Au sein du Parti socialiste, les partisans d’une politique économique plus sociale, opposés à une nouvelle candidature de François Hollande, tiennent leur université d'été ce week-end à La Rochelle avec un but commun : faire preuve d’unité.
Les "frondeurs" socialistes espèrent que leur week-end de travail ne tournera pas au combat de coqs. Avec cinq candidats déclarés à la présidentielle française qui doivent prendre la parole lors de ces journées d’été, samedi 10 et dimanche 11 septembre à La Rochelle, la réunion du mouvement À gauche pour gagner risque de prendre des allures de meeting électoral.
Tous s’exprimeront dimanche. Gérard Filoche doit ouvrir la journée sur le thème "En finir avec le chômage de masse". Arnaud Montebourg sera, lui, chargé de la conclure. Benoît Hamon introduira la plénière "Pour une offensive démocratique", lors de laquelle interviendront également deux autres candidates à la présidentielle, Cécile Duflot (qui se présente, elle, à la primaire d'Europe Écologie Les Verts (EELV)) et Marie-Noëlle Lienemann. Ce week-end de travail aura notamment pour but de mettre un contenu politique détaillé derrière ce collectif des "frondeurs" né en 2015, lors du congrès de Poitiers du Parti socialiste (PS). Réuni sous la motion B du député de la Nièvre Christian Paul, ce mouvement a notamment fait parler de lui en s'opposant farouchement à la Loi travail.
"La Rochelle sera un premier test"
Joueront-ils la carte collective en se contentant d’apporter leur pierre à l’édifice dans le débat d’idées ? Car outre la construction d’un programme portant leurs idées, les opposants socialistes à la politique économique de François Hollande et Manuel Valls auront pour objectif de convaincre – jusqu' à Arnaud Montebourg – de l’impérieuse nécessité de passer par la case primaire.
"Leur démarche, depuis le début, consiste à se distinguer sur le fond et sur les idées, et à se détacher de la personnalisation outrancière actuellement en cours dans le débat politique", relève le politologue et enseignant à l’Institut supérieur du management public et politique Olivier Rouquan. "C’est un pari difficile et La Rochelle sera un premier test", ajoute-t-il.
Les frondeurs, eux, veulent y croire. Officiellement, Christian Paul et les autres leaders de À gauche pour gagner se réjouissent de la multiplication des candidatures dans le cadre de la primaire de la Belle Alliance populaire – nom donné au regroupement du PS, de l’Union des démocrates et écologiste et du Parti radical de gauche pour l’organisation de cette primaire.
"La présence de plusieurs candidats n’est pas un problème, au contraire, cela permet de populariser la primaire", veut ainsi croire le député frondeur de l’Essonne Jérôme Guedj. "Le but est de travailler tous ensemble. Ces candidatures sont complémentaires et pas concurrentes."
"Ne surtout pas apparaître divisés"
"Il faudra préparer l’émergence du rassemblement, car on le voit avec les sondages qui sortent en ce moment, si la gauche part divisée, elle ne sera pas présente au second tour", souligne Jérôme Guedj. "Donc tout ce qui se construit en dehors de la primaire est irresponsable."
Les regards seront bien évidemment tournés vers Arnaud Montebourg. Car si Benoît Hamon, Gérard Filoche et Marie-Noëlle Lienemann ont annoncé leur participation à la primaire de la Belle Alliance populaire, en janvier 2017, l’ancien ministre de l’Économie laisse planer le doute. Il s’efforce en effet de faire comprendre, depuis l’annonce de sa candidature, qu’il pourrait se présenter directement devant les Français si d’aventure François Hollande était de nouveau candidat.
"Oui, ce serait bien qu’il s’engage formellement à prendre part à la primaire, et le plus rapidement possible, admet Jérôme Guedj. S’il attend le 15 décembre pour se prononcer comme il l’a dit jusqu’à présent, ce n’est pas bon pour la primaire, car ça la décrédibilise."
Arnaud Montebourg serait prêt à faire ce pas vers l’unité au sein des frondeurs du PS. C’est en tout cas ce qu’a récemment laissé entendre l’un de ses proches, Laurent Baumel, député d’Indre-et-Loire, selon Jérôme Guedj.
Les discours, ce dimanche, seront donc suivis avec beaucoup d'attention. Le mouvement anti-Hollande a suscité un grand espoir au sein des sympathisants de la gauche du PS. Ceux-ci veulent encore croire à une possible victoire en 2017, basée sur de "vraies politiques sociales". Pour les chefs de file de À gauche pour gagner, l’objectif est clair : ne surtout pas apparaître divisés et risquer d’être comparés aux candidats de la primaire de la droite.
"On peut avoir des doutes sur la capacité de Montebourg et d’autres à oublier leur ego"
S’agira-t-il d’un vœu pieux ? "S’ils parviennent à ne pas trop étaler leurs doutes et leurs divisions, ce rendez-vous de La Rochelle sera un pari réussi", affirme Olivier Rouquan. "Mais on sait comment fonctionne le jeu politique et médiatique et on peut avoir des doutes sur la capacité de Montebourg et d’autres à oublier leur ego. C’est la primaire qui veut ça : ils veulent faire parler d’eux donc, d’une certaine manière, ils sont obligés de faire le buzz", poursuit-il.
"C’est vrai que la présidentielle rend fou, admet Jérôme Guedj. Mais on va essayer de faire la démonstration que ce qu’on a pu faire par le passé avec la motion B, à savoir se réunir sur un texte commun, est à nouveau possible dans la période qui vient."