Rompant avec une tradition remontant au lancement du tournoi en 1957, la Confédération africaine de football (CAF) a annoncé samedi 20 décembre une petite bombe en préambule du lancement de la CAN 2025 : la Coupe d'Afrique, sa compétition reine, aura désormais lieu tous quatre ans dès 2028 - contre deux actuellement.

Cette décision fait débat parmi les observateurs et les fans de football africain. D'un côté, on salue une rationalisation bienvenue pour la compétition. De l'autre, on dénonce une perte d'identité de la CAN et une soumission au calendrier de la Fifa et des clubs européens.

Walid Regragui est partagé

Sélectionneur respecté du continent depuis la demi-finale de Coupe du monde historique décrochée par le Maroc au Qatar, Walid Regragui a un avis qui compte. Alors que les Lions de l'Atlas sont lancés dans la conquête du titre continental à domicile, le Franco-Marocain a été invité à s'exprimer sur le sujet après la victoire des siens 2 à 0 contre les Comores lors du match d'ouverture.

"Il y a du bon et du moins bon", juge Walid Regragui."Le rendez-vous tous les deux ans permettait à beaucoup d'équipes de grandir de progresser. Ou bien de se refaire rapidement en cas d'échec à la CAN. On est très bien placé pour le savoir…"

Le risque de la perte d'identité de la CAN

"Maintenant, il faudra attendre quatre ans, si on se rate, pour gagner une CAN. Il va être de plus en plus difficile de s'imposer", continue-t-il.

Si le sélectionneur marocain a fait comprendre que ce n'était pas forcément une réforme qu'il désirait, il saura s'en accommoder : "Le football est en train de changer même si je ne suis pas d'accord avec ce football là, mais il faut s’adapter", a-t-il ajouté dans un clin d'oeil à l'élimination surprise de son équipe à la CAN 2024 dès les huitièmes de finale.

Une compétition plus prestigieuse et mieux valorisée ?

Lucide, le sélectionneur a aussi listé les avantages de ce nouveau format qui pourrait bénéficier aux joueurs mais aussi à la compétition sur le long terme.

"Quand on voit les problèmes qu’on a eus avec nos joueurs et leurs clubs en Europe, beaucoup de joueurs africains sont sous-cotés car ils jouent une CAN tous les deux ans", a-t-il expliqué, faisant référence à la libération tardive des internationaux en raison d'une décision de la Fifa. "Peut-être qu’avec ce nouveau système ils mettront l’argent que méritent ces joueurs et leur feront plus confiance."

"Je pense que l’Afrique progresse aussi et que cette compétition est aussi forte que l’Euro, car il y a de très bonnes équipes et de très beaux stades. L'Afrique va encore plus grandir", analyse Walid Regragui. "Dans 15-20 ans, la CAN sera une compétition très suivie car de jeunes joueurs très prometteurs arrivent, et la CAN tous les quatre ans sera un vrai rendez-vous."

Un débat loin d'être tranché

Le débat risque d'animer la suite de la Coupe d'Afrique des nations. D'autres figures du continent sont plus péremptoires sur la réforme. À l'image d'Amir Abdou, sélectionneur historique des Comores, qui avait emmené l'archipel à sa première CAN.

Avec ce changement, la Coupe d'Afrique "risque de perdre son identité, son charme. Tous les joueurs africains attendent beaucoup cette compétition, et la repousser tous les quatre ans va réduire les opportunités pour les talents africains de se faire remarquer sur la scène internationale", a affirmé Amir Abdou sur TV5 Monde. "Pour le continent africain, c'est une grosse perte."

Reste que la CAF a laissé en suspens plusieurs points. Si le président Patrice Motsepe a annoncé que la prochaine CAN aurait bien lieu en 2027 en Tanzanie, en Ouganda et au Kenya, il a également affirmé qu'une autre édition aurait lieu en 2028 pour se caler sur le cycle de quatre ans souhaité. Or, un ou des pays hôte restent à trouver pour cette CAN 2028… De même, quid du CHAN avec l'évènement de la Ligue des nations africaines ?