
Exit la diplomatie et les longues discussions. Le groupe Titan a mis un terme aux espoirs de reprise de l’usine Goodyear d’Amiens-nord via une lettre au ton direct et désinvolte dans laquelle le PDG tacle ouvriers et syndicats.
Le style est sans détour : "Vous pouvez garder [vos] soi-disant ouvriers. Titan n'est pas intéressé par l'usine d'Amiens-Nord." Dans un courrier virulent daté du 8 février et adressé à Arnaud Montebourg, le président du groupe américain Titan a souhaité couper court aux interminables discussions quant à la reprise de l'usine Goodyear d'Amiens menacée de fermeture.
Arnaud Montebourg a, à son tour, pris la plume pour répondre au dirigeant : "Vos propos aussi extrémistes qu'insultants témoignent d'une ignorance parfaite de ce qu'est notre pays", a asséné le ministre du redressement productif dans une missive rendue publique mercredi.
Qualifiant les propos de Maurice Taylor d'"aussi ridicules que désobligeants", Arnaud Montebourg n’a pas hésité à tacler Titan : "Puis-je vous rappeler que l'entreprise que vous dirigez est 20 fois plus petite que Michelin, notre leader technologique français à rayonnement international, et 35 fois moins rentable ?"
Et de conclure par une mise en garde claire : "Soyez assuré de pouvoir compter sur moi pour faire surveiller par les services compétents du gouvernement français avec un zèle redoublé vos pneus d'importation. Ils veilleront tout particulièrement au respect des normes applicables en matière sociale, environnementale et technique".
Affirmant répondre à une précédente lettre du ministre du Redressement productif, le PDG de Titan, Maurice M.Taylor Junior, qui a repris une partie des activités du producteur de pneumatiques dans le monde, assure que "Goodyear a essayé pendant plus de quatre ans de sauver une partie des emplois à Amiens."
"J'ai visité cette usine plusieurs fois. Les salariés français touchent des salaires élevés mais ne travaillent que trois heures. Ils ont une heure pour leurs pauses et leur déjeuner, discutent pendant trois heures et travaillent trois heures", déplore-t-il.
"Je l'ai dit en face aux syndicalistes français. Ils m'ont répondu que c'était comme ça en France", ajoute-t-il.
"Qu'a le syndicat fou ? Il a le gouvernement français"
Titan a renoncé en septembre 2012 à reprendre le site d'Amiens-Nord, qui compte près de 1 200 salariés, faute d'accord avec la CGT sur un plan de départs volontaires.
"Monsieur, votre lettre signale que vous voulez que Titan démarre une discussion. Vous pensez que nous sommes si stupides que ça ? Titan a l'argent et le savoir-faire pour produire des pneus. Qu'a le syndicat fou ? Il a le gouvernement français", poursuit le dirigeant qui se targue de pouvoir désormais acheter "un fabricant de pneus chinois ou indien, payer moins d'un euro l'heure de salaire et exporter tous les pneus dont la France a besoin".
Le prochain comité central d'entreprise se tiendra le 7 mars au siège du groupe à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine). La CGT a appelé les salariés du groupe à manifester ce jour-là.
FRANCE24 avec dépêches