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Dix-huit ans après les faits, deux hommes condamnés pour un crime raciste

Gary Dobson et David Norris ont été respectivement condamnés par la cour criminelle de Londres à 15 ans et 14 ans de prison pour avoir poignardé un jeune Noir en avril 1993. La presse britannique compare cette histoire à l'affaire Dreyfus en France.

AFP - Deux hommes blancs de 36 et 35 ans ont été condamnés mercredi respectivement à 15 ans et 14 ans de prison par la cour criminelle de Londres, dix-huit ans après le meurtre d'un adolescent noir, qui a bouleversé l'histoire des relations raciales au Royaume-Uni.

Gary Dobson, 17 ans au moment des faits, et David Norris, 16 ans à l'époque, ont été condamnés à des peines incompressibles de 15 ans et deux mois pour le premier et 14 ans et trois mois pour le second. Ils encouraient une peine plancher de 12 ans au lieu de 30 ans de prison s'ils avaient été majeurs au moment des faits.

Des peines "faibles", a déploré la mère de la victime, Doreen, tout en reconnaissant que le juge était lié par la législation sur les mineurs et en le remerciant d'avoir "reconnu le stress et tout ce que nous avons subi depuis 18 ans".

Le juge a refusé aux deux hommes toute cironstance atténuante, soulignant qu'ils n'avaient "montré aucun regret ou remords" et que le crime n'avait d'"autre motivation que la haine raciale". "Un jeune totalement innocent de 18 ans, à l'aube d'une vie prometteuse, s'est vu retirer la vie brutalement dans la rue par une bande de voyous racistes", a-t-il déclaré.

Les deux hommes avaient été reconnus coupables par le jury la veille du meurtre de Stephen Lawrence, poignardé en avril 1993, sur la base de nouvelles preuves scientifiques.

L'étudiant avait été attaqué par une bande de cinq jeunes blancs pendant qu'il patientait avec un ami à un arrêt de bus à Eltham (sud-est de Londres).

La condamnation de deux des membres de la bande intervient après un long combat des parents de la victime, Doreen et Neville, d'origine jamaïcaine, présents au cours de ce procès très médiatisé entamé le 14 novembre.

"C'est une étape dans un long, long voyage", a déclaré le père du jeune homme, soulignant que son plus vif espoir est de voir les autres membres de la bande traduits en justice.

L'enquête initiale en 1993 avait été entachée de nombreuses erreurs. Plusieurs tentatives de procès ont avorté par la suite, faute de preuves.

La révision de l'enquête en 2007 a permis grâce aux avancées scientifiques de trouver du sang, des fibres et des cheveux portant l'ADN de la victime sur des vêtements saisis pendant l'enquête de police en 1993.

Le cas de Stephen Lawrence a déclenché un véritable examen de conscience au sein du public et des institutions britanniques, police et justice comprises. Le Herald Tribune a comparé mercredi le cas à l'affaire Dreyfus en France à la fin du XIXe siècle.

Une commission d'enquête mise en place par le gouvernement travailliste en 1997 avait conclu deux ans plus tard à un "racisme institutionnel" au sein de la police. Dans la foulée, la police a introduit des changements de fond dans ses procédures et a entrepris d'élargir son recrutement à toutes les communautés, y compris noire et asiatique.

Le cas a aussi contribué à une révision en 2005 de la loi qui interdisait de juger une deuxième fois une personne précédemment acquittée, sur la base de nouveaux éléments.

Gary Dobson avait déjà été jugé en 1996 avec deux autres suspects, mais le trio avait été relâché faute de preuves.

"Les autres personnes impliquées dans le meurtre de Stephen Lawrence ne devraient pas dormir sur leurs deux oreilles", a mis en garde mercredi le numéro un de Scotland Yard Bernard Hogan-Howe.