
Les membres du parti social-démocrate allemand SPD ont voté, ce dimanche 4 mars, en faveur d'une nouvelle coalition politique avec Angela Merkel, ouvrant la possibilité d'un nouveau mandat pour l'actuelle chancelière allemande.
L'actuelle chancelière allemande Angela Merkel, sortie victorieuse mais affaiblie des élections du 24 septembre, a franchi le dernier obstacle pour entamer un nouveau mandat : les membres du parti social-démocrate SPD ont approuvé le principe d'une nouvelle coalition avec la CDU, par référendum.
Malgré de fortes divisions internes, une majorité de 66 % s'est dégagée pour la reconduction de cette grande coalition surnommée "Groko" en allemand, lors d'un scrutin qui s'est tenu du 20 février au 2 mars, et pour lequel 78 % des 463 000 membres se sont exprimés.
Mme Merkel, qui dirige l'Allemagne depuis douze ans devrait être formellement élue chancelière par les députés mi-mars, le 14 probablement.
Ce quatrième mandat de chancelière, et probablement le dernier selon les observateurs, s'annonce nettement plus délicat que les précédents.
La coalition entre sociaux-démocrates et conservateurs détient seulement une courte majorité au Bundestag (53,5 %), après les élections générales du 24 septembre marquées par une percée historique de l'extrême droite (AfD) et une érosion des partis traditionnels, dont la CDU/CSU de Mme Merkel.
Acte de raison
"Les choses sont désormais claires : le SPD va participer au prochain gouvernement", a déclaré son chef par intérim, Olaf Scholz lors d'un point presse. Mais illustrant les hésitations dans ses rangs, il a qualifié le résultat "d'acte de raison".
La direction du parti avait négocié en février un accord avec la chancelière, et les membres du plus vieux parti d'Allemagne devaient l'approuver, sur fond de divisions internes.
Signe de la défiance réciproque entre SPD et CDU/CSU, les premiers ont négocié une clause de sortie de leur alliance au bout de deux ans.
La chancelière de 63 ans n'a jamais été autant critiquée dans son parti qu'elle dirige depuis environ deux décennies. Surtout depuis qu'elle a cédé au SPD le ministère des Finances, traditionnelle chasse gardée des conservateurs très attachés à l'austérité budgétaire, lors des négociations sur le contrat de gouvernement.
Plusieurs cadres du parti chrétien-démocrate ont ouvertement mis en cause la ligne centriste défendue par Angela Merkel et sa politique migratoire longtemps généreuse – qui a vu l'arrivée depuis 2015 de plus d'un million de demandeurs d'asile. Ces positionnements ont nourri selon eux la montée de l'extrême-droite, et réclamé un net virage à droite.
Face à la grogne, elle a imposé une proche – et potentiel successeur à la chancellerie –, Annegret Kramp-Karrenbauer, comme secrétaire générale de la CDU avec mission de resserrer les rangs. Et appelé au ministère de la Santé son principal détracteur : le jeune et ambitieux Jens Spahn, histoire de neutraliser son influence, du moins pour le moment.
Soulagement
Malgré tout, l'avènement d'un exécutif stable en Allemagne est propre à soulager non seulement dans le pays mais aussi en Europe, secouée par la crise du Brexit et la montée des nationalismes.
Dans leur contrat de gouvernement, les deux partenaires ont justement placé la réforme de l'Union européenne au coeur de leurs priorités.
Le SPD, en chute libre dans les sondages en raison de querelles internes, aurait préféré se ressourcer dans l'opposition après un score historiquement bas aux élections (20,5 %).
Mais l'échec de tractations gouvernementales entre conservateurs, écologistes et libéraux en novembre 2017 en avait décidé autrement.
La décision de participer à ce nouveau gouvernement "n'a pas été facile", a reconnu Olaf Scholz dimanche.
Pour les jeunes socialistes, qui ont mené une active compagne contre la "Groko", le résultat est "une déception", a réagi leur chef Kevin Kühnert dans un tweet, promettant de contribuer au renouvellement du parti. "On commence dès demain!", écrit-il.
Les récents sondages catastrophiques plaçant le plus vieux parti d'Allemagne au coude-à-coude avec l'extrême droite ont fait paraître une nouvelle "Groko", comme un moindre mal pour la majorité des membres du parti.
D'autant plus que le SPD et son ancien chef déchu Martin Schulz ont, de l'avis général, plutôt bien négocié leur agenda, obtenant plusieurs concessions en matière de santé ou d'emploi, et parvenant à décrocher six ministères, dont les Affaires étrangères et les Finances, soit autant que le parti d'Angela Merkel.
Avec AFP