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Abdullah juge illégitime et illégale la réélection de Hamid Karzaï

L'ancien candidat à la présidentielle fustige la réélection de Karzaï décidée par la Commission indépendante électorale : "Un gouvernement qui prend le pouvoir sur la base d'une décision d'une telle commission ne peut pas avoir de légitimité."

AFP - Trois jours après s'être retiré du second tour de la présidentielle, Abdullah Abdullah a jugé mercredi illégitime et illégale la réélection de Hamid Karzaï à la tête de l'Afghanistan, au risque de prolonger la crise politique qui paralyse le pays depuis plus de deux mois.

L'ancien ministre afghan des Affaires étrangères avait justifié son retrait par la crainte de voir se répéter les fraudes massives qui avaient entaché le premier tour.

Mercredi, il a fustigé la réélection de M. Karzaï, décidée par la Commission indépendante électorale (IEC).

"Cette décision n'a pas de base légale et un gouvernement qui prend le pouvoir sur la base d'une décision d'une telle commission ne peut pas avoir de légitimité", a-t-il déclaré lors de sa première allocution publique depuis l'annonce du résultat.

L'IEC, chargée d'organiser le scrutin et proclamer les résultats, est au coeur du scandale qui a provoqué l'annulation pour fraude d'un quart des bulletins de vote du premier tour, très majoritairement favorables à M. Karzaï.

M. Abdullah a réitéré ses accusations contre l'IEC, l'accusant d'"incompétence" et de "parti pris" en faveur de M. Karzaï, qui en a nommé le chef, Azizullah Ludin, un de ses anciens conseillers.

La semaine dernière, M. Abdullah avait demandé le renvoi de M. Ludin, la suspension de trois ministres ayant fait campagne pour son adversaire et la fermeture des bureaux de vote "fantômes", qui n'avaient pas ouvert le 20 août mais avaient rendu des urnes pleines de bulletins.

L'IEC comme M. Karzaï avaient rejeté ces demandes.

"C'est exactement la même commission qui a annoncé la nomination du président", a souligné M. Abdullah. "Un gouvernement qui arrive au pouvoir sans le soutien de la population ne peut pas combattre des phénomènes comme les menaces terroristes, le chômage, la pauvreté et des centaines d'autres problèmes".

En dénonçant l'illégitimité de M. Karzaï, il tourne le dos à l'appel lancé par la communauté internationale à un gouvernement d'union nationale.

Mardi, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-Moon avait demandé au président Karzaï de travailler avec tous les candidats à la présidentielle.

Mais M. Abdullah, dont la campagne dynamique avait conforté le statut d'opposant numéro un, ne voit aucun intérêt à participer à une coalition avec son adversaire.

"Un tel gouvernement, qui manque de légitimité, ne peut pas combattre la corruption", a-t-il dit, alors qu'Hamid Karzaï avait promis mardi de s'attaquer à ce fléau, qui irrite de plus en plus les Occidentaux.

L'administration américaine discute avec l'équipe Karzaï un pacte censé garantir qu'elle s'attaquera de front à la corruption, a dit la Maison Blanche mardi.

En dépit des conditions déplorables de sa réélection, le président, installé à la tête du pays fin 2001 par les puissances occidentales dont les troupes venaient de chasser les talibans du pouvoir, a reçu les félicitations de la communauté internationale, la Maison Blanche le considérant comme "le dirigeant légitime" du pays.

L'imbroglio électoral afghan place toutefois Barack Obama devant un redoutable dilemme alors qu'il achève le réexamen de la stratégie afghane, avant de décider s'il accède à la demande du chef des forces internationales sur le terrain, le général Stanley McChrystal. Celui-ci réclamerait plus de 40.000 hommes supplémentaires, en plus des 100.000 soldats étrangers déjà sur place.