
Près de trois mois après sa démission fracassante du gouvernement, Nicolas Hulot revient sur la scène médiatique jeudi soir dans L’émission politique sur France 2. Une première prise de parole publique qui sera particulièrement suivie par la gauche.
Malgré une expérience gouvernementale qui s’est soldée par un échec, son aura reste intacte. Le retour médiatique de Nicolas Hulot, invité de L’émission politique sur France 2, jeudi 22 novembre, provoque une ébullition dans le monde politique. Que dira l’ancien ministre de la Transition écologique et solidaire ? La politique environnementale d’Emmanuel Macron sera-t-elle clouée au pilori ? Va-t-il annoncer son ralliement à un autre parti, cette fois clairement ancré à gauche ? Des questions sans réponses qui tournent en boucle chez les politiques comme chez les observateurs.
Il faut dire que dans le contexte actuel, sa parole est particulièrement attendue. Sur la défensive face à la mobilisation des "Gilets jaunes" contre la taxe carbone, le gouvernement espère que son ancien ministre star voudra bien faire œuvre de pédagogie vis-à-vis des Français. "Je ne doute pas qu’il assumera. […] Sa voix importante peut être utile", a estimé, mercredi matin sur France Inter, son successeur au gouvernement, François de Rugy.
.@FdeRugy et Nicolas Hulot / la taxe carbone : "Je ne doute pas qu'il assumera" #le79Inter pic.twitter.com/P0mFVGYCwp
France Inter (@franceinter) November 21, 2018Au-delà de son soutien à l’augmentation des taxes sur les carburants, Nicolas Hulot devrait profiter de ce temps de grande écoute pour réaffirmer son combat en faveur de la protection de l’environnement. Depuis sa démission fracassante le 28 août, l’ancien présentateur d’Ushuaïa a profité de son temps libre pour se ressourcer auprès de sa famille, notamment dans sa maison bretonne de Saint-Lunaire (Ile-et-Vilaine). Et à en croire le député écologiste François-Michel Lambert, cité par Le Figaro, ce repos a été salvateur : "C’est l’homme le plus heureux du monde. Il est vivant alors qu’il était éteint comme ministre."
Nombreux appels du pied
Dans quelle direction ce nouveau souffle le portera-t-il ? "Il revient pour être présent dans le débat public sur ces questions écologiques qu’il porte depuis 25 ans," explique à France 24 le député de Maine-et-Loire Matthieu Orphelin (LREM), proche de Nicolas Hulot et ancien porte-parole de sa fondation. "Il veut continuer de peser sur le débat politique car il n’a pas envie d’être spectateur. Il connaît l’urgence. Il a envie d’agir pour la cause."
Les larmes de @N_Hulot lors de la passation de pouvoir étaient sincères : "Je n'avais pas d'oignons dans mes poches", lance l'ancien ministre. Retrouvez le en direct ce soir à 21h sur @france2tv dans #LEmissionPolitique pic.twitter.com/1VAtWcHibt
L'Emission politique (@LEPolitique) November 22, 2018Dans l’attente de sa prise de parole, la gauche se prend à rêver d’un éventuel ralliement de celui qui est redevenu la personnalité politique préférée des Français, selon un sondage Odoxa, publié le 20 novembre, pour France Inter et L’Express. "Je veux des personnalités issues de la société civile, des gens qui incarnent les combats, crédibles. Donc si Nicolas Hulot veut nous rejoindre, nous soutenir, il a évidemment toute sa place", lançait dès le 9 septembre la tête de liste d’Europe Écologie-Les Verts (EELV) aux élections européennes, Yannick Jadot, dans Le Parisien. "Notre aventure, l’écologie à la conquête de l’Europe, est ouverte à tous les écologistes, donc évidemment à Nicolas Hulot !"
"C’est l’une des personnalités avec lesquelles j’ai envie de discuter, parce que je pense qu’il pose le bon diagnostic", déclarait de son côté, le 17 septembre sur France Inter, le leader de Génération.s, Benoît Hamon, qui rappelait au passage que Nicolas Hulot avait voté pour lui au premier tour de l’élection présidentielle 2017.
.@benoithamon : "S'il y a une personnalité avec laquelle j'ai envie de discuter, c'est Hulot, parce qu'il pose le bon diagnostic" pic.twitter.com/It8nMG0p8o
France Inter (@franceinter) September 17, 2018"La seule liste nécessaire [pour les élections européennes], qui serait un coup de poing dans le paysage politique, capable de créer une énergie positive très, très forte, ce serait une liste conduite par Nicolas Hulot", affirmait enfin l’ancienne ministre de l’Environnement Delphine Batho, désormais à la tête de Génération Écologie, le 2 novembre sur BFM TV.
"Toute la sphère écolo essaie d’influencer sa parole"
Selon nos informations, Nicolas Hulot ne souhaite plus exercer de mandat politique mais ne ferme pas la porte à son éventuelle implication au sein d’un mouvement. Il avait juré, au moment de sa démission, qu’il ne ferait rien qui puisse affaiblir Emmanuel Macron et le gouvernement d’Édouard Philippe. Mais il se dit qu’il regarde avec bienveillance le lancement de Place publique, ce nouveau parti politique qui a fait de l’urgence écologique l’un de ses thèmes principaux et au sein duquel militent de nombreuses figures de l’écologie, comme Claire Nouvian.
Présidente de l’ONG Bloom, qui lutte pour la protection des océans, cette dernière comprend les fantasmes suscités par la prise de parole de l’ancien ministre. "Toute la sphère écolo essaie d’influencer sa parole parce que c’est une personnalité qui compte pour les Français", souligne Claire Nouvian à France 24. "On serait nous aussi ravis qu’il vienne discuter avec nous, mais on n’a pas essayé de faire pression sur lui, même s'il est clair que nos discours sont similaires. C’est quelqu’un de sincère qui a compris que les misères de l’environnement touchent d’abord les plus vulnérables. C’est d’ailleurs lui qui avait tenu à ce que son ministère s’appelle 'Transition écologique et solidaire'."
Faut-il s’attendre à des annonces sur le plateau de L’émission politique, deux semaines avant l’ouverture de la 24e conférence de l’ONU sur le climat (COP24) et à quelques jours de la présentation par le gouvernement de la feuille de route énergétique de la France, qui doit notamment aborder la question de fermeture de réacteurs nucléaires ? "Non, pas jeudi soir", répond Matthieu Orphelin, qui estime qu’"il y a plein d'autres façons de peser sur le débat politique", avant de conclure : "Vous verrez, je suis sûr qu’il va nous surprendre en 2019 et 2020."