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Guerre d'Algérie : Sarkozy tacle Hollande sur la commémoration du 19-Mars

À l'occasion de la journée nationale du Souvenir Algérie-Maroc-Tunisie, François Hollande se rendra le 19 mars au Quai Branly pour rendre hommage aux victimes de la guerre d'Algérie. Une date qui a suscité la colère de Nicolas Sarkozy.

C'est une initiative qui est loin de faire l'unanimité. Pour la première fois depuis la fin de la guerre d'Algérie, un président français, en l'occurrence François Hollande va assister aux commémorations du 19-Mars, date du cessez-le-feu scellé par les accords d'Évian en 1962. Le président du parti Les Républicains, Nicolas Sarkozy, a ainsi lancé une violente charge contre le chef de l'État dans une tribune publiée jeudi 17 mars sur le site internet du journal Le Figaro.

"Le président de la République et sa majorité ont choisi délibérément le 19 mars, date du cessez-le-feu qui suivit la signature des accords d'Évian pour commémorer la fin de la guerre d'Algérie. Pour qu'une commémoration soit commune, il faut que la date célébrée soit acceptée par tous. Or, chacun sait qu'il n'en est rien, le 19 mars reste au cœur d'un débat douloureux, écrit l'ancien chef de l'État. Choisir la date du 19 mars que certains continuent à considérer comme une défaite militaire de la France, c'est en quelque sorte adopter le point de vue des uns contre les autres, c'est considérer qu'il y a désormais un bon et un mauvais côté de l'Histoire et que la France était du mauvais côté", poursuit-il.

Une date qui a toujours divisé

Pour argumenter sa démonstration, l'actuel candidat à la primaire de la droite et du centre n'hésite pas à exhumer le souvenir d'un autre socialiste, partie prenante des évènements de l'époque. "Le président François Mitterrand, lui-même, refusa catégoriquement de reconnaître cette date pour commémorer la fin de la guerre d'Algérie", argumente Nicolas Sarkozy. "Il faut dire qu'il avait été un acteur de l'époque, en prise avec ces événements. Il savait que le conflit n'avait pas cessé au lendemain des accords d'Évian et que la tragédie au contraire s'était poursuivie pendant des mois".

La date du 19 mars a toujours fait débat de part et d'autre de la Méditerranée. En France, d'aucuns estiment qu'elle est marquée du sceau de l'infamie. Les rapatriés estiment que le cessez-le-feu du 19 mars 1962, négocié la veille lors des accords d'Évian, ne marque pas la fin de la guerre. Bien au contraire. Ils avancent notamment le fait que plusieurs milliers d'Européens et de harkis ont été tués après. Sans oublier l'exode des pieds-noirs. Le site d'extrême droite Valeurs Actuelles, qui a lancé une pétition contre "la commémoration de la honte et du déshonneur", dénonce "le voile noir de l'oubli sur les souffrances d'une partie de ses compatriotes, poursuit sa démarche de repentance vis-à-vis de l'Algérie, qui célèbre le 19 mars comme une victoire, et exige que ne soit reconnue qu'une seule catégorie de victimes […]". Dans la même lignée, la présidente du Front national Marine Le Pen a accusé vendredi le chef de l'État de "violer la mémoire" des anciens combattants et harkis.

Deux histoires, deux mémoires en concurrence

Selon Thierry Rolando, président national du Cercle algérianiste, cité dans les colonnes du journal algérien El Watan, il ne s'agit une fois de plus que de la mise en concurrence de deux mémoires. "François Hollande est en train de tourner le dos à une partie de la communauté nationale, il ne reconnaît qu’une seule souffrance, celle des Algériens et jette un voile d’ombre sur les drames des harkis et des Français d’Algérie. Il pourrait embrasser toutes les mémoires en se rendant aux commémorations du 5 décembre."

En 2002, pour mettre fin à la polémique sur la guerre d'Algérie, Jacques Chirac avait en effet choisi le 5 décembre pour rendre hommage à tous les morts de ce conflit. Une date neutre correspondant uniquement à l'inauguration du mémorial national de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie au musée du Quai Branly. Un décret du 26 décembre 2003, rappelé dans une loi du 23 février 2005, a officialisé ce calendrier.

Nicolas Sarkozy appelle donc le chef de l'État à choisir l'apaisement. "La guerre d'Algérie a été un événement dramatique, des hommes et des femmes portent encore dans leur souvenir comme dans leur chair la trace de cette Histoire vivante, ne déclenchons pas une guerre des mémoires".