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Ankara réclame une aide européenne en Syrie, l'UE dénonce un "chantage" aux migrants

Le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui a ouvert vendredi les frontières de son pays, a demandé mercredi un soutien européen en Syrie pour régler la crise migratoire. Les 27, eux, dénoncent un "chantage" d'Ankara, tandis que des heurts ont éclaté mercredi entre réfugiés et policiers à la frontière grecque. 

Après avoir ordonné vendredi l'ouverture des frontières de la Turquie, le président turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé mercredi 4 mars qu'une résolution de la crise migratoire passait par un soutien européen à Ankara en Syrie. Alors que le même jour, des heurts ont éclaté entre réfugiés et policiers à la frontière grecque, plusieurs dirigeants européens ont dénoncé un "chantage" de Recep Tayyip Erdogan. 

"Si les pays européens veulent régler le problème, alors ils doivent apporter leur soutien aux solutions politiques et humanitaires turques en Syrie", a déclaré mercredi Recep Tayyip Erdogan lors d'un discours à Ankara.

Depuis que le président turc a demandé vendredi l'ouverture des fronitères de son pays, des dizaines de milliers de personnes ont afflué vers la Grèce, réveillant en Europe la peur d'une crise migratoire similaire à celle de 2015. 

Mais l'Union européenne "rejette fermement l'usage par la Turquie de la pression migratoire à des fins politiques", dans une déclaration de ses ministres de l'Intérieur mercredi. 

Les 27 appellent également la Turquie "à mettre totalement en œuvre les dispositions de l'accord" de 2016 conclu avec l'UE à la suite de la crise migratoire de 2015. 

Plusieurs dirigeants européens ont aussi dénoncé un "chantage" d'Ankara. C'est le cas du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian, qui a affirmé mercredi que l'Europe ne "cèdera pas au chantage" turc et que ses frontières resteraient "fermées" aux migrants.

"Nous n'avons jamais considéré les réfugiés comme un moyen de chantage politique", a répliqué le porte-parole de la présidence turque, Ibrahim Kalin.

À l'issue d'une visite à Ankara, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a annoncé le déblocage d'une aide d'urgence de 170 millions d'euros "pour les plus vulnérables en Syrie".

Tensions à la frontière greco-turque

Sur le terrain, de nouvelles échauffourées ont éclaté au poste-frontière de Pazarkule (Kastanies, côté grec). Des migrants ont lancé des pierres en direction des forces de sécurité grecques, qui ont riposté au gaz lacrymogène.

Le gouvernorat d'Edirne, dans le nord-ouest de la Turquie, a affirmé dans un communiqué que six migrants qui tentaient de traverser à Pazarkule avaient été blessés par des tirs grecs. L'un d'eux a succombé à ses blessures à la poitrine, selon cette source.

Athènes, qui accuse Ankara de propager de "fausses informations", a "catégoriquement démenti" et affirmé que des policiers turcs avaient tiré des grenades lacrymogènes contre les policiers grecs à Pazarkule.

À ce sujet, la commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansson, a rappelé mercredi que la "protection des frontières" de l'UE devait se faire "dans le plein respect des droits fondamentaux".

Pour tenter d'apaiser les tensions, les ministres des Affaires étrangères des 27 vont examiner jeudi et vendredi à Zagreb "une aide à la gestion des demandes d'asile" pour "décongestionner les hotspots", ces centres d'enregistrement des réfugiés, "sur les îles grecques", a indiqué Jean-Yves Le Drian.

Une "zone de sécurité" comme monnaie d'échange

Depuis l'ouverture des frontières par Ankara, quelque 1 720 migrants ont rejoint les îles de la mer Égée, selon Athènes, s'ajoutant aux 38 000 exilés s'y trouvant déjà.

La décision prise par Ankara d'ouvrir ses frontières intervient au moment où la Turquie cherche à obtenir un appui occidental en Syrie. L'offensive menée depuis décembre par le régime syrien à Idleb, dernier bastion rebelle et jihadiste dans le nord-ouest de la Syrie, a en effet provoqué une catastrophe humanitaire, avec près d'un million de personnes déplacées vers la frontière turque.

Ankara, qui accueille déjà 3,6 millions de Syriens sur son sol, réclame depuis plusieurs mois la création d'une "zone de sécurité" dans le nord de la Syrie pour y installer les personnes déplacées.