Les Australiens se rendent aux urnes, samedi, pour renouveler leur Parlement, à l’occasion d’élections anticipées voulues par le Premier ministre travailliste Julia Gillard.
Considérées comme jouées d’avance il y a deux mois, les législatives australiennes s’annoncent plus incertaines que prévues. Les Australiens, tenus par la loi de se rendre aux urnes les jours d’élections, doivent renouveler l’ensemble de leurs 150 députés et la moitié du Sénat.
Sitôt arrivée au poste de Premier ministre après la démission de Kevin Rudd en juin dernier, la travailliste Julia Gillard avait annoncé la tenue d’élections anticipées pour obtenir "la confiance" des électeurs.
Profitant de sa côte avantageuse dans les sondages, elle ne pensait pas alors que la course s’avèrerait aussi serrée. En effet, les derniers sondages d’opinion la donnent au coude à coude avec son rival, le conservateur Tony Abbott. À tel point que les médias locaux s’en sont remis aux prédictions d’un crocodile nommé Harry, qui, à l’instar de Paul le poulpe, pourrait prédire l’avenir. Selon le reptile aquatique, Julia Gillard devrait conserver son poste, une prédiction confortée par le tout dernier sondage du "Sydney Morning Herald" qui la donne ce vendredi vainqueur d’une courte tête.
"Stop the boats"
Durant la campagne, Julia Gillard et les travaillistes ont mis en avant la bonne santé économique du pays, qui a été l’un des rares à ne pas connaître de période de récession suite à la crise économique mondiale. Ils ont promis de poursuivre les investissements notamment dans les domaines de la santé et de l’éducation.
C’est cependant autour des thèmes de l’immigration et des réfugiés qu’a gravité la campagne électorale. Reprenant les attaques des tabloïds du pays, qui ont fait leurs gros titres sur l’augmentation des demandes d’asile, des membres de l’opposition ont lancé le slogan "stoppez les navires" (stop the boats).
Si les deux candidats ont annoncé leur intention de retoucher la généreuse législation actuelle en faveur des immigrés, c’est surtout Tony Abbott qui a marqué des points, affichant son inflexibilité dans le domaine lorsqu’il a promis de renvoyer les bateaux d’immigrants.
Les travaillistes ont eux fait volte face à plusieurs reprises sur les questions d’immigration, notamment sur un projet controversé de centre de rétention au Timor oriental.
Les Verts en faiseur de roi ?
Tirant parti de la lutte acharnée engagée entre les deux principaux candidats, les Verts pourraient bien jouer un rôle décisif à l’issue du vote. Ils profitent du souci grandissant de la population pour le réchauffement climatique et ses effets sur le pays qui compte déjà parmi les plus secs au monde. Plusieurs analystes estiment que les écologistes devraient être en mesure de faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre, notamment au Sénat.
Dans le même temps, Julia Gillard est apparue bien frileuse sur le sujet, ne reprenant pas les promesses de baisse des émissions de dioxyde de carbone qui avaient couté de précieux points de popularité à son prédécesseur. Bien qu’elle se soit prononcée en faveur d’une baisse des émissions de CO2, elle souhaite que le débat soit formellement tranché par une "assemblée de citoyens". Une indécision qui lui a valu les railleries de ses opposants.
Côté conservateur, après avoir autrefois qualifié le réchauffement climatique de "connerie absolue", Tony Abbott a évoqué de possibles réductions de CO2 tout en excluant la mise en place d’une taxe carbone.
Abbott et les femmes
Un facteur plus inattendu pourrait lui aussi se révéler décisif samedi. Certains sondages indiquent que le conservateur Abbott, un catholique de 52 ans, devrait s’octroyer la majeure partie des votes venant de l’électorat masculin. Mais il serait à la peine avec les femmes, qui n’ont pas oublié qu’il s’était opposé à la commercialisation d’un médicament pour l’avortement lorsqu’il était ministre de la Santé. Une décision qui avait soulevé un mouvement de contestation et fait le succès d’un slogan resté célèbre : "Enlève ton rosaire de mes ovaires".
Soucieux de récupérer l’électorat féminin, Abbott a proposé un allongement de la durée du congé maternité. Une promesse généreuse mais qui fait à nouveau grincer des dents, cette fois parmi les membres de son propre camp proches du monde des affaires.