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Réseaux sociaux : dans les pays du Golfe, la traque aux dissidents

Human Rights Watch a publié, mardi, un rapport dénonçant l'attitude des pays du Golfe à l’encontre des dissidents qui utilisent les réseaux sociaux pour exprimer leur opinion. Une répression 2.0 qui ne cesse de progresser.

Ils sont 140, comme le nombre de caractères maximum d’un tweet. Dans un rapport interactif publié mardi 1er novembre, Human Rights Watch (HRW) dresse les portraits de 140 activistes arrêtés, jugés ou condamnés pour avoir exprimé leurs vues sur les réseaux sociaux au cours des six dernières années.

Une répression brutale d’autant plus incompréhensible qu’à l'exception de Bahreïn et d'Oman, où les autorités ont réprimé des manifestations prodémocratie en 2011, les États du Conseil de coopération du Golfe (CCG), qui comprend l'Arabie saoudite, Bahreïn, le Koweït, Oman, le Qatar et les Émirats arabes unis, n'ont pas connu les désordres qui ont éclaté dans la foulée du Printemps arabe.

Dans ces pays conservateurs qui interdisent pour la plupart les partis politiques et les manifestations, nombre d’écrivains, avocats, journalistes ou encore professeurs se sont tournés vers les plateformes des réseaux sociaux comme Twitter, Facebook et YouTube pour véhiculer leurs opinions.

À travers les 140 portraits d’activistes de son rapport, HRW appelle les gouvernements des pays du Golfe à réaliser des réformes au lieu d'emprisonner les opposants pacifiques.

"Attaque systématique contre la libre expression"

Parmi eux figure Raïf Badawi, le fondateur de la plateforme de débat Saudi Liberal Network, condamné en mai 2014 à dix ans de prison et 1 000 coups de fouet pour "insultes à l'Islam" et "violation des dispositions de la loi saoudienne de 2007 relative à la lutte contre la cyber-criminalité". L'opposant bahreïni Nabil Rajab, accusé d'avoir "insulté" les autorités de Manama et de Ryad, et l'activiste saoudien Walid Abulkhair qui purge une peine de 15 ans de prison, y sont également mentionnés.

Figure aussi l'avocat émirati Mohammed al-Roken, emprisonné en 2013 avec 69 personnes pour 15 ans après avoir été reconnu coupable de "complot" pour renverser le régime.

"Les États du Golfe ont lancé une attaque systématique et bien financée contre la libre expression afin de contourner l'impact potentiellement transformateur de la technologie d'internet et des médias sociaux", a affirmé Sarah Leah Whitson, directrice de HRW pour le Moyen-Orient.

Selon l'ONG, des gouvernements du CCG ont aussi utilisé de la technologie de surveillance achetée à des entreprises "occidentales et israéliennes" pour suivre les activités en ligne de certains de leurs citoyens.

À l'exception du Koweït, tous les gouvernements de cette région ont utilisé un logiciel intrusif, a également déclaré HRW en citant des preuves fournies par le groupe de recherche Citizen Lab basé à Toronto.

Et Sarah Leah Whitson de conclure que les pays du Golfe "se trompent sérieusement s'ils pensent qu'ils peuvent indéfiniment empêcher les citoyens qui utilisent les réseaux sociaux d'œuvrer en faveur de réformes positives".

Avec AFP