
Javier Milei à la tribune de l'ONU le 24 septembre 2025. © Shannon Stapleton, Reuters
Le Parlement en Argentine a une nouvelle fois défié le président ultralibéral Javier Milei, rognant un peu sur ses pouvoirs, en votant mercredi 8 octobre à une large majorité une restriction de l'usage des décrets-lois, outil maintes fois employé par le chef de l'État en 22 mois au pouvoir.
Le camouflet, venant après déjà plusieurs échecs ces derniers mois du président sur des textes ou vetos, souligne les difficultés croissantes de Javier Milei pour gouverner, face à un Parlement où il est minoritaire, et qui est de plus en plus enclin au bras de fer.
La déconvenue souligne, aussi, le caractère critique pour lui d'élections législatives de mi-mandat très incertaines, le 26 octobre, afin d'accroître sa base parlementaire et d'asseoir sa capacité à gouverner. L'échéance rend déjà les marchés financiers nerveux, pressions répétées sur le peso argentin à la clé.
Dans ce contexte, le Trésor américain de l'allié idéologique de Javier Milei, Donald Trump, à dû voler à son secours en septembre, se disant "prêt à faire le nécessaire" en soutien financier de l'économie argentine, la troisième d'Amérique du Sud. Une aide qui reste a définir, et concrétiser. Javier Milei doit être reçu par Donald Trump à la Maison blanche le 14 octobre.
Mercredi, la Chambre des députés, dans les pas du Sénat argentin le mois dernier, a approuvé largement (140 voix pour, 80 contre parmi les présents) un texte qui restreint face au Parlement la force d'un "DNU", un "Décret de nécessité et d'urgence", autrement dit un décret à force de loi. Le décret nécessiterait désormais le rejet d'une seule Chambre, et non plus des deux, pour devenir caduc.
Toutefois, pour un article qui n'a pas obtenu la majorité des députés, le texte devra repasser au Sénat, où son issue ne fait guère de doute : le parti de Milei y est encore plus minoritaire qu'à la chambre basse.
Parlement réticent
Javier Milei, large vainqueur de la présidentielle 2023 sur une formule dégagiste contre la "caste politique" et la promesse d'une thérapie choc d'austérité budgétaire, ne dispose que de 40 députés ou alliés sur 257, ce qui l'a contraint à des alliances ad hoc pour faire adopter des réformes.
Pour tenter de contourner ce Parlement réticent, il a ainsi recouru à plus de 70 reprises aux DNU, outil inscrit dans la Constitution depuis 1994 et qui a aussi été utilisé par quasiment tous ses prédécesseurs.
En décembre 2023, à peine dix jours après son investiture, Javier Milei avait signé un DNU pharaonique, posant le cadre d'une dérégulation massive de l'économie. Ce "méga-décret", comme il avait été surnommé, modifiait ou abrogeait plus de 300 règles et normes dans des sphères variées telles le travail, l'encadrement des prix et loyers, la concurrence, les privatisations, les médicaments, le foncier, entre autres.
"Plus que l'instrument (du DNU), le problème est comment il a été utilisé" par l'exécutif, a dénoncé mercredi lors du débat pour l'opposition péroniste (centre-gauche) la députée Monica Litza.
"Si on n'y met pas un frein, ça (l'utilisation de ces décrets, NDLR) continuera sur le mode 'allons-y gaiement', soit un état d'exception permanente" a plaidé Maximiliano Ferraro, de l'opposition de centre-droit.
Député miléiste, Nicolas Mayoraz a pour sa part accusé l'opposition de vouloir "déstabiliser" l'exécutif en instaurant un "gouvernement du Parlement, une sorte de démocratie parlementaire".
Avec AFP