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Guillaume Soro : "La réconciliation fait son chemin en Côte d'Ivoire"

Un an après la fin de la crise post-électorale en Côte d'Ivoire, le président de l’Assemblée nationale ivoirienne est en visite en France. Interviewé par FRANCE 24, il revient sur le difficile processus de réconciliation dans le pays.

"Dix-sept ans après [le conflit] au Rwanda, on parle encore de réconciliation. Vingt ans après [la fin de l’apartheid] en Afrique du Sud, on continue de parler de réconciliation. Vous n’imaginez pas que la réconciliation en Côte d’Ivoire va venir comme par un coup de baguette magique !", s’exclame Guillaume Soro, président de l’Assemblée nationale ivoirienne, interviewé le 4 juillet sur l’antenne de FRANCE 24.

Et pour cause. Un peu plus d’un an après l’investiture d’Alassane Ouattara à la tête de la Côte d’Ivoire, le 21 mai 2011, date marquant la fin de la crise post-électorale, le pays est toujours en proie à des violences. Les habitants de l’extrême ouest du pays sont, notamment, la cible d’attaques répétées de la part de groupes armés. En moins de deux mois, une trentaine de personnes - 20 civils, un militaire et sept casques bleus nigériens - y ont perdu la vie. À Abidjan, le pouvoir et ses opposants se renvoient la responsabilité de ces actes. L’ONU se garde d’attribuer ces violences à un groupe précis, mais l’ONG Human Rights Watch a récemment pointé du doigt les anciens combattants pro-Gbagbo et des mercenaires libériens.

Début juin, les autorités ivoiriennes ont assuré avoir déjoué une tentative de coup d’État ourdie par des partisans de l’ancien président ivoirien en exil. Un climat de défiance mine la réconciliation nationale, à laquelle Alassane Ouattara avait accordé tant de place lors de son discours d’investiture. D’autant plus que, pour l’heure, seuls des partisans de l’ancien président ont été inquiétés par la justice internationale pour des crimes et des exactions commis pendant la crise post-électorale… Le rapport préliminaire de la Cour pénale internationale (CPI) indiquait pourtant qu’ils étaient aussi bien le fait des pro-Gbagbo que des pro-Ouattara. Ces derniers mois, cependant, la CPI oriente désormais son enquête vers les proches d’Alassane Ouattara.

Soro dans la ligne de mire de la justice internationale

Guillaume Soro lui-même semble être dans le collimateur de La Haye pour les exactions commises, sous son commandement, par les Forces nouvelles (FN), devenues par la suite les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI). Pour le moment, aucune action n’a été officiellement lancée contre lui. "Je suis surpris qu’on puisse dire qu’il y a des soupçons à mon encontre, répond l’intéressé au micro de FRANCE 24. J’ai été Premier ministre [de Laurent Gbagbo], j’ai organisé des élections dans mon pays avec la Commission électorale indépendante, j’ai dirigé, en tant que ministre de la Défense, les Forces républicaines de Côte d’Ivoire qui ont agi avec la communauté internationale en légitime défense quand, le 28 novembre 2010, M. Gbagbo a décidé de s’accrocher au pouvoir et de livrer la population ivoirienne aux tueries de ses miliciens", poursuit Guillaume Soro.

Dans ce climat, le processus de réconciliation s’annonce donc bien difficile à mettre en place. Mais Guillaume Soro reste confiant. "Nous avons doté la Côte d’Ivoire d’instruments pour aider à la réconciliation. Il existe une Commission dialogue, vérité et réconciliation (CDVR), calquée sur le modèle de l’Afrique du Sud. Nous avons pu faire des élections législatives sur l’ensemble du territoire sans exception. C’est signe que la réconciliation fait son chemin", ose-t-il croire. Dans les faits, la CDVR peine à accomplir sa mission. Elle a, bien sûr, tenu quelques réunions consultatives, mais elle ne parvient pas à rassembler les financements des bailleurs de fonds. À tel point que l’ONU, dans un communiqué publié le 13 juin dernier, au lendemain de la mort des sept casques bleus nigériens, a exhorté la communauté internationale à soutenir le très fragile processus de réconciliation ivoirien.