
Mo Chara, membre du groupe de rap irlandais Kneecap, s'adresse à ses supporters devant le tribunal de première instance de Westminster à Londres, le 20 août 2025. © Justin Tallis, AFP
La programmation du groupe a valu aux festival la perte de plusieurs subventions. Le trio Kneecap, originaire d'Irlande du Nord et dont l'un des membres est poursuivi par la justice britannique pour soutien au Hezbollah, se produit dimanche 24 août au festival Rock en Seine. Le concert, qui durera une heure environ, doit démarrer vers 18 h 30 et sera hautement surveillé. En invitant ce groupe de Belfast il y a plusieurs mois, les organisateurs de l'événement français n'avaient pas imaginé que sa présence allait créer une telle controverse.
Car, en faisant de chaque spectacle une tribune pour la cause palestinienne sur fond de guerre dans la bande de Gaza, les artistes gaéliques, qui oscillent entre punk et rap, ont braqué sur eux la lumière des projecteurs et des autorités.
L'un des trois membres de Kneecap, Liam O'Hanna dit Mo Chara, est ainsi poursuivi pour "infraction terroriste" après s'être couvert, lors d'un concert à Londres en 2024, d'un drapeau du Hezbollah. Ce mouvement islamiste libanais pro-iranien, ennemi juré d'Israël, est classé terroriste au Royaume-Uni.
Soutenu par des centaines de partisans, Mo Chara a comparu mercredi dans la capitale britannique puis est reparti libre, la décision étant ajournée au 26 septembre.
Ces péripéties judiciaires n'empêchent pas Kneecap de poursuivre sa tournée à guichets fermés, comme à Glastonbury fin juin, où il avait accusé Israël d'être un État "criminel de guerre".
Il a en revanche été privé du festival Sziget de Budapest, après une interdiction d'entrée sur le territoire rendue par le gouvernement hongrois, proche allié d'Israël.

Subventions supprimées
"On a l'assurance que le groupe va se tenir tout à fait correctement", avait assuré à l'AFP Matthieu Ducos, directeur de Rock en Seine, quelques jours avant l'ouverture du festival située à Saint-Cloud, près de Paris.
"C'est un groupe qui reste relativement confidentiel en France mais qui a gagné beaucoup en notoriété ces derniers temps, pour des très bonnes raisons artistiques, mais aussi toute cette polémique qui a fait qu'il a gagné énormément en visibilité et en fans", avait-il ajouté.
Dans ce contexte, la ville de Saint-Cloud a retiré sa subvention de 40 000 euros à Rock en Seine, une première.
La région Ile-de-France a également annulé ses aides pour l'édition 2025. La subvention s'élevait à 295 000 euros en 2024, à laquelle s'ajoutent 150 000 euros d'aides indirectes à travers l'achat de billets.
Le désengagement de ces collectivités ne met toutefois pas en jeu la viabilité du festival, dont le budget est compris entre 16 et 17 millions d'euros cette année.

Sans incident en France
En France, Kneecap – "rotule" en anglais, référence à la pratique des milices paramilitaires qui tiraient dans les genoux de leurs victimes pendant le conflit nord-irlandais – s'est déjà produit à deux reprises cet été.
Leurs concerts aux Eurockéennes de Belfort début juillet et au Cabaret vert de Charleville-Mézières mi-août ont eu lieu sans incident.
Des voix s'élèvent toutefois pour demander leur déprogrammation à Saint-Cloud. "Ils profanent la mémoire des 50 Français victimes du Hamas le 7-Octobre comme de toutes les victimes françaises du Hezbollah", a déclaré sur X jeudi Yonathan Arfi, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif).
Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a pour sa part affirmé que la vigilance serait de mise envers "tout propos à caractère antisémite, d'apologie du terrorisme ou appelant à la haine".
Rock en Seine est détenu par le géant américain des tournées AEG et Combat, groupe de l'homme d'affaires français Matthieu Pigasse, qui voit dans la présence de Kneecap un enjeu de "liberté de création et d'expression".
"Il ne faut pas accepter le principe de censure parce que, sinon, c'est une vague qui va déferler sur les festivals et sur les médias", a-t-il dit au média musical Billboard France.
Avec AFP