
Les auteurs russes ont déploré le boycott de leur pavillon officiel par Emmanuel Macron au salon Livre Paris. Le président a expliqué agir par "solidarité avec nos amis britanniques" après l'empoisonnement de l'ex-espion russe en Angleterre.
Les auteurs russes étaient amers, vendredi 16 mars, au salon Livre Paris, après le boycott de leur pavillon officiel par le président Emmanuel Macron. Le chef d'État a expliqué agir en "solidarité avec nos amis britanniques", à la suite de l'empoisonnement d'un ex-espion russe en Angleterre.
Le salon devait être la grande fête des lettres russes avec la présence à Paris du 16 au 19 mars de 38 auteurs représentatifs de la nouvelle génération d'écrivains du pays, invité d'honneur de la plus grande manifestation littéraire de France. Parmi eux, le controversé Zakhar Prilepine, 42 ans, proche du chef du Parti national-bolchevique, Édouard Limonov, écrivain parmi les plus doués de sa génération, ou encore Ludmila Oulitskaïa, lauréate du prix Médicis étranger en 1996 et voix de l'opposition en Russie. "Je n'ai jamais dépendu du pouvoir, il ne m'a pas fait de cadeaux et je ne lui dois rien", a-t-elle confié jeudi, ajoutant qu'elle n'irait pas voter dimanche, jour de présidentielle en Russie où Vladimir Poutine est assuré de remporter un quatrième mandat.
"Une douche froide"
"Ce boycott m'a fait l'effet d'une douche froide", a réagi Natalia Turine, directrice de la librairie du Globe, la grande librairie russe de Paris, et par ailleurs directrice de Louison Editions, spécialisée dans la littérature russe contemporaine. "Votre boycott du Pavillon russe, pays invité d'honneur cette année à Livre Paris, a un impact direct sur mes investissements. Et je passe sous silence l'impact sur moi en tant qu'éditrice et intellectuelle", a poursuivi l'éditrice et chef d'entreprise française, dans une lettre ouverte au président Macron, dont l'AFP a obtenu une copie.
"Honnêtement, nous sommes chagrinés. Pas offensés, mais chagrinés. Parce que nous étions prêts pour cette rencontre, comme un coureur retient son souffle dans la dernière ligne droite. Et pour nous, cela correspondait à la venue du président français. C'était un grand honneur", a regretté pour sa part Eugene Reznichenko, directeur exécutif de l'Institut Perevod, chargé de promouvoir la traduction d'œuvres russes dans le monde.
Natalia Soljenitsyne "peinée"
Natalia Soljenitsyne, veuve du prix Nobel de littérature, s'est elle déclarée "peinée". Emmanuel Macron "n'a pas fait ce qu'il fallait et en premier lieu pour la France elle-même", a-t-elle asséné. "J'avais l'impression, au vu de ce qui s'était passé ces derniers mois, que le président Macron n'était pas le pire des amis de la Russie, [...] qu'il était moins influencé par cette hystérie qui règne dans les médias occidentaux quand il s'agit de la Russie", a-t-elle déploré.
"Quand les diplomates ne savent plus se parler, ça devient encore plus important que se parlent les artistes et les gens de la culture et des arts", estime Natalia Soljenitsyne. D'après elle, "tourner le dos au dialogue avec les gens de la culture et des arts, c'est extrêmement étonnant et ne sied pas à un leader politique français".
Au total, près d'une cinquantaine de pays sont représentés au Salon dont, pour la première fois, la Chine, la Hongrie et l'Ukraine. Le programme complet est disponible sur le site www.livreparis.com.
Avec AFP