Kevin McCarthy a échoué à obtenir le poste de "speaker" de la Chambre des représentants à l'issue de trois votes tenus mardi. Les radicaux "trumpistes" du Parti républicain se sont rebellés, provoquant une tourmente interne au moment même où le parti prenait le contrôle de la chambre basse du Congrès américain.
Une première en 100 ans. La Chambre des représentants n'est pas parvenue, à l'issue de la journée de mardi 3 janvier, à élire son président, à la suite de l'échec du républicain Kevin McCarthy.
Grand favori pour remplacer Nancy Pelosi, le quinquagénaire n'a pas su calmer la fronde émanant d'un groupe de trumpistes ne le jugeant pas assez conservateur – une illustration des dissensions au sein du parti d'opposition à Joe Biden.
Les représentants de la Chambre continueront à voter jusqu'à ce qu'un "speaker" soit élu.
Les républicains, qui se sont emparés de la majorité à la Chambre basse aux élections de novembre, ont promis d'user de leur nouveau contre-pouvoir en ouvrant une série d'enquêtes sur le président américain, centrées par exemple sur sa gestion de la pandémie.
Mais avant de lancer de telles hostilités, ils doivent à tout prix s'accorder pour élire le président de la Chambre des représentants.
L'élection du "speaker", le troisième personnage le plus important de la politique américaine après le président et le vice-président, nécessite une majorité de 218 voix.
Les trumpistes jouent les trouble-fête
Au premier tour, Kevin McCarthy, membre de l'état-major républicain depuis plus de dix ans, n'en a recueilli que 203, 19 élus trumpistes ayant décidé de jouer les trouble-fête.
"Kevin ne croit en rien, il n'a pas d'idéologie", a ainsi taclé Matt Gaetz, turbulent élu de Floride.
La candidature de Kevin McCarthy est pourtant largement soutenue au sein de son parti : l'annonce de sa nomination mardi dans l'hémicycle a été reçue par une grande ovation debout dans les rangs républicains.
Mais l'élu de Californie est fragilisé par la contre-performance des républicains aux élections de mi-mandat.
L'élection d'un président de la Chambre des représentants pourrait être l'affaire de quelques heures... ou de plusieurs semaines : en 1856, les élus du Congrès ne s'étaient accordés qu'au bout de deux mois et 133 tours.
Kevin McCarthy semble vouloir donner des gages à cette frange conservatrice pour éviter que l'histoire ne bégaie : en 2015, il avait déjà échoué de peu à devenir président de la Chambre des représentants face à une fronde de l'aile droite du parti.
Mais il ne peut pas non plus se permettre d'aller trop loin et de s'aliéner les républicains modérés.
Bien que sa marge de manœuvre soit réduite, il n'a pour l'instant pas de concurrent crédible. Seul le nom du chef de groupe, Steve Scalise, circule comme possible alternative, sans que ses chances semblent sérieuses.
Un test de la capacité de nuisance des républicains
Avec les républicains majoritaires à la Chambre, Joe Biden et les démocrates ne pourront pas faire passer de nouveaux grands projets.
Mais avec un Sénat aux mains des démocrates, leurs rivaux non plus.
Se retrancheront-ils dans une opposition systématique ? Il faudrait pour cela qu'ils arrivent à faire bloc, alors que certains de leurs élus ont – comme lors du vote du budget avant Noël – voté avec les démocrates.
L'élection du "speaker" servira donc aussi à mesurer leur capacité de nuisance pour le président.
Se retrouver face à une Chambre hostile pourrait se révéler une aubaine politique pour Joe Biden, s'il confirme son intention de se représenter en 2024 – décision qu'il doit annoncer en début d'année.
En cas de paralysie législative, il rejettera sans aucun doute la faute du blocage sur des républicains fragilisés, espérant ainsi tourner la situation à son avantage.
Avec AFP