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Brexit : les points de blocage avant le dernier round de négociations

Un dernier cycle de négociations s'ouvre mardi entre l'Union européenne et le Royaume-Uni pour tenter d'arracher un accord sur le Brexit. Des deux côtés de la Manche, des désaccords persistent, dont voici les principaux points de crispation.

"Keep calm and negotiate." C'est le mot d'ordre auquel le Royaume-Uni et l'Union européenne doivent se soumettre alors que s'ouvre mardi 8 septembre le dernier round de négociations du Brexit. Car la tension monte de nouveau entre Londres et Bruxelles pour s'entendre sur les termes du divorce. À l'approche de la fin de la période de transition pendant laquelle les règles européennes s'appliquent sur le sol britannique, les négociations restent dans l'impasse. Or le temps presse. Les deux parties doivent trouver une issue avant fin octobre dernier délai, pour que l'accord ait le temps d'être ratifié, comme convenu, d'ici à la fin de l'année. Quels sont les points de blocage ? France 24 fait le point.  

Fish et ships 

Les négociations achoppent tout d'abord sur la pêche. Les Britanniques entendent reprendre le contrôle de leurs eaux territoriales, actuellement partagées avec leurs voisins européens. Mais côté européen, on ne souhaite pas revoir l'actuelle répartition. Seuls huit États membres – dont la France – sont concernés par ce sujet, mais, à ce jour, les 27 sont restés solidaires.  

Il faut dire que le secteur de la pêche est un enjeu majeur pour le Royaume-Uni, qui dispose d'une importante zone maritime. Le sujet s'est d'ailleurs trouvé au cœur de la campagne du Brexit. En 2017, il était le troisième plus gros pêcheur de l'UE derrière le Danemark et l'Espagne et devant la France et craint de perdre sa suprématie dans le domaine.

La concurrence équitable 

Les discussions patinent également sur les conditions de concurrence équitable. Bruxelles exige que la future concurrence avec l'UE reste ouverte et loyale, notamment sur les questions sociales, environnementales, fiscales, d'aides publiques, de protection des consommateurs.  

Si les Britanniques souhaitent bénéficier d'accords privilégiés sur le marché intérieur européen – zéro quota, zéro droit de douane –, les États membres exigent des garanties de Londres sur les normes communautaires, notamment en matière d'aides d'État. "Sur la pêche, les Britanniques finiront par bouger. Sur les conditions de concurrence, c'est autre chose", confie un haut fonctionnaire. 

Brexit : les points de blocage avant le dernier round de négociations

Le casse-tête de la frontière irlandaise 

Dernier point de crispation, la question de la frontière nord-irlandaise. Dans les faits, un protocole a été établi visant à ne pas rétablir de frontière physique avec l'Irlande du Nord tout en conservant les droits de douaniers britanniques. Mais à la veille de la reprise des négociations, l'épineux dossier fait son retour : le gouvernement britannique a ainsi reconnu vouloir revenir, en violation du droit international, sur ses engagements pris à la sortie de l'Union européenne en révisant le protocole prévoyant des arrangements douaniers pour l'Irlande du Nord.

Confirmant des informations révélées par le Financial Times, le secrétaire d'État pour l'Irlande du Nord, Brandon Lewis, a reconnu que le projet de loi sur le marché intérieur, qui sera présenté mercredi au Parlement, "viole le droit international d'une manière très spécifique et limitée". Cette révision vise à s'assurer que les "personnes et les entreprises d'Irlande du Nord aient un accès sans entraves à l'ensemble du marché britannique", a expliqué Brandon Lewis, interrogé mardi par les députés.

La volonté britannique de réviser certaines parties de l'accord encadrant la sortie du Royaume-Uni de l'UE fin janvier dernier, a surpris les Européens. Remontés, ceux-ci ont rappelé à Londres ses obligations et mis en garde sur un coup porté à la "confiance", qui affecterait les négociations en cours. "Tout ce qui a été signé dans le passé doit être respecté", a martelé le négociateur européen, Michel Barnier.  

Pour comprendre le dilemme irlandais, il faut revenir à l'accord de paix signé en 1998. Après plusieurs décennies d'affrontements meurtriers, la frontière, qui existait entre l'Irlande du Nord, restée britannique, et la république d'Irlande, a été abolie. Aujourd'hui, les Britanniques utilisent cet accord pour rejeter l'idée de douane entre les deux parties, avançant que la situation pourrait à nouveau sombrer dans le chaos. L'Union européenne, elle, affirme qu'on ne peut pas être dans et en dehors de l'Europe. Les 27 plaident donc en faveur d'un retour d'une taxe pour les produits douaniers d'Irlande.  

"Le Royaume-Uni peut prospérer même en l'absence d'accord"

Bravache, Boris Johnson a, en outre, déclaré lundi dans un communiqué que "le Royaume-Uni peut prospérer même en l'absence d'accord". Une manière de se montrer victorieux quelle que soit l'issue des négociations. Très critiqué dans sa gestion de la crise sanitaire du Covid-19, le Premier ministre britannique a besoin de redorer son image.  

Malgré tout, les Britanniques n'ont tout de même pas abandonné l'idée de parvenir à un compromis. "J'attends avec impatience les négociations en face-à-face de cette semaine où, je l'espère, des progrès pourront être réalisés", a déclaré pour sa part leur négociateur en chef, David Frost. 

Faute d'accord, les seules règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), avec leurs droits de douane élevés et leurs contrôles douaniers poussés, s'appliqueraient, causant des coûts supplémentaires pour les entreprises et risquant de perturber certains approvisionnements.

Avec AFP et Reuters