Le taux auquel Rome et Madrid peuvent emprunter sur les marchés financiers a atteint son niveau le plus haut depuis la création de la zone euro. Pour éviter tout risque de contagion, la question sera au menu d'une réunion de l'Eurogroupe, ce lundi.
AFP - Les responsables européens se sont retrouvés lundi à Bruxelles pour une réunion aux allures de sommet de crise au moment où les turbulences financières gagnent l'Italie et l'Espagne, une contagion qui si elle se prolonge risque de faire vaciller toute la zone euro.
Signe de l'inquiétude croissante des dirigeants européens: la chancelière allemande Angela Merkel, à la tête de la principale économie de l'Union monétaire, a pris l'initiative inhabituelle de téléphoner au chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi pour lui demander une adoption rapide par son Parlement d'un plan d'austérité, susceptible de calmer les marchés.
"L'Italie doit envoyer elle-même un signal important qui est l'adoption d'un budget répondant à des exigences d'économies et de consolidation" a-t-elle dit lundi, au moment où les titres de dette italienne subissent à leur tour un mouvement de défiance des investisseurs sur les marchés.
Après une journée difficile déjà vendredi, les taux obligataires à long terme espagnols et italiens ont atteint lundi matin leur plus hauts historiques depuis la création de la zone euro.
Cela signifie que le coût d'emprunt de Rome et de Madrid pour financer leurs déficits grimpe.
Cette nouvelle poussée de fièvre de la crise de la dette en zone euro devrait être au menu d'un déjeuner de travail des principaux responsables économiques européens convoqué de manière inopinée par le président de l'UE, Herman Van Rompuy, afin de parler de la crise de la dette.
Il a convié les présidents de l'Eurogroupe Jean-Claude Juncker, de la Banque centrale européenne (BCE) Jean-Claude Trichet, de la Commission européenne José Manuel Barroso ainsi que le commissaire européen aux Affaires économiques Olli Rehn.
Officiellement, il s'agit de "coordonner les positions" sur le dossier grec au moment où les dissensions s'étalent au grand jour et où les Européens n'écartent plus totalement l'idée d'un défaut partiel de la Grèce.
Une idée à laquelle s'oppose farouchement la BCE qui affirme qu'elle n'acceptera plus alors les obligations grecques, si celles-ci sont dégradées, en contrepartie des prêts qu'elle accorde aux banques du pays.
Mais l'inquiétude dépasse clairement la seule Grèce à présent. "Les problèmes de l'Italie sont aussi liés à la Grèce" et aux atermoiements des gouvernements européens pour mettre sur pied un deuxième plan d'aide en faveur du pays afin de lui éviter la banqueroute à moyen terme.
Or, l'Italie pèse économiquement à elle seule plus de deux fois plus que les trois pays sauvés à ce jour de la banqueroute: Grèce, Irlande et Portugal. Si elle cédait, c'est toute la zone euro qui serait menacée. Selon le quotidien allemand Die Welt paru lundi, la BCE veut que le Fonds de secours financier de la zone euro voit sa force de frappe doublée, de 750 milliards à 1.500 milliards d'euros.
Les ministres des Finances de la zone euro doivent eux se retrouver à partir de 15H00 (13H00 GMT) à Bruxelles.
Afin de rassurer des marchés fébriles, des avancées sur le second plan d'aide promis à la Grèce sont nécessaires, même si celui-ci ne devrait pas être finalisé avant septembre.
"Nous avons clairement besoin de progresser le plus vite possible pour faire en sorte que ce programme soit mis sur pied dès que possible", a déclaré lundi le ministre polonais des Finances, Jacek Rostowski, dont le pays assure la présidence tournante de l'UE.
Pour stopper l'hémorragie, les Européens doivent répondre d'une même voix à une question: comment mettre à contribution les créanciers privés de la Grèce - condition exigée par l'Allemagne et les Pays-Bas notamment - sans créer un "événement de crédit" aux conséquences imprévisibles car il déclencherait le paiement des contrats d'assurance souscrits pour se protéger d'une défaillance du pays ?
Au cours du week-end, l'idée de recourir à une solution impliquant, sur une période limitée dans le temps, un "défaut partiel (ou sélectif") de la Grèce, a gagné en vigueur, selon des diplomates.
Cette option marquerait un revirement de la zone euro qui a jusqu'ici exclu un tel défaut.