
Facebook a annoncé vendredi avoir "suspendu" Cambridge Analytica, une entreprise ayant collecté et utilisé les données de 50 millions d'utilisateurs afin d'influencer leur vote, et ayant travaillé sur la campagne de Donald Trump.
Les données de 50 millions d’usagers d’un réseau social collectées sans leur consentement, un algorithme conçu pour influencer le vote des électeurs… Le scénario semble digne de la célèbre série télévisée House of Cards mais concerne une élection très réelle : la présidentielle américaine de 2016. Facebook a ainsi annoncé, vendredi 17 mars, avoir "suspendu" et menacé de poursuites Cambridge Analytica, une entreprise d'analyse de données qui a travaillé pour la campagne de Donald Trump en 2016.
D'après une enquête réalisée par le New York Times et The Observer, l'édition dominicale du quotidien britannique The Guardian, publiée le 17 mars, Cambridge Analytica aurait récupéré les données de 50 millions d'utilisateurs et s'en serait servi pour élaborer un logiciel permettant de prédire et d'influencer le vote des électeurs.
Facebook a également suspendu les accès de la maison mère de la société, Strategic Communication Laboratories (SCL), ainsi que ceux d'Aleksandr Kogan, psychologue à l'université de Cambridge, et Christopher Wylie, dirigeant de la société Eunoia Technologies et ancien employé de Cambridge Analytica.
Des règles d'utilisation de Facebook violées
"En 2015, nous avions appris qu'Aleksandr Kogan nous avait menti et avait violé la politique de la plateforme en transmettant les données récupérées sur une application utilisant une interface de connexion de Facebook à SCL/Cambridge Analytica", a annoncé vendredi dans un communiqué Paul Grewal, le vice-président et directeur juridique adjoint du réseau social américain. "Il a également transmis ces données à Christopher Wylie."
L'application développée par Aleksandr Kogan, "thisisyourdigitallife", s'affichait sur Facebook comme "une application de recherche utilisée par les psychologues". Elle proposait de payer les utilisateurs pour remplir des tests de personnalité. Quelque 270 000 personnes l’ont téléchargée, donnant accès aux informations de leur profil. "Mais l'application a aussi collecté les informations des amis des personnes effectuant les tests, permettant d'accumuler des données sur des dizaines de millions de personnes", précise The Observer.
Facebook a expliqué qu'Aleksandr Kogan avait pu récolter légalement les données des utilisateurs, mais avait "violé les règles de la plateforme" en les transmettant à Cambridge Analytica et à Christopher Wylie. Le réseau social avait donc supprimé l'application en 2015, pour non-respect de sa politique.
Une entreprise dirigée par Steve Bannon
Aleksandr Kogan, comme tous ceux qui avaient reçu les données, avait assuré à Facebook que celles-ci avaient été détruites. Il semble que cela n’ait pas été le cas. "Il y a plusieurs jours, nous avons reçu des informations selon lesquelles, contrairement aux promesses qui nous avaient été faites, toutes les données n'ont pas été détruites", écrit Paul Grewal. Le New York Times avance ainsi que des copies des données obtenues par Cambridge Analytica existent toujours, et que certains journalistes ont même pu les consulter.
"Nous agissons vigoureusement pour déterminer la véracité de ces informations. Si elles sont exactes, il s'agirait d'une nouvelle violation inacceptable de la confiance et des engagements qui ont été pris", a-t-il estimé, ajoutant que Facebook "prendra les mesures nécessaires pour que les données en question soient effacées une bonne fois pour toute", laissant entendre de possibles poursuites en justice.
Filiale américaine de la société britannique de marketing ciblé SCL, Cambridge Analytica est connu pour avoir fourni, pendant la campagne du groupe pro-Brexit Leave.EU, des solutions de collectes de données et de ciblage d'audience.
Selon The Observer, l'entreprise a été dirigée par Steve Bannon, l'un des proches conseillers de Donald Trump avant d'être évincé de la Maison blanche durant l'été 2017.
Avec AFP