
Un projet américain de résolution imposant un embargo sur les armes au Soudan du Sud a été rejeté le 23 décembre par le Conseil de sécurité de l'ONU. Plusieurs États veulent donner du temps au président Kiir qui promet un dialogue national.
Éclipsé par le vote le même jour de la résolution condamnant la colonisation israélienne, le rejet de la résolution imposant un embargo sur les armes au Soudan du Sud, par le Conseil de sécurité de l’ONU, vendredi 23 décembre, a enterré l’espoir d’un sursaut d’intérêt de la communauté internationale pour ce pays.
Le rejet du texte proposé par les Américains, imposant un embargo sur les armes et des sanctions contre certains dirigeants, promet de plonger un peu plus le pays dans l’abandon et l'oubli alors qu’une guerre civile fait rage. Depuis 2013, des dizaines de milliers de civils ont été tués. Le conflit a fait deux millions de déplacés et un million de réfugiés. Des experts de l’ONU ont évoqué début décembre un "nettoyage ethnique" en cours dans plusieurs régions du pays.
"Cela n'aurait pas dû être une résolution controversée. (…) L'Histoire jugera de manière très sévère leur décision", a réagi l'ambassadrice américaine auprès des Nations unies, Samantha Power, quelques minutes après le vote. L'initiative américaine a été soutenue par le Royaume-Uni et la France mais la Russie, la Chine, le Japon, la Malaisie, le Venezuela et trois pays africains - Angola, Égypte, Sénégal - se sont abstenus.
Le Japon, qui déploie quelque 350 militaires dans les rangs de la mission onusienne en cours dans le pays, a estimé que la résolution aurait attiré l'hostilité sur le gouvernement de Salva Kiir et mis les Casques bleus en danger. Ceux qui se sont opposés à l'idée d'imposer des sanctions ont par ailleurs souligné que le président Kiir avait appelé plus tôt dans le mois à un dialogue national pour restaurer la paix, une initiative qui mérite d'être menée à terme, selon eux.
"Beaucoup de scepticisme" autour de l'annonce d'un dialogue national
Des arguments qui ne sont pas recevables pour les observateurs indépendants. "Il y a beaucoup de scepticisme autour de l’annonce de Salva Kiir puisque ce n’est pas la première fois qu’il promet de négociations sans que rien ne se passe par la suite", note Jonathan Pedneault, chargé du suivi du pays pour l’organisation Human Rights Watch. Même écho du côté Amnesty. "Nous sommes dubitatifs dans la mesure où le président Salva Kiir avait déjà promis d’ouvrir ce type de dialogue en août 2015 après la signature d’un accord de paix, mais rien n’a été fait", souligne Yves Prigent.
Le Soudan du Sud, plus jeune nation au monde, a fêté cette année les cinq ans de son indépendance. Les combats opposent les troupes de l’actuel président, Salva Kiir, à celles de son ancien vice-président Riek Machar sur fond de rivalités politico-ethniques. Ce dernier a pris la tête d’une rébellion après avoir été limogé du gouvernement. Les deux camps sont accusés d’avoir commis des massacres.