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Le Brésil joue son va-tout à trois jours de Rio+20

À trois jours de la conférence de l'ONU sur le développement durable, le Brésil, pays hôte, tente de boucler, à l'arraché, un texte qui obtiendrait l'accord des chefs d’États en matière de protection de l'environnement et de lutte contre la pauvreté.

AFP - Poussé par le temps, le Brésil, pays hôte de la conférence de l'Onu sur le développement durable, a pris la main samedi pour essayer de sortir du bourbier les négociations visant à un accord global sur la préservation de la planète et l'éradication de la pauvreté, à trois jours de l'arrivée des chefs d'Etat et de gouvernement.

Les négociations conduites par l'Onu devaient s'achever vendredi mais à minuit passé, quand les délégués ont quitté la salle, ils n'étaient d'accord que sur 38% du texte, soit 116 paragraphes sur les 315 d'un document qui n'enthousiasme personne.

En prenant la main, au milieu de la nuit, le ministre brésilien des Affaires étrangères Antonio de Aguiar Patriota a reconnu qu'il y avait encore beaucoup à faire, tout en assurant que le texte serait bouclé le 18 juin avant l'arrivée des chefs d'Etat et de gouvernement pour le sommet qui commence le 20.

"Normalement, les ministres ne s'assoient pas ensemble pour discuter, ils sont là pour signer un document", a souligné samedi Nikhil Seth, directeur de la division du développement durable à l'ONU, lors du point de presse quotidien.

Lors du sommet de Copenhague sur le changement climatique de 2009, de triste mémoire, les chefs d'Etat et de gouvernement avaient trouvé à leur arrivée un texte plein de trous et de problèmes non résolus, et avaient dû rapidement en bricoler un autre.

Pour activer l'allure, les Brésiliens ont mis au point un texte "consolidé", c'est-à-dire sans ces passages entre parenthèses sur lesquels les délégués sont en désaccord, qui devrait être rendu public samedi après-midi.

"Les Brésiliens ont choisi, avec leur jugement politique, de faire un texte équilibré, on n'a plus le temps pour les détails, il faut aller au coeur des blocages", a souligné M. Seth.

Un des points principaux de désaccord est l'idée de "responsabilités communes mais différenciées", lancée au Sommet de la Terre de 1992, qui donne moins de devoirs aux pays en développement qu'aux autres, et qu'ils veulent conserver.

Les Occidentaux la considèrent comme dépassée, dans la mesure où "certains pays ayant les plus grosses économies et étant les plus gros consommateurs de ressources sont dans le groupe des pays en développement", comme l'a souligné Todd Stern, envoyé spécial américain pour le changement climatique, lors d'une conférence de presse téléphonique.

Autre point de blocage, celui du financement, des transferts technologiques ou de la formation nécessaires au passage à une économie verte. L'idée des pays en développement que l'on crée un fonds de 30 milliards de dollars par an pour les aider à progresser a été accueillie fraîchement par les pays développés en crise, plus favorables à des partenariats.

En revanche une solution semblait en vue pour "l'économie verte", un concept vague qui divise même les ONG et qui serait abandonné au profit de l'expression moins normative de "politiques d'économie verte", qui laisse plus de liberté pour l'appliquer.

Selon le chef des négociateurs brésiliens Luiz Alberto Figueiredo, la présidente brésilienne Dilma Rousseff pourrait faire le point sur le sujet lors du sommet des 20 pays les plus riches, lundi et mardi à Los Cabos (Mexique).

Dans une interview téléphonique pour le blog AFP (blogs.afp.com/geopolitique), Jeffrey Sachs, directeur de l'Institut de la Terre à l'Université Columbia à New York, manifestait son inquiétude, estimant qu'"on a perdu 20 ans depuis le Sommet de la Terre de 1992". Aucune des trois conventions signées alors à Rio, sur le changement climatique, sur la biodiversité et sur la désertification, "n'a atteint son but", et dans ces trois domaines "la situation est pire qu'il y a 20 ans", a-t-il dit.