habitants passe mal auprès des soudards des forces armées birmanes, et certaines zones paient cher leur ralliement aux rebelles.

Ainsi, la ville de Thantlang, 12 000 habitants avant la guerre, incarne le martyr des populations civiles. Pour se venger d'embuscades à répétition, l'armée birmane y a incendié des quartiers entiers, tués des dizaines de personnes et poussé à l'exil l'ensemble des habitants. Aujourd'hui la ligne de front s'est figée autour de Thantlang, devenue une cité fantôme. Du sort de cette ville dépend une partie de l'avenir du territoire des Chins. La reconquérir, ce serait s'ouvrir la route vers l'une des dernières casernes de la junte dans la région.

Les rebelles de la CNA n'ont plus qu'une idée en tête : joindre leurs forces avec celles des autres groupes armées ethniques pour créer une armée fédérale capable de défaire la puissante Tatmadaw. Nos correspondants sont allés à leur rencontre.

Un reportage d'Antoine Védeilhé et Thomas Blanc, avec Arte.