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Le religieux modéré Hassan Rohani a remporté l'élection présidentielle iranienne dès le premier tour. Cet anti-Ahmadinejad prône plus de souplesse avec l'Occident, notamment dans les discussions sur le nucléaire.

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Hassan Rohani est le nouveau président élu de la République islamique d'Iran. Le ministre de l'Intérieur iranien, Mostafa Mohammad-Najjar, l'a annoncé à la télévision publique en fin de journée samedi 15 juin. Le candidat réformateur âgé de 64 ans récolte 11,75 millions de voix, soit 50,68 % des suffrages exprimés. Il devance largement trois conservateurs : le maire de Téhéran Mohammad Bagher Ghalibaf, ex-commandant des Gardiens de la révolution, Mohsen Rezaïe et le chef des négociateurs nucléaires Saïd Jalili.

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Hassan Rohani, le modéré qui veut renouer le dialogue avec l'Occident

Un score très surprenant, note Ardavan Amir-Aslani, auteur du livre "Iran - État-Unis : Les amis de demain ou l'après-Ahmadinejad", tout comme le taux particulièrement élevé de la participation (72 %). Dans cette course à la présidentielle largement dominée par les ultra-conservateurs proches de l’ayatollah Ali Khamenei, "Rohani ne figurait pas parmi les favoris du système", explique-t-il. Mais il a bénéficié du soutien de candidats qui se sont désistés durant la campagne, à savoir le réformateur Mohammad Reza Aref et des ex-présidents modéré Akbar Hachémi Rafsandjani et réformateur Mohammad Khatami.

Le nouveau président iranien a salué samedi soir, dans un message lu à la télévision d'État, la victoire "de l'intelligence, de la modération, du progrès (...) sur l'extrémisme".

Seul candidat clérical, Rohani est un juriste qui parle anglais couramment et incarne l’ouverture aux yeux des Iraniens. Celui qui a étudié le droit à Glasgow au Royaume-Uni a rassemblé le vote des jeunes, et notamment ceux qui avaient soutenu la révolution verte de 2009, mais aussi celui des femmes, constate Azadeh Kian, professeur de sociologie à l’université Paris VII, qui précise que 70 % de la population est âgée de moins de 40 ans. "Il a conquis non seulement dans les grandes villes mais aussi dans les milieux ruraux", ajoute la spécialiste de l’Iran.

"À quoi ça sert de faire tourner les centrifugeuses si l'économie ne tourne pas ?"

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"C'est l'explosion de joie"
Hassan Rohani, le modéré qui veut renouer le dialogue avec l'Occident

D'allure raide, plutôt rigide, Rohani a réussi à séduire la population avec des propos chocs : "À quoi ça sert de faire tourner les centrifugeuses si l'économie ne tourne pas ?" a-t-il déclaré dans l'une de ses publicités électorales. Étranglés par les sanctions économiques qui ont eu pour effet de faire exploser les prix, les Iraniens ont été sensibles à sa campagne axée sur un "nouveau management pour le pays", qui ne serait "pas basé sur les querelles" en référence à la politique étrangère belliqueuse du président sortant, Mahmoud Ahmadinejad. Il a d’ailleurs choisi comme emblème une clé pour montrer sa volonté d’ouvrir la porte des solutions pour l'Iran.

Et pour redresser le pays, le candidat que l'on qualifie d"anti-Ahmadinejad" prône plus de souplesse dans les discussions avec les grandes puissances sur le nucléaire afin d’alléger les sanctions décrétées contre l'Iran. En tant qu’ancien responsable des négociations sur le dossier nucléaire entre 2003 et 2005 sous la présidence de Khatami (1997-2005), "Rohani sait pertinemment que pour obtenir la levée des sanctions, Téhéran doit aboutir à un accord", juge Ardavan Amir-Aslani.

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"C'est un vote sanction, un vote ras-le-bol"
Hassan Rohani, le modéré qui veut renouer le dialogue avec l'Occident

Le candidat réformateur veut ainsi restaurer l'image du pays et apporter "ce souffle nouveau de paix auprès des Iraniens, mais aussi avec l’Occident", ajoute Ardavan Amir-Aslani. "Il est le seul capable d’être le porte-étendard de cette opposition libérée et modérée".

Faire oublier l'élection contestée de 2009

Mais si l’Iran s’apprête à changer de visage, le pays ne change pas de système pour autant. Hassan Rohani, qui a compté parmi les membres de l’Assemblée des experts chargée de nommer le Guide suprême, n'est pas un révolutionnaire. Sa victoire n’est donc pas synonyme de rupture dans la politique de la République islamique, les dossiers stratégiques comme le nucléaire ou les relations internationales restant sous l'autorité directe du guide suprême Ali Khamenei.

Ce dernier a d'ailleurs réagi sur son compte Twitter estimant que ce scrutin était "un vote de confiance envers le système". Une façon pour les autorités iraniennes de montrer qu'elles savent accepter le choix des électeurs, et de faire ainsi oublier la réélection contestée de Mahmoud Ahmadinejad il y a quatre ans, qui avait jeté des millions d'Iraniens dans la rue, crise la plus grave traversée par la République islamique depuis la révolution de 1979.

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Les réactions des Iraniens
Hassan Rohani, le modéré qui veut renouer le dialogue avec l'Occident