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L'éventuelle émission d'un mandat d'arrêt à l'encontre du chef de l'État soudanais pour son implication présumée dans le conflit au Darfour (ouest) suscite l'inquiétude de l'ONU, qui craint une flambée de violences dans le pays.
Omar el-Béchir wanted ? Ce mercredi, la Cour pénale internationale (CPI) doit annoncer si elle lance ou non un mandat d’arrêt contre l’homme fort de Khartoum, accusé de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide au Darfour, région de l’ouest du Soudan, théâtre d’une guerre civile qui a fait, depuis 2003, plus de 300 000 morts et entraîné le déplacement de quelque 2,2 millions personnes, selon l’ONU.
Cela fait plusieurs mois que des menaces pèsent sur le président soudanais. Depuis juillet 2008, le procureur de la CPI, Luis Moreno-Ocampo, préconise l’émission d’un mandat d’arrêt contre El-Béchir. Selon toute vraisemblance, les juges de La Haye devraient répondre favorablement à sa demande. Non sans susciter quelques inquiétudes.
Une ONG fermée, deux journalistes expulsés
"On peut craindre des représailles, estime Jean-Marie Fardeau, directeur du bureau parisien de l’ONG Human Rights Watch. Sans que l’on sache quelle en sera l’ampleur."
De fait, ces dernières semaines, les autorités soudanaises ont accentué la pression sur tous ceux dont elles soupçonnent de soutenir la CPI.
"Les défenseurs des droits de l'homme font l’objet d’un véritable harcèlement, affirme Karine Bonneau, responsable du bureau justice internationale de la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH). La semaine dernière, les comptes du Khartoum Centre for Human Rights, l’un des rares organisations indépendantes du pays, ont été gelés. Et, il y a deux jours, les autorités ont ordonné sa fermeture."
Dimanche, les autorités ont expulsé le Tunisien Zuhir Latif, correspondant du portail arabe de FRANCE 24, qui a longtemps couvert le conflit au Darfour. Le journaliste aurait violé "les procédures d’immigration", selon Khartoum. Quelques jours auparavant, la Canado-Égyptienne Heba Aly, qui travaille entre autres pour la revue américaine "Christian Science Monitor", a été sommée, elle aussi, de quitter le pays.
Pour les ONG, les pressions exercées par le régime soudanais ne doivent en aucun cas peser sur les suites à donner en cas de mandat d’arrêt. "Nous espérons seulement que la communauté internationale soutiendra pleinement la décision de la Cour de La Haye", affirme Karine Bonneau.
"À la violence, répondra la violence"
Il faut dire qu’aux Nations unies, dont deux missions de maintien de la paix sont déployées au Soudan, on peine à cacher son inquiétude. A New York, nombreux sont ceux qui redoutent qu’un mandat d’arrêt lancé contre le président soudanais ne compromette la sécurité des Casques bleus. Des craintes d’autant plus justifiées qu’El-Béchir multiplie, ces dernières semaines, les déplacements à l’intérieur du pays afin de rallier la population à sa cause. Laquelle pourrait manifester sa colère si l’homme qui préside aux destinées du pays venait à être définitivement visé par la CPI.
Le Mouvement pour la justice et l’égalité (JEM), principale rébellion darfourie, estime quant à lui que le gouvernement pourrait se livrer à "des actes criminels". Avant de menacer : "À la violence, répondra la violence."
Face au risque d’embrasement, Jean-Marie Fardeau se veut toutefois rassurant. "La réponse des autorités soudanaises sera semble-t-il mesurée, assure-t-il. La capacité de réaction de Khartoum dépend pour beaucoup de ses partenaires traditionnels, telle la Chine. Or Pékin, qui s’approvisionne en pétrole dans le sud du pays, aurait exigé davantage de stabilité de la part de Khartoum". Reste à savoir si la frange la plus extrémiste du gouvernement soudanais saura répondre aux injonctions chinoises.