Un Américain et un Égyptien ont été tués vendredi à Alexandrie, dans le nord de l'Égypte, lors d'affrontements entre pro et anti-Morsi. Un troisième homme est mort en marge d'une manifestation à Port-Saïd.
La tension monte en Égypte entre les partisans du président islamiste Mohamed Morsi et ses opposants. Vendredi 28 juin, un Américain et un Égyptien ont été tués et 70 autres personnes blessées à Alexandrie, la deuxième ville d'Égypte, lors de deux manifestations rivales, selon plusieurs sources sécuritaires et médicales. L'ambassade américaine, qui a confirmé la mort d'un ressortissant américain à Alexandrie, a annoncé qu'elle évacuait son personnel non essentiel ainsi que les membres des familles des diplomates. Elle renouvelle son appel aux Américains à ne pas se rendre en Égypte sauf en cas de nécessité.
Selon le chef de la sécurité à Alexandrie, Amine Ezzedine, le jeune homme, qui travaillait au centre culturel américain d'Alexandrie, "prenait des photos" quand il a été tué dans les heurts. Des sources au ministère de la Santé et de sécurité ont affirmé que l'Américain avait été poignardé. Mais une source médicale a dit qu'il avait été tué par des tirs à la chevrotine.
La télévision égyptienne a diffusé des images montrant des scènes de chaos à Alexandrie, des manifestants courant dans tous les sens alors que des tirs retentissaient. Des colonnes de fumée s'échappant des locaux du siège du Parti de la liberté et de la justice (PLJ), vitrine politique des Frères musulmans, dans le quartier de Sidi Gaber, étaient également visibles.
L’armée et la police avaient pourtant été massivement mobilisées dans plusieurs villes d’Égypte pour protéger les sites stratégiques. Des renforts policiers ont été dépêchés sur place pour disperser les manifestants, selon un responsable de la sécurité.
Sept morts depuis le début de la semaine
Un troisième homme est mort et dix autres personnes ont été blessées dans une explosion au cours d'une manifestation à Port Saïd, à l'entrée du canal de Suez, a rapporté samedi la police. La cause de l'explosion n'a pas été éclaircie mais les
manifestants, pensant qu'il s'agissait d'une bombe, ont attaqué la permanence d'un parti islamiste dans cette ville.
Par ailleurs, dans la ville de Port-Saïd, sur le canal de Suez, un journaliste égyptien a été tué et plusieurs autres personnes blessées lorsque des inconnus ont lancé un petit engin explosif sur des manifestants anti-Morsi, ont indiqué un responsable des services de sécurité et plusieurs témoins.
Ces trois décès portent à sept le nombre de personnes tuées depuis mercredi. Mercredi et jeudi, des affrontements entre partisans et opposants de Mohamed Morsi ont fait quatre morts et des centaines de blessés dans le Delta du Nil.
Au Caire en revanche, aucun affrontement n’a été rapporté au cours des manifestations qui ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes. Place Tahrir, les anti-Morsi ont défilé sous des drapeaux égyptiens, au cri de l’emblématique "Dégage" qu’ils hurlaient au moment de la révolution début 2011.
Calme relatif au Caire
"Des gens de tous horizons participent au rassemblement, témoigne Gallagher Fenwick, l'envoyé spécial de FRANCE 24 au Caire. Des gens déçus par la politique du président islamiste, qui estiment qu’il a muselé les libertés […]. Il y a également beaucoup de gens frustrés par la politique économique de leur président, qui considèrent que l’Égypte est en train de glisser dans un marasme financier, dont elle peine à se sortir."
Parallèlement, plusieurs dizaines de milliers de pro-Morsi se sont rassemblés dans un faubourg du Caire à l'appel des mouvements islamistes. Ils ont promis d'y rester pour défendre "la légitimité [de l'élection de Mohamed Morsi, NDLR]" qui est "une ligne rouge".
Depuis l’arrivée au pouvoir de l’actuel président, issu des rangs de la confrérie islamiste des Frères musulmans, le pays est profondément divisé entre ses partisans qui estiment que le président élu épure les institutions après des décennies de corruption, et ses détracteurs qui lui reprochent de concentrer le pouvoir entre les mains des islamistes.
Un appel à manifester a été lancé par Tamarrod ("rébellion") pour le 30 juin, jour anniversaire de l’investiture de Mohamed Morsi. Ce mouvement populaire, créé en avril pour demander le départ du président, affirme avoir rassemblé 15 millions de signatures demandant la tenue d'une élection présidentielle anticipée.
En prévision de cette mobilisation de dimanche, l’armée a été mise en état d’alerte. Des entreprises ont annoncé qu'elles resteraient fermées ce jour, début de la semaine en Égypte. Au Caire ce vendredi, des habitants retiraient de l'argent et stockaient de la nourriture, tandis que de longues files d'attente se formaient devant les stations d'essence.
Avec dépêches