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La justice ouvre les portes du Zénith de Nantes à Dieudonné

Quelques heures après l'autorisation du spectacle de Dieudonné au Zénith de Nantes jeudi soir, les associations juives "déçues" ont appelé à manifester. Le spectacle, qui affiche presque complet, s'annonce agité.

Quelques heures après la décision du tribunal administratif de Nantes d’autoriser le spectacle de Dieudonné au Zénith de Nantes, des associations juives "déçues" par la justice, ont appelé à des rassemblements, jeudi 9 janvier. La soirée s’annonce houleuse aux abords de l’enceinte culturelle nantaise, qui affiche presque complet. Les forces de l’ordre ont commencé à se rassembler dès la fin d’après-midi.

L'Union des étudiants juifs de France (UEJF) organisera notamment avant le début de la soirée une "manifestation informative" en face du Zénith pour "alerter les spectateurs sur les dangers des propos qui seront tenus par Dieudonné." De son côté, Roger Cukierman a également réagi : "Nous prenons acte de la décision du tribunal, mais Dieudonné piétine la loi", a estimé le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), appelant à un rassemblement dimanche à 15h00 aux Invalides, à Paris.

"Je suis très déçu", a ajouté Serge Klarsfeld de l'association des Fils et filles de déportés. "Nous sommes dans le seul pays occidental où, à la fois, on tue des enfants juifs et il y a des spectacles antijuifs qui sont librement ouverts au public. C'est intolérable", a-t-il déclaré sur RTL.

Annulation de l’arrêté d’interdiction

Un peu plus tôt en début d’après-midi, au terme de deux heures d’audience, le juge unique, Jean-François Molla, avait décidé d'autoriser la prestation de l'humoriste controversé. Le tribunal administratif de Nantes a rendu sa décision jeudi en début d'après-midi sur le référé de Dieudonné visant l'arrêté d'interdiction de son spectacle, prévu dans la soirée.

"Le tribunal administratif de Nantes suspend l'exécution de la décision par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique a interdit la représentation du spectacle "Le Mur" de M. Dieudonné M'bala M'bala le 9 janvier 2014 au Zénith de Saint-Herblain", a indiqué le tribunal dans un communiqué, en ajoutant que le spectacle "ne peut être regardé comme ayant pour objet essentiel de porter atteinte à la dignité humaine".

Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, a aussitôt annoncé son intention de saisir le Conseil d'État pour faire appel de cette autorisation. Dans un communiqué, le ministre a estimé que le juge des référés n'avait pas "éteint les voies de droit" en "confirmant la thèse qui fait du respect de la dignité de la personne humaine une composante fondamentale de l'ordre public".

"Une victoire totale et complète"

"C'est une suspension de l'arrêté qui a été rendue", s'est aussitôt réjoui l'avocat de Dieudonné, Jacques Verdier, à l'annonce de cette décision. "C'est donc une victoire totale et complète en ce qui concerne Dieudonné M'Bala M'Bala."

Dans sa plaidoirie, Me Jacques Verdier avait estimé que seul le spectacle "Le Mur" a été interdit par les termes de l'arrêté préfectoral, mais que rien n'empêche son client de jouer sur la scène du Zénith de Nantes un "best of" de ses autres spectacles.

Au sujet du geste de la "quenelle" dont il récuse le caractère antisémite, Me Verdier a déclaré que "Dieudonné ne s'associe en aucune façon à la gestuelle quenelle faite et publiée dans des endroits inconvenants. On ne peut la faire devant par exemple Auschwitz" ou "d'autres lieux en mémoire du peuple juif massacré pendant la Seconde Guerre mondiale".

Un revers pour le gouvernement

De leur côté, les avocats de l'État, Mes Pascale Leglise et Antoine Plateaux, ont dénoncé devant le tribunal administratif tour à tour "l'immonde" et "l'indicible" en faisant référence au spectacle de Dieudonné : "On n'est plus dans le domaine de l'humour, on ne peut plus se réclamer de la liberté d'expression".

Deux audiences se succèderont par ailleurs dans l'après-midi à Orléans à partir de 15h30, pour examiner deux recours contre l'interdiction du spectacle prévu vendredi à Tours, déposés respectivement par un spectateur et par Dieudonné. Un troisième spectacle, prévu samedi à Orléans, a également été interdit.

Cette victoire de Dieudonné constitue un revers pour le gouvernement, très engagé pour ce dossier. Lundi, une circulaire du ministère de l'Intérieur avait préconisé l'interdiction au cas par cas du spectacle "Le Mur", pour troubles à l'ordre public.

Avec Reuters et AFP