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Tour de France : "Jicé" Péraud, routard sur le tard, à la conquête des cols

À 37 ans, le vétéran Jean-Christophe Péraud est en passe de signer un exploit retentissant : un podium sur le Tour de France, 17 ans après Richard Virenque, au nez et à la barbe de la jeune garde du cyclisme tricolore. Portrait.

Chez AG2R La Mondiale, on le dépeint comme lunaire, taciturne… Sur un vélo, Jean-Christophe Péraud correspond vaguement au croquis que ses coéquipiers esquissent de lui. À 37 ans, le vétéran est un coureur appliqué, peu expressif, mais résistant à l’effort en dépit de son manque d’explosivité. L’antithèse d’un Richard Virenque, en somme.

Pourtant, s’il rallie l’arrivée à Paris sans connaître de défaillance, c’est à l’ancien coureur de la Festina qu’il sera inévitablement comparé. S’il ne connaît pas de défaillance sur le chrono de 54 kilomètres prévu samedi entre Bergerac et Périgueux, Péraud deviendra le premier Français à s’inviter sur le podium du Tour, 17 ans après Virenque.

Un pied de nez amical à la nouvelle garde du cyclisme français, emmenée par Thibault Pinot et Romain Bardet. Si les "jeunes pousses" ont accroché le Top 10 au talent, Péraud, lui, aura gravi le podium à l’expérience.

Vice-champion olympique de VTT

À la différence de Pinot et Bardet, issus du sérail de la formation à la française, ce Toulousain, diplômé d’ingénierie en génie énergétique et environnement, n’est devenu routard que sur le tard. L’essentiel de son palmarès, c’est sur la selle d’un VTT qu’il se l’est forgé.

Dans les années 2000, alors que le cyclisme sur route français peine à se trouver des leaders, lui accumule les breloques en cross-country, une discipline du VTT. Avec l’équipe de France, il décroche un titre de Champion du monde (2008) et deux couronnes européennes (2002-2008). En individuel aussi, il truste les podiums : champion d'Europe de cross-country (2005), champion de France de VTT marathon (2003) et surtout vice-champion olympique de VTT (2008).

Éclosion sur la route

La trentaine passée, "Jicé" décide finalement de poursuivre sa carrière sur le bitume. Dès 2008, il devient champion de France amateur sur route mais c’est un autre exploit, en 2009, qui lui permettra de taper dans l’œil des formations professionnelles.

Le 25 juin, il devient le premier coureur amateur à remporter le championnat de France Élite du contre-la-montre, devant l'inévitable Sylvain Chavanel, double tenant du titre à l'époque.

La formation belge Omega-Pharma-Lotto sera la plus prompte à capitaliser sur ce surprenant vétéran. En 2010, à 32 ans, Péraud passe professionnel. En raison d’une cohabitation compliquée avec son leader Jürgen Van den Broeck, il ne restera qu’un an au sein de l’équipe, décrochant tout de même deux Top 10 à Paris-Nice et sur le Tour du Pays basque.

Un Top 10 sur le Tour

Débauché par AG2R en 2011, le Toulousain devient le leader naturel de l’effectif dirigé par Vincent Lavenu. Sous sa nouvelle tunique, il multiplie les places d'honneur (Tour méditerranéen, Paris-Nice, Critérium international et Critérium du Dauphiné, notamment). Une forme qu'il confirme en juillet de cette même année, en terminant 9e de son premier Tour de France.

La suite confirme à Lavenu qu’il a eu le nez creux. Malgré une saison 2012 en demi-teinte, "Jicé" forge sa place parmi les meilleurs en 2013, s’offrant notamment son premier podium World Tour en accrochant la troisième place de Paris-Nice.

Sur le Tour 2013, alors qu’il est en passe d'égaler sa meilleure performance - une 9e place -  il chute à deux reprises au cours de la 17e étape et quitte la Grande Boucle prématurément. Clavicule fracturée et échec frustrant pour le coureur français.

Consécration attendue samedi

À 36 ans, l’ancien VTTiste décide pourtant de remettre le couvert. Et pour le meilleur. En 2014, il multiplie les performances encourageantes à l'aube de son quatrième Tour (2e du Tour méditerranéen, 3e du Tour du Pays basque, 4e de Tirreno-Adriatico, et brillant vainqueur du Critérium international).

Pour la première fois, à tout juste 37 ans, il abordait la Grande Boucle avec une étiquette de candidat au Top 5. Un statut auquel il a d’ores et déjà fait honneur en étant l’un des seuls à pouvoir prendre la roue de l’intouchable Vincenzo Nibali sur certains cols.

Le chrono de samedi, au profil légèrement accidenté, devrait permettre à cet excellent rouleur de grimper à la 2e place du général, sauf "coup de moins bien". Une performance qui serait aussi inattendue qu’exceptionnelle.