
Alors que François Hollande débute une visite d’État aux États-Unis, les présidents français et américain ont cosigné une tribune publiée des deux côtés de l'Atlantique dans laquelle ils se félicitent de la coopération franco-américaine en Afrique.
"Plus qu'ailleurs, c'est peut-être en Afrique que notre nouveau partenariat trouve son expression la plus visible", écrivent d’une même plume Barack Obama et François Hollande dans une tribune publiée, lundi 10 février, par "Le Monde" et "The Washington Post". Outre les initiatives visant à "renforcer l’agriculture et à lutter contre la faim, (…) le Sida, la tuberculose et le paludisme", c’est surtout sur les questions sécuritaires que la coopération est la plus évidente.
Succès au Mali grâce au soutien américain
L’interventionnisme français en Afrique, qui s’est traduit notamment par les opérations Serval (au Mali) et Sangaris (en Centrafrique), serait plutôt du goût des Américains. La première a d’ailleurs été un exemple du partenariat franco-américain sur le continent noir. "Je crois que les Américains ont été impressionnés par le succès français au Mali", analyse Jean-François Pactet, membre du Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS), dans une interview accordée à RFI. "Ils sont impressionnés par la détermination française à s’impliquer et à agir et c’est un des éléments de la coopération franco-américaine qui marche vraiment de façon très satisfaisante aujourd’hui." Le chercheur note qu’"il y a eu une coopération franco-américaine très forte dès les étapes initiales au Conseil de sécurité (ONU) en matière de diplomatie et en matière de négociation des conditions qui ont permis à cette opération d’intervenir".
Au Mali, le Pentagone s’est chargé d’acheminer sur le terrain une partie du matériel militaire et a fourni à l’armée française des avions ravitailleurs et des avions de surveillance. Un coup de main précieux, de l’avis de nombreux experts militaires. Si l’opération militaire au Mali a été un succès, un an plus tard, malgré un retour progressif de la démocratie, le Nord du pays est toujours instable. Les violences entre communautés sont récurrentes et les populations en attente d'aide au développement se sentent toujours laissées pour compte.
Un partenariat "opérationnel" à renforcer
La lutte contre le terrorisme dans la bande sahélienne était déjà le sujet majeur de la visite à Washington de Jean-Yves Le Drian, fin janvier. Le ministre français de la Défense venait présenter à son homologue américain, Chuck Hagel, la nouvelle stratégie française en Afrique. L’occasion de plaider pour un partenariat stratégique renforcé "tout à fait indispensable" avec les États-Unis dans la lutte contre le terrorisme en Afrique. L’armée française a par ailleurs récemment acheté en urgence deux drones de surveillance américains Reaper MQ-9, capables de faire du renseignement sur l’ensemble de la zone sahélienne, et installé une station de contrôle au sol à Niamey.
En ligne de mire de Paris et Washington : le Fezzan (Sud libyen), où le terrorisme s’est installé depuis le départ de Mouammar Kadhafi en 2011 et renforcé après la traque des djihadistes du Nord-Mali. Mercredi 5 février, dans une interview à RFI, le ministre de l’Intérieur du Niger, Massoudou Hassoumi, a purement et simplement appelé "les puissances qui sont intervenues en Libye [dont la France et les Etats-Unis] pour renverser le colonel Kadhafi" à "faire le service après-vente (…) pour éradiquer la menace terroriste dans le Sud de la Libye". Une demande d’intervention claire à laquelle Paris et Washington réfléchissent. Selon RFI, trois drones tueurs de l'armée américaine sont arrivés à Niamey. Certaines sources évoquent même un déploiement ultérieur de troupes près de la ville nigérienne d’Agadez, au plus proche de la Libye, alors qu’un nouveau détachement de forces spéciales américaines et françaises est attendu au Niger pour la mi-février. Elles doivent officiellement participer à un exercice régional qui s'est déjà déroulé par le passé au Mali et en Mauritanie.
À l’issue de son entretien avec Chuck Hagel, fin janvier au Pentagone, Jean-Yves Le Drian avait exprimé son souhait de voir la coopération avec les États-Unis s’étendre davantage. Si Français et Américains contribuent – du Sénégal à la Somalie – à l'entraînement et à l'équipement des forces régionales pour qu'elles puissent assurer elles-mêmes la sécurité, Paris voudrait une politique plus volontariste de son allié d’outre-Atlantique "dans le domaine opérationnel". Une manière de suggérer à Washington d’apporter plus qu’un simple appui logistique ou financier en cas de nouvelle intervention sur la terre africaine.