L'ex-proche de Kadhafi, Khalifa Haftar, a été nommé lundi à la tête de l'armée libyenne par le gouvernement de Tobrouk, reconnu par la communauté internationale. Un message à l'intention des Occidentaux pour légitimer ses actions.
L’ex-général Khalifa Haftar, 71 ans, sort officiellement de sa retraite. L’ancien proche de Kadhafi a été nommé lundi 2 mars commandant en chef de l'armée libyenne rattachée au gouvernement de Tobrouk, reconnu par la communauté internationale.
Par le passé, Khalifa Haftar avait d’abord servi Mouammar Kadhafi, avant de se retourner contre lui. De retour en Libye en 2011, il a soutenu la rébellion et récupéré ses galons. Aujourd’hui, il se positionne comme l'homme fort de l'Est libyen, où s'est installé à Tobrouk un gouvernement reconnu par la communauté internationale, mais chassé l'été dernier de la capitale libyenne. À Tripoli en effet, c’est une autre administration qui a été mise en place par des miliciens islamistes venus de Misrata.
La nomination de Haftar au poste de chef des armées pourrait compliquer le travail de l’ONU, qui tente d'organiser un accord de paix entre les deux camps rivaux, car le gouvernement de Tripoli est très hostile au vieux général.
Après avoir réussi à faire fusionner les forces regroupées autour de sa personne avec l'armée du gouvernement légal basé dans l'est du pays, Haftar avait lancé en mai dernier l’"Opération dignité" pour mener sa croisade contre les diverses milices islamistes et contre "Aube de la Libye", la force qui domine le gouvernement de Tripoli.
Il espère la levée de l'embargo sur ses forces
Pour Wassim Nasr, journaliste à France 24 et spécialiste des mouvements jihadistes, la nomination de Haftar est un message à destination des Occidentaux. "Son opération de lutte contre les milices islamistes patauge, il n’a pas réussi à reprendre Benghazi, mais sa nomination officialise son statut, car il n’avait aucun titre internationalement reconnu", explique-t-il.
Redevenu chef des forces armées, Khalifa Haftar peut se prétendre porteur d’une véritable mission. Il espère une levée de l’embargo sur ses forces, ce qui pourrait permettre des livraisons d’armes à la Libye, estime Wassim Nasr.
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Proche des États-Unis et de l’Égypte
Exfiltré après l’échec d’une opération qu’il menait contre les forces de Khadafi au Tchad en 1990, le général Haftar a vécu 21 ans d’exil aux États-Unis avant de revenir en Libye pour la révolution de 2011. Dans l’État de Virginie, il a vécu à Langley, une ville proche du siège de la CIA qui le forme militairement. Depuis son retour en Libye, il suscite la méfiance de la part d’une partie de la classe politique qui le considère comme un allié des Américains, voire un agent de la CIA.
Ahmed el Jazoui, porte-parole de la coalition des révolutionnaires de Benghazi contre qui le général a dirigé une attaque en mai dernier, l’avait également accusé de bénéficier d’un soutien égyptien. "Nous sommes quasi sûrs qu’il a bénéficié d’un soutien logistique ou du moins d’une assistance technique au sein de son QG", avait-il confié à RFI et France 24 après l’attaque de Benghazi en mai.
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Un Sissi libyen ?
Reconnu comme un militaire ambitieux, la nomination officielle de Khalifa Haftar marque un pas de plus vers son ascension au pouvoir. Une ambition qu’il n’a jamais encore affirmée haut et fort, mais que beaucoup lui prêtent. Pour ses détracteurs, le général se verrait bien un destin comparable à celui de l'Égyptien Abdel Fattah al-Sissi, ancien chef d'état-major des forces armées égyptiennes aujourd'hui président du pays.
Le gouvernement parallèle en place à Tripoli l'accuse notamment de vouloir remettre en place l'État policier qui prévalait sous Kadhafi.
Avec AFP