
Le président russe a effectué lundi une visite en Turquie pour évoquer avec son homologue turc le partenariat économique qui lie leurs pays. L’occasion de se pencher sur deux hommes qui partagent de nombreux points communs.
Accompagné d'une pléiade de ministres, Vladimir Poutine a effectué, lundi 1er décembre, une "visite de travail" en Turquie, où il a rencontré son homologue turc Recep Tayyip Erdogan, dans le cadre de la réunion du Conseil de coopération de haut niveau entre les deux pays. Il a notamment été question des dossiers énergétiques et commerciaux entre les deux nations, dont les échanges ont atteint 32,7 milliards de dollars en 2013 (26,2 milliards d'euros). L’objectif affiché des deux partenaires est de tripler ce chiffre pour lui faire atteindre d’ici 2020 la barre des 100 milliards de dollars (80 milliards d'euros).
Et ce, signe du pragmatisme et des priorités de Moscou et d’Ankara, malgré de sérieux désaccords diplomatiques sur des sujets aussi délicats que les évènements en Ukraine et la guerre en Syrie. Inévitablement, cette dernière devrait être au menu des discussions entre le président russe, allié indéfectible du régime de Damas, et son homologue turc, qui n’a de cesse d’appeler à la chute de Bachar al-Assad et qui est accusé d’avoir grandement favorisé l’entrée de jihadistes en Syrie.
Des positions diamétralement opposées qui ne risquent pas d’évoluer de si tôt, tant Russes et Turcs sont farouchement ancrés sur la même ligne depuis le début de la crise en mars 2011. Toujours est-il que cet antagonisme n’a, à aucun moment depuis plus de trois ans, obligé l'un ou l'autre à remettre en question leur solide partenariat économique, capital pour les deux pays, notamment sur le plan énergétique. La Turquie arrive en effet au deuxième rang des clients du gaz naturel russe, après l'Allemagne, et Moscou a décroché le contrat pour la fabrication de la première centrale nucléaire turque, dont le premier des quatre réacteurs devrait être opérationnel d'ici 2020, pour un montant de 20 milliards de dollars (16 milliards d'euros).
Valeurs et pratique du pouvoir identiques
La solidité de cette relation privilégiée a tenu bon, malgré les soubresauts diplomatiques, grâce à la volonté des deux hommes forts qui partagent une multitude de valeurs et de points communs, malgré des contextes nationaux différents. Au point qu’Erdogan a souvent été décrit comme le Poutine du Bosphore.
Et pour cause, Recep Tayyip Erdogan, 60 ans, et Vladimir Poutine, 62 ans, sont non seulement de la même génération, mais ils sont tous les deux aussi populaires et contestés dans leur propre pays.
Charismatiques, ils sont également perçus, d’un point de vue occidental, comme les chantres d’un pouvoir central autoritaire. En cause, leur politique à l’égard des libertés publiques en général, de l’instrumentalisation des médias et de la justice. Et surtout leur tendance commune à museler leurs opposants les plus actifs, tout en criant au complot.
Le rejet de l’Occident est également un point de ralliement pour les deux dirigeants : l’un, Erdogan, préside un pays rejeté jusqu’ici par les Européens, malgré la volonté longtemps affichée par Ankara, membre de l’Otan et du G20, d’adhérer à l’Union européenne (EU). L’autre, Poutine, est à la tête d’un pays isolé et ciblé par des sanctions économiques et financières décidées par les Occidentaux, à cause de la crise ukrainienne. Autant de raisons de se rapprocher encore plus.
Nationalistes, leur vision de la politique est également très proche, dans le sens où ils cherchent à redorer le blason de deux nations, naguère puissantes et influentes sur la carte du monde, comme le furent chacun en son temps l’Union soviétique et l’Empire Ottoman.
Économiquement, ils sont tous les deux de tendance libérale, favorisant le développement de leurs pays tout en tissant des liens personnels étroits avec les milieux économiques de leurs pays. Ils se rejoignent socialement aussi, où ces deux conservateurs critiquent la décadence de l’Occident, rejettent l’homosexualité et prônent le retour aux valeurs familiales et religieuses qui découlent pour l'un de l'islam et pour l'autre de l’orthodoxie russe.