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L'affaire Trayvon Martin s'invite dans la campagne présidentielle

L'affaire Trayvon Martin, cet adolescent noir de Floride tué par un vigile blanc, prend une tournure politique aux États-Unis, après un commentaire très personnel du président Barack Obama.

"Si j'avais un fils, il ressemblerait à Trayvon". C’est en ces termes très personnels, et non sans émotion, que le président des Etats-Unis, Barack Obama, s’est exprimé pour la première fois, vendredi, sur l'affaire Trayvon Martin. Ce jeune Noir, âgé de 17 ans, a été abattu fin février par un homme blanc d'origine hispanique qui effectuait des rondes de surveillance dans un quartier de Sanford, en Floride. Décrit comme un adolescent sans histoire par son entourage, Trayvon rentrait chez lui après avoir acheté des friandises dans une épicerie du quartier.

"Légitime défense"
Les circonstances troubles de ce meurtre et les lenteurs de l’enquête ne cessent, depuis, de susciter l'indignation de la société américaine, et en particulier celle de la communauté afro-américaine. La mobilisation pour réclamer justice pour Trayvon Martin s’est amplifiée depuis plusieurs semaines et de nombreuses manifestations, dénonçant un crime raciste, ont notamment été organisées à New York, Chicago et dans plusieurs villes de Floride.
Le meurtrier, George Zimmerman, affirme de son côté avoir été attaqué par le jeune Trayvon et plaide la légitime défense pour justifier son acte. Il s’appuie notamment sur une loi en vigueur dans l’Etat de Floride depuis 2005 qui élargit le champ de la légitime défense. Le texte "Stand your ground" ("défendez votre espace"), fortement soutenu par le puissant lobby des armes la National Riffle Association (NRA), autorise en effet un citoyen à utiliser une arme mortelle en cas d’agression. C’est d’ailleurs à ce titre que le meurtrier n’a toujours pas été arrêté. Le ministère américain de la Justice, le procureur du district central de Floride et le FBI ont ouvert une enquête sur cette affaire, tandis qu’un grand jury doit se réunir le 10 avril pour décider si les charges sont suffisantes pour poursuivre le meurtrier.
Dimension politique
C’est dans ce contexte que le président américain est sorti de sa réserve vendredi, lors d’une conférence de presse à Washington, un peu moins d’un mois après le drame. "Chaque parent aux Etats-Unis devrait pouvoir comprendre la raison pour laquelle il est impératif que nous enquêtions sur tous les aspects de cette affaire, et que tout le monde y mette du sien, Etat fédéral, Etat (de Floride) et autorités locales, pour comprendre exactement comment cette tragédie s'est produite", a-t-il déclaré.
Sans surprise, depuis l’intervention de l’hôte de la Maison Blanche, cette affaire a pris une dimension politique, en s’invitant dans la campagne présidentielle américaine. Pressés de réagir, les prétendants à l’investiture républicaine Mitt Romney, Newt Gingrich et Rick Santorum ont emboîté le pas du président Obama, en qualifiant à leur tour le meurtre du jeune adolescent de tragédie.
"Honteux" et "consternant"
Toutefois, le candidat Newt Gingrich a opté pour la polémique, vendredi, dans un talk-show conservateur à la radio. Il a en effet fustigé les propos tenus par le président Obama, qu’il a qualifiés de "honteux" et à même de semer "la discorde" au sein de la société américaine. "Nous devons tous être horrifiés, peu importe l’origine ethnique (de la victime). Est-ce que le président suggère que si elle avait été blanche, cela aurait été "ok", parce qu’elle ne lui ressemble pas ?", s’est-il interrogé. Et de poursuivre : "Cette tentative de transformer cette affaire en une question raciale est une erreur fondamentale, je trouve cela vraiment consternant".
Outre la question de la discrimination raciale aux États-Unis, cette affaire remet sur le devant de la scène le débat sur le port d’armes et les milices privées de sécurité, très critiqués depuis la mort du jeune Trayvon Martin."Je pense que nous devons tous procéder à un examen de conscience (…), et cela signifie que nous devons examiner les lois et le contexte de ce qui s'est passé, ainsi que les particularités de cet incident ", a prévenu vendredi, le président américain.