
Après l'attentat meurtrier qui a frappé mardi l'église de Saint-Étienne-du-Rouvray, en Seine-Maritime, d'aucuns s'interrogent sur la sécurisation des lieux de cultes chrétiens. Le point sur le dispositif actuellement existant.
Depuis l'échec d'un projet d'attentat en avril 2015 contre une église catholique de Villejuif (Val-de-Marne, en région parisienne), attribué à un étudiant algérien de 24 ans, Sid Ahmed Ghlam, la menace était bien réelle. Elle s’est concrétisée mardi 26 juillet, lors de l’attentat qui a frappé l’église de Saint-Étienne-du-Rouvray (Seine-Maritime). Le prêtre, Jacques Hamel, qui célébrait la messe ce matin-là pour une poignée de fidèles, est assassiné par deux terroristes se réclamant de Daech.
Une protection des lieux chrétiens illusoire
Après les attentats de janvier 2015 contre l'hebdomadaire Charlie Hebdo et un supermarché casher de Paris, le gouvernement avait déjà annoncé une "adaptation" du dispositif Vigipirate mis en place. Mais si les quelque 700 écoles et synagogues juives et plus de 1 000 des 2 500 mosquées sont protégées dans le cadre de l'opération Sentinelle, il paraît illusoire d'appliquer un même niveau de sécurité à la totalité des 45 000 églises catholiques, auxquelles s'ajoutent 4 000 temples protestants, dont 2 600 évangéliques, et 150 lieux de culte orthodoxes.
Actuellement, 1 227 sites chrétiens font l’objet d’une protection particulière. Selon un récent rapport parlementaire sur les moyens de lutte contre le terrorisme, le choix des sites à protéger s'est fait en concertation avec les préfets et les autorités cultuelles locales. Un état des lieux est adressé toutes les semaines à la mission de protection des lieux de culte.
Le choix de la surveillance d’un lieu de culte se fait au cas par cas en fonction de la fréquentation du lieu, de la médiatisation ou non du prêtre et des informations dont disposent les services de renseignement. Le dispositif peut aller de la simple patrouille durant l’office à une garde statique organisée jour et nuit.
La sécurité a notamment été renforcée autour de certains lieux particulièrement sensibles comme la cathédrale Notre-Dame de Paris ou la basilique du Sacré-Cœur, qui figurent parmi les endroits les plus visités au monde. Il a également été conseillé aux paroisses de n'ouvrir qu'un seul accès. Et à l'entrée, le personnel peut désormais demander aux visiteurs d'ouvrir leurs sacs, qu'ils n'ont cependant pas le droit de fouiller.
La vigilance, "ça ne tient pas dans la durée"
À deux reprises l'an dernier, pour les fêtes chrétiennes du 15-Août et de Noël, des instructions ont été données aux préfets et aux forces de police et de gendarmerie pour renforcer la vigilance autour des églises. Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve mettait notamment en garde contre des "modes opératoires nouveaux" et des cibles "de plus en plus diversifiées", soulignant l'exceptionnelle force symbolique" que constituerait une attaque contre une église.
"Juste après l'attentat déjoué de Villejuif, on avait fait attention à ne pas ouvrir toutes les portes des églises, on était vigilant à qui entrait, mais ça ne tient pas dans la durée, il faut être réaliste", a expliqué Vincent Neymon, porte-parole adjoint de la conférence des évêques de France. "Nous savons aussi que l'État ne peut pas mettre des forces de l'ordre devant tous les lieux de culte, et même si c'était le cas, cela suffirait-il ?"
Cette attaque perpétrée sur un lieu saint va-t-elle changer le dispositif de sécurité actuellement mis en place sur l’Hexagone? La conférence des représentants des cultes en France qui se tient mercredi avec François Hollande le dira peut-être. "Tout sera fait pour protéger nos églises et nos lieux de culte", a d'ores et déjà assuré le président français lors d'un appel téléphonique au pape François.
En attendant, la conférence des évêques de France plaide pour que églises restent "des lieux ouverts, des lieux d'accueil, conforme à l'esprit même de la religion catholique". Et Vincent Neymon de conclure : "C'est par la cohésion que nous arriverons à vaincre, il faut à tout prix éviter les fractures, les replis au sein des communautés et de la société".
Avec Reuters