L'Égypte était toujours dans l'attente, dimanche soir, de la nomination d'un exécutif de transition. Dans le même temps, de nouvelles manifestations avaient lieu entre anti et pro-Morsi , risquant d'entraîner de nouvelles violences.
Des dizaines de milliers d'opposants à Mohamed Morsi se sont rassemblés dimanche 7 juillet en Égypte, notamment sur la place Tahrir au Caire. Une démonstration de force destinée à prouver que l'ex-président islamiste a été renversé par une révolution populaire et non un coup d'État. Des avions de chasse rasaient les toits de la capitale, lâchant derrière eux de la fumée aux couleurs du drapeau national et, place Tahrir, la mobilisation se voulait pacifique, après des heurts très violents vendredi entre pro et anti-Morsi.
itDe leur côté, les islamistes mobilisent toujours leurs troupes pour maintenir la pression sur l'armée, qui détient Mohamed Morsi depuis sa destitution, et dénoncer l'"État policier" qu'elle a instauré, selon eux. Les partisans du président déchu étaient massés par milliers près de l'université du Caire, dans le quartier de Guizeh, devant une mosquée du faubourg de Nasr City, ainsi que devant la Garde républicaine, où quatre des leurs sont morts vendredi lors d'échanges de tirs avec des soldats.
Ces mobilisations rivales font craindre de nouvelles violences, alors que de difficiles tractations se poursuivent en vue de la nomination d'un exécutif provisoire. Vendredi, au moins 37 personnes avaient été tuées et plus de 1 400 autres blessées à travers le pays en marge de rassemblements de dizaines de milliers de sympathisants des Frères musulmans, dont est issu Mohamed Morsi.
Les tractations se poursuivent pour constituer un exécutif provisoire
Dimanche soir, le porte-parole de la présidence intérimaire a indiqué sur la chaîne privée ONTV que Ziad Bahaa Eldin, un technocrate de 48 ans, qui a dirigé plusieurs institutions économiques égyptiennes, sera "très probablement" nommé Premier ministre en Égypte, tandis que Mohamed el-Baradei prendra la vice-présidence. Le choix de l’ancien directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et prix Nobel de la Paix comme chef du gouvernement, annoncé une première fois samedi soir par l'agence officielle Mena et plusieurs sources politiques et militaires, s'est heurté aux objections du parti salafiste Al-Nour, partenaire islamiste d'une coalition principalement composée de mouvements laïques.
Alors que la transition a été lancée avec la nomination d'Adly Mansour comme président par intérim et la dissolution de la chambre haute dominée par les islamistes, les nouvelles autorités ne souhaitent pas s'aliéner les salafistes. Néanmoins, Mohamed el-Baradei apporterait la caution d'une personnalité internationalement reconnue, aux fermes convictions démocratiques, à un gouvernement qui doit se mettre en place en vertu d'une "feuille de route" présentée par l'armée.
"On ne peut pas parler de réconciliation nationale et ensuite nommer l'opposant le plus virulent de M. Morsi Premier ministre", a déclaré à l'AFP un haut responsable d'Al-Nour, Nader Baqqar. Un proche d'El-Baradei a confié craindre qu'une telle nomination ne "pousse les salafistes dans les bras" des Frères musulmans. Selon des sources politiques, des tractations auraient lieu à propos des ministères à confier à des partisans d'Al-Nour afin qu'ils acceptent Mohamed el-Baradei.
La lourde mission du prochain chef de gouvernement
Ce dernier a, dans un entretien à l'hebdomadaire allemand "Der Spiegel", assuré qu'il voulait "l'intégration des Frères musulmans dans le processus de démocratisation", et a souhaité que Mohamed Morsi "soit traité avec dignité", alors qu'une campagne d'arrestations et de procédures judiciaires a été lancée contre la confrérie. Quel qu'il soit, le prochain chef de gouvernement aura une lourde mission, le pays étant au bord de la banqueroute financière et en proie à une polarisation donnant lieu à des violences meurtrières. La Constitution a été suspendue et le pouvoir législatif, dominé par les islamistes, a été dissout depuis la chute de Mohamed Morsi.
Le président russe Vladimir Poutine a estimé que l'Égypte était au bord d'une guerre civile. Son homologue américain Barack Obama a répété ne soutenir "aucun (...) groupe égyptien particulier", tandis que l'ex-Premier ministre britannique Tony Blair a défendu le coup militaire, estimant que l'alternative était "le chaos".
Avec dépêches