Le FBI enquête sur une gigantesque affaire de délits d’initiés qui pourrait ébranler le monde américain des fonds d’investissement. Des mises en examen pourraient intervenir avant la fin de l’année.
Le FBI met actuellement la dernière touche à une enquête qui pourrait déboucher sur l’une des plus grosses affaires de délits d’initiés de l’histoire américaine. Lundi, le célèbre service de renseignement américain a fait une descente au siège de trois fonds d’investissement, et d’autres opérations similaires sont attendues dans les jours qui viennent.
Cette affaire qui a débuté il y a trois ans concerne tout le gratin des fonds d’investissement américains (hedge funds), des dizaines d’analystes financiers et la banque Goldman Sachs. L'enquête devrait, d’après le Wall Street Journal de vendredi dernier, déboucher sur des mises en examen d’ici la fin de l’année.
Des sommes colossales sont en effet en jeu. Les fonds et analystes auraient gagné des dizaines de millions de dollars grâce à un réseau d’experts qui leur fournissaient des informations sensibles sur des opérations boursières en cours.
"Culture généralisée du délit d'initié"
L’enquête, selon les informations du Wall Street Journal, pourrait mettre à jour "une culture généralisée du délit d'initié au sein des marchés financiers américains". Un délit constitué lorsqu’une personne obtient des informations confidentielles sur une société afin de faire une opération boursière à son profit avant que l'information ne devienne publique.
Les investigations s’intéressent surtout aux milieux pharmaceutiques et des nouvelles technologies. Au cœur de cette toile se trouvent des sociétés qui ont prospéré en mettant en rapport des experts – médecins, chercheurs, anciens employés – avec des investisseurs et des courtiers. Les enquêteurs cherchent à établir que ces derniers ont effectivement bénéficié d’informations exclusives sur certaines opérations sensibles.
Spectre du scandale Galleon
La banque Goldman Sachs est, par exemple, soupçonnée d’avoir permis à des courtiers d’anticiper deux grosses fusions, celle des laboratoires MedImmune et AstraZeneca en 2007 et d’Advanced Medical Optics et Abbott Laboratories début 2009.
Les raids de lundi du FBI ont soulevé un début de vent de panique à Wall Street. La place financière de New York reste traumatisée par le scandale du hedge fund Galleon l’an dernier. En octobre 2009, ce fond, jusqu’alors le plus gros du monde, avait mis la clé sous la porte à l’issue d’un retentissant procès. Galleon avait pratiqué le délit d’initié à grande échelle et gagné au moins 20 millions de dollars en profitant d’informations confidentielles sur des grands groupes comme Google.
Les marchés craignent d’autant l’issue de l’enquête que l’une des figures emblématiques de cette affaire, d’après les médias américains, est un ancien de Galleon qui avait quitté le navire peu avant que le scandale n’éclate.
L’enquête s’inscrit dans un contexte qui voit les hedge funds de plus en plus dans le collimateur des autorités. Le gendarme de la Bourse américaine a, en effet, proposé vendredi dernier que les fonds d’investissement soient soumis à des obligations de déclarations plus strictes de leurs opérations. Le marché des produits financiers dérivés, terrain de jeu favori de ces entités financières, est aujourd’hui très peu contrôlé alors que plus de 580 000 milliards de dollars de contrats y ont été négociés l’an passé.