Trois jours après leur publication, les révélations de WikiLeaks sur la guerre en Irak ont déjà disparu des journaux américains. La presse préfère se concentrer sur les sujets économiques au cœur de la campagne pour les élections de mi-mandat.
Les élections de mi-mandat, l’épidémie de choléra en Haïti ou la guerre en Afghanistan sont autant de sujets qui apparaissent ce lundi à la une des principaux journaux américains. Mais sur la première page du "New York Times", du "Boston Globe" ou du "Washington Post", on ne trouve plus rien ou presque sur les près de 400 000 documents publiés vendredi par le site WikiLeaks - des rapports d’incidents rédigés entre 2004 et 2009 par des soldats américains qui relatent des cas de torture perpétrés non seulement par les forces irakiennes mais aussi par les forces de la coalition dirigée par les États-Unis.
S’il y a très "peu de choses" à ce propos dans la presse américaine, explique Steven Ekovitch, professeur de sciences politiques à l’American University of Paris, c’est avant tout parce qu’"on n’y apprend rien sur les grandes lignes" de la guerre.
"Les autorités irakiennes ont maltraité leurs prisonniers, ce n’est pas une surprise", confirme David Betz, docteur en études militaires au King’s College de Londres. Ces documents "pourraient contenir des informations qui pourraient faire l’effet d’une bombe, mais étant donné le volume de documents [à analyser], il pourrait se passer beaucoup de temps avant que nous n’entendions parler de quelque chose", ajoute-t-il.
"Cette guerre est sortie de l’agenda public"
Mais surtout, précise David Betz, "WikiLeaks et Julian Assange ne sont plus considérés comme des héros". En effet, le site et son charismatique fondateur, qui ont fait parler d'eux pendant des semaines cet été en publiant 90 000 documents confidentiels sur le conflit afghan, ont, depuis, fait l’objet de plusieurs polémiques. Ils ont notamment été accusés d’avoir mis en danger la vie de nombreux Afghans ayant aidé les Américains en divulguant leurs noms sur Internet.
"WikiLeaks est une organisation idéologiquement engagée, fortement opposée à la guerre et empreinte d’anti-américanisme, reprend David Betz. Les gens sont certainement plus suspicieux envers elle qu’auparavant."
Avec les élections de mi-mandat qui approchent, la politique occupe la plus grande partie de l’espace médiatique américain. Or, "la politique étrangère n'est pas un enjeu important de ces élections, centrées sur des sujets économiques comme le chômage", rappelle Steven Ekovitch. Selon lui, cette nouvelle "affaire WikiLeaks" ne devrait d’ailleurs avoir "aucun impact" sur la campagne.
Enfin, la guerre en Irak est terminée pour les Américains, conclut David Betz. "Le président a déclaré la fin des combats sur le terrain il y a trois mois. Pour l’administration américaine, le conflit est fini, ce qui est d’ailleurs étrange puisqu’il y a toujours 50 000 soldats américains là-bas. Mais, dans une large mesure, cette guerre est sortie de l’agenda public."