Une réunion de "dialogue national" s’ouvre ce dimanche en Syrie. Ces deux jours de débats, censés poser les jalons d'une transition démocratique du régime, sont boycottés par l’opposition qui continue de réclamer la fin des violences.
Le dialogue national qui s’ouvre ce dimanche en Syrie risque de n’avoir qu’une portée très limitée. Organisée par le régime après trois mois de manifestations violemment réprimées, cette réunion se tient à Damas en présence des grands pontes du parti Baas, au pouvoir depuis 1963, et de quelques personnalités indépendantes mais… sans l’opposition. L’idée d’un "dialogue national" avait été lancée par Bachar al-Assad lors de son dernier discours, le 20 juin, à l’université de Damas.
it![Ouverture des deux jours de "dialogue national" boycotté par l'opposition Ouverture des deux jours de "dialogue national" boycotté par l'opposition](/data/posts/2022/07/16/1657972210_Ouverture-des-deux-jours-de-dialogue-national-boycotte-par-l-opposition_1.jpg)
"On n’attend pas grand-chose de ce dialogue, point central du dernier discours de Bachar al-Assad, affirme Isabelle Dellerba, correspondante de FRANCE 24 dans la région. Le problème - et non le moindre -, c’est que l’opposition syrienne ne participe pas à ces discussions. Dès lors, ce n’est qu’avec lui-même et ceux qui le soutiennent que le régime discute aujourd’hui." Les opposants au régime de Bachar al-Assad ont en effet décidé de boycotter tout dialogue tant que les violences se poursuivent dans le pays.
La réunion devrait durer deux jours et permettre de mettre au point un certain nombre de réformes, notamment l'une concernant l’article constitutionnel faisant du parti Baas "le dirigeant de l’État et de la société". "Nous allons avoir une réunion nationale globale pendant laquelle nous annoncerons la transition de la Syrie vers un État multipartite, démocratique, où tous seront égaux et participeront à l’édification de l’avenir du pays", a déclaré le vice-président Farouk al-Chareh à l’ouverture de la rencontre, ce dimanche.
L’opposition refuse le dialogue
Vendredi, des milliers de manifestants ont défilé dans les rues des principales villes du pays, appelant à rejeter ce dialogue. "Nous réclamons le retrait des forces syriennes des villes, la libération des prisonniers politiques et des manifestants pacifiques ainsi qu’une enquête sur les crimes commis par les manifestants", a déclaré un militant à l’AFP sous le sceau de l’anonymat.
Reste que si l'on en croit les évènements de ces derniers jours, le régime ne semble pas prêt à choisir la voie non-violente pour venir à bout de la contestation. Vendredi, au cours d’une manifestation, les forces de sécurité ont ouvert le feu sur des manifestants, en tuant 15 d’entre eux, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme. Quelque 200 autres ont par ailleurs été arrêtés, notamment à Homs. Samedi, les soldats syriens, appuyés par plusieurs dizaines de chars, ont pris d’assaut deux villes du nord-ouest du pays et ont procédé à des perquisitions, confisquant des ordinateurs et des téléphones portables.
Les violences se poursuivent
Le même jour, l’organisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch (HRW) a publié un communiqué basé sur les témoignages de soldats syriens ayant déserté, réfugiés dans les pays voisins. "Les déserteurs rapportent que ceux qui refusaient de tirer sur les manifestants prenaient le risque d’être eux-mêmes abattus", indique HRW. "Leurs supérieurs leur ont dit qu’ils combattaient des infiltrés, des salafistes et des terroristes. Ils ont été surpris de découvrir des manifestants sans armes, sur lesquels ils ont reçu l’ordre de tirer."
"Ces témoignages sont une preuve que les manifestants tués ne l’étaient pas par accident mais à cause d’une politique de répression meurtrière mise au point par les hauts responsables syriens pour disperser les contestataires", analyse Sarah Leah Whitson, responsable de HRW pour le Moyen-Orient.
Alors que le Conseil de sécurité de l’ONU ne parvient pas à s’accorder sur une résolution condamnant les violences en Syrie, plus de 1 300 personnes ont été tuées dans le pays et 12 000 arrêtées depuis le 15 mars, date du début du soulèvement contre le régime de Bachar al-Assad, selon les organisations de défense des droits de l’Homme. Des milliers de personnes fuient la Syrie vers les pays voisins, notamment la Turquie, où la situation humanitaire devient de plus en plus préoccupante.