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Selon Al-Qaïda, les pro-Morsi défient l'armée avec l'aide de Washington

Alors que les sit-in des pro-Morsi continuent de défier le pouvoir, le chef d'Al-Qaïda accuse l'armée d'avoir "comploté" avec Washington pour renverser l'ex-président islamiste. Il appelle aussi les Égyptiens à rejeter la démocratie pour la charia.

Efforts diplomatiques samedi au Caire

L'émissaire de l'Union européenne, Bernardino Leon, ainsi que les deux envoyés spéciaux des États-Unis, le n°2 du département d'État Williams Burns et l'ambassadrice au Caire, Anne Patterson, ont rencontré samedi Nabil Fahmy, ministre des Affaires étrangères du gouvernement mis en place par l'armée.

Ils ont aussi rencontré une délégation de partisans de Mohamed Morsi. Ces derniers ont déclaré aux médiateurs internationaux qu'ils respectaient les revendications portées par les manifestations de masse qui ont conduit à sa chute. Mais ils ont aussi demandé à ce que le chef d'état-major des armées et ministre de la Défense, le général Abdel Fattah al Sissi, reste à l'écart de tout accord politique.

La tension ne faiblit pas en Égypte. Les partisans du président égyptien islamiste Mohamed Morsi, destitué par l'armée il y a un mois, continuaient samedi 3 août de défier militaires et policiers. Non seulement les pro-Morsi ont  refusé la veille de quitter deux places du Caire occupées depuis un mois mais ils ont également appelé les manifestants à marcher sur des QG de l'armée et de la police.

Samedi, le gouvernement égyptien a de nouveau exhorté aux protestataires de mettre fin à leurs sit-in et s'est engagé à les intégrer au processus de transition politique s'ils obéissaient à cette injonction. "Vos sit-in incessants n'ont aucune utilité sur les plans politique et juridique", a déclaré samedi Hany Abdel Latif, porte-parole du ministère de l'Intérieur. "Vous pouvez y mettre fin sans dommage, vous serez intégrés politiquement."

La veille, la police a tiré des gaz lacrymogènes et chargé devant un complexe abritant des médias égyptiens, que les islamistes accusent de complaisance à l'égard du pouvoir mis en place par l'armée, alors que des émissaires occidentaux tentent d'ultimes médiations pour éviter un bain de sang.

"La légitimité repose sur la charia"

"Les croisés, les laïcs et l'armée américanisée (d' Égypte) se sont entendus (...), grâce à l'argent des pays du Golfe et un complot des Américains, pour renverser le gouvernement de Mohamed Morsi", a déclaré samedi Ayman al-Zawahiri, en réponse aux déclarations du secrétaire d'État américain John Kerry qui a estimé que les militaires avaient en fait "rétabli la démocratie" en déposant M. Morsi à la demande de "millions et de millions" de manifestants. En évoquant les "croisés", l'Égyptien qui a succédé à Oussama ben Laden vise spécifiquement les chrétiens de la communauté copte, 6 à 10 % de la population égyptienne.

Il a également pressé les partisans de Mohamed Morsi de rejeter la démocratie et les élections pour se concentrer sur l'application intégrale de la charia, la loi islamique. "Je donne ce conseil à tous ceux qui ont soutenu Morsi, et je leur dis en premier lieu qu'il faut admettre que la légitimité ne repose pas sur les élections et la démocratie, mais sur la charia", a-t-il dit dans un message audio posté samedi sur des forums djihadistes. "La charia, ce n'est pas l'élection de Morsi comme président d'une république, comme président d'un État laïc et nationaliste", a-t-il ajouté.

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"Deux nouveaux sit-in vont être mis en place"
Selon Al-Qaïda, les pro-Morsi défient l'armée avec l'aide de Washington

ElBaradei prone le dialogue, les faucons prônent la force

Vendredi, les Frères musulmans avaient appelé leurs partisans à venir grossir "pacifiquement" les rangs des deux sit-in sur les places Rabaa al-Adawiya et Nahda du Caire, qu'ils occupent depuis un mois. Les autorités martèlent depuis deux jours qu'elles s'apprêtent à les en déloger de force.

Amnesty International demande une enquête sur la torture

Amnesty International a appelé à l'ouverture immédiate d'une enquête sur des allégations selon lesquelles des partisans du président évincé ont torturé des opposants au Caire. L'organisation de défense des droits de l'homme avertit toutefois que le gouvernement intérimaire en Égypte ne doit pas prendre le prétexte de ces faits de tortures présumées "pour punir collectivement tous les partisans de Morsi et avoir recours à un usage excessif de la force pour disperser leurs sit-in".

Le vice-président par intérim et prix Nobel de la Paix, Mohamed ElBaradei, a estimé qu'il ne pourrait pas contenir longtemps les faucons du gouvernement et de l'armée qui, fort d'un soutien croissant de la population, prônent la manière forte contre les manifestants islamistes.

"Des gens sont vraiment furieux contre moi parce que je dis : prenons notre temps, parlons avec eux. L'humeur, maintenant, c'est plutôt 'écrasons-les'", a-t-il assuré dans un entretien avec le "Washington Post", ajoutant : "Je tiens le fort, mais je ne tiendrai pas longtemps".

"Situation explosive"

En annonçant la dispersion imminente des protestataires, les autorités s'appuient sur le mécontentement d'une très grande partie du peuple égyptien à l'égard du gouvernement de M. Morsi, relayé par la presse, dressée de manière quasi-unanime contre les occupants des places Rabaa et Nahda. Mais cette impatience est tempérée par le ballet diplomatique dont Le Caire est le théâtre depuis des jours, la communauté internationale, Union européenne en tête, pressant à la fois les autorités de faire preuve de retenue et les Frères musulmans à évacuer les places.

L'un de ces médiateurs européens, le chef de la diplomatie allemande Guido Westerwelle a jugé jeudi soir que la situation était "explosive" en Égypte. L'émissaire de l'Union européenne Bernardino Leon, arrivé jeudi, a poursuivi péniblement ses efforts de médiation vendredi. Et le secrétaire d'État adjoint américain William Burns est arrivée dans la soirée au Caire pour une visite-surprise.

Avec dépêches