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En dénonçant avec virulence le projet des États-Unis d'envoyer des troupes en Colombie pour lutter contre le trafic de drogue, le président du Venezuela cherche surtout à faire oublier ses difficultés internes.
Nouveau coup de sang du président vénézuélien Hugo Chavez contre ses éternelles bêtes noires, la Colombie et les Etats-Unis. Le leader de la révolution bolivarienne, qui accuse Washington de se servir d’opérations contre les narcotrafiquants pour renforcer sa présence dans la région, s’oppose farouchement au projet d’envoi de renforts américains dans des bases militaires de Colombie pour lutter contre le trafic de drogue.
Pour Hugo Chavez, ce projet représente "un pas de plus vers une guerre en Amérique du Sud". Il appelé le président américain Barack Obama à y mettre un terme. "Il s’agit des Yankees, la nation la plus agressive de l’histoire", fulminait le président vénézuélien, mercredi, lors d’une conférence de presse tenue au palais présidentiel de Miraflores.
Durant la conférence à laquelle François-Xavier Freland, le correspondant de FRANCE 24 à Caracas, a assisté, "Chavez a lancé un véritable numéro de charme envers la presse étrangère avant de s’en prendre avec virulence à son frère ennemi, le président colombien Alvaro Uribe ". Le président vénézuélien cherche des soutiens à l’extérieur pour mieux isoler son homolgue colombien, actuellement en tournée en Amérique latine pour consulter ses voisins sur le projet d’envoi de troupes américaines en Colombie, explique le journaliste.
Selon le correspondant de FRANCE 24, Chavez a l’habitude de hausser le ton sur la scène internationale lorsqu’il fait face à des difficultés internes, comme c’est le cas actuellement au sujet de la reprise en main des médias par l’Etat et des nationalisations forcées. "Il est en ce moment la cible de toutes les critiques", explique François-Xavier Freland, et la popularité de sa révolution bolivarienne est au plus bas.
Les tentatives de Chavez pour isoler son homologue colombien ne font pas l’unanimité sur le continent. Le très conservateur président péruvien Alan Garcia s’est rangé derrière Uribe alors que le président bolivien Evo Morales, proche de Chavez, a estimé que son pays ne "pouvait accepter" une présence militaire américaine dans la région. Le dirigeant modéré du Brésil Ignacio Lula da Silva s’est dit "préoccupé" par le projet, mais le ministre des Affaires Etrangères chilien Mariano Fernandez a rappelé que toute décision prise par la Colombie sur son territoire est "souveraine et doit être respectée".
Chavez reproche également à Uribe de lui avoir "planté un couteau dans le dos" en annonçant que des armes récemment saisies au groupe rebel des FARC avaient été vendues au Venezuela par la Suède dans les années 1990 . "C’est un jeu sale et lâche", a déclaré le président vénézuélien lors de sa conférence de presse de mercredi, suggérant que les lance-roquettes suédois auraient été volées à son pays en 1995 et qu’ils étaient de toutes façons "vieux et inutilisables".
En riposte, Hugo Chavez a gelé, mercredi, l’importation de 10 000 voitures colombiennes et bannit la participation de la firme pétrolière colombienne Ecopetrol à des exploitations dans la région de l’Orénoque. A l’instar des précédents incidents diplomatiques avec la Colombie, il a massé ses troupes le long de la frontière en état d’alerte et mobilisé ses milices civiles.
Chavez a par ailleurs annoncé l’achat de douzaines de tanks russes par son pays, une mesure qui vient renforcer la coopération stratégique et militaire ces derniers mois entre deux pays très critiques de Washington. Entre 2005 et 2007, Moscou a conclu 12 ventes d’armes avec Caracas, d’une valeur totale de 4,4 milliards de dollars.