Jacob Zuma sur la sellette
Dépassé par un conflit qui a déjà coûté 548 millions de dollars (418 millions d'euros) au secteur,
le président sud-africain Jacob Zuma n’a pas hésité à employer les grands moyens, à savoir l’armée, pour tenter de ramener le calme dans le pays, au risque de perdre sa place de président de l’
ANC à la prochaine conférence élective en décembre.
C’est en effet la première fois que la police tire sur la foule à balles réelles dans l’Afrique du Sud post-
apartheid et le geste reste lourd de sens. Jacob Zuma s’est vu reprocher d’employer les mêmes méthodes que pendant la période de l’apartheid, aboli en 1994. Une accusation dont il s’est défendu, assurant que l’Etat n’intervenait que "pour mettre un terme à la violence et à l'intimidation comme dans n'importe quel pays démocratique du monde". Le 15 septembre, l'évêque anglican Jo Seoka, médiateur dans les pourparlers entre les mineurs et leur direction, a pourtant mis en garde le pouvoir: "Le gouvernement doit être fou pour croire que ce qui ressemble pour moi à la répression du temps de l'apartheid puisse réussir".
Les syndicats déconnectés de leur base
"Cosatu est débordée par sa base : il y a de plus en plus de syndicats dissidents. C’est la première fois dans l’Afrique du Sud post-apartheid que des grévistes ne sont pas encadrés par les syndicats traditionnels", explique Caroline Dumay.
Une déconnexion que l’aile gauche de Cosatu explique par la prégnance des affaires politiques dans l’organisation. Concentrés sur les querelles internes de l’ANC - divisé entre pro et anti-Zuma - et bridés par leur alliance avec le gouvernement, les dirigeants en oubliraient l’intérêt des travailleurs. Lors du Congrès national, la confédération devrait décider si elle doit rester alignée sur les positions de l'ANC, et, au cas échéant, sur quel ANC. Des stratégies politiques qui risquent d’éclipser les questions de fond comme l’instauration d’un salaire minimum commun à tous les secteurs et de lasser une fois de plus la base ouvrière.
"Les plus pauvres ne se retrouvent ni dans l’opposition, ni dans les syndicats, ni dans l’ANC qui les a trahis. Ils ne se sentent représentés par personne alors que leurs besoins sont immenses. Si leurs conditions de vie ne s’améliorent pas, s’il n’y a pas de réforme foncière et professionnelle rapidement, l’Afrique du Sud ira vers une nouvelle révolte", conclut Marianne Séverin.