Des militaires aux ordres du général Antonio Indjai ont arrêté le Premier ministre Carlos Gomes Junior ainsi que le chef d’état-major de l’armée. Le général affirme vouloir rester "soumis au pouvoir politique". Paris dénonce un "coup d'État".
AFP - Des militaires mutins en Guinée-Bissau ont arrêté jeudi le Premier ministre et le chef d'état-major de l'armée, et pris le contrôle de la capitale de ce petit état pauvre d'Afrique de l'Ouest, plaque tournante d'un important trafic de cocaïne.
Les Etats-Unis et le Portugal, ancienne puissance coloniale, ont aussitôt appelé au retour de "l'ordre constitutionnel" dans ce pays, marqué par l'instabilité politique depuis des années, tandis que la France a dénoncé un "coup d'Etat".
Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé les dirigeants du pays à "résoudre les différends d'une manière pacifique" et à "maintenir l'ordre constitutionnel".
Le nouvel homme fort du pays, le général Antonio Indjai, qui a pris la direction des forces armées, a assuré jeudi soir que le coup de force représentait "un problème purement militaire" et que l'armée réitérait "son attachement et sa soumission au pouvoir politique".
Arrêté jeudi matin, le Premier ministre Carlos Gomes Junior est maintenu en résidence surveillée à son domicile.
Les mutins ont également arrêté le chef d'état-major de l'armée, le général José Zamora Induta, et une "quarantaine d'officiers".
itLes centaines de sympathisants qui exigeaient la libération du Premier ministre près de sa résidence se sont progressivement dispersés.
Jeudi après-midi, le général Indjai avait en effet menacé, lors d'une conférence de presse, de "tuer" le Premier ministre Carlos Gomes Junior si les "attroupements" de ses sympathisants ne cessaient pas.
"Nous vous demandons d'éviter tout attroupement dans les rues. Si vous ne le faites pas, cela peut nous amener à tuer Cadogo", surnom du Premier ministre, avait-il mis en garde.
Jeudi soir, la situation était calme à Bissau, les rues du centre de la capitale restaient désertes, la population se terrant chez elle par crainte de violences.
"Les forces armées bissau-guinéennes tiennent à informer l'opinion nationale et internationale que les événements survenus ce jeudi matin sont un problème purement militaire qui ne concerne donc pas le pouvoir civil en place", a affirmé le général Indjai, dans un communiqué lu à la radio nationale.
"Toutefois, l'armée réitère son attachement et sa soumission au pouvoir politique. Les institutions militaires restent et resteront soumises aux pouvoir politique", a-t-il ajouté.
Pour sa part, le président du pays, Malam Bacai Sanha, qui n'a pas été inquiété par les mutins, a assuré que la situation était "calme", invoquant une "confusion entre militaires".
itLa Guinée-Bissau, au sud du Sénégal, compte 1,5 million d'habitants qui vivent dans la misère. Baigné par l'Atlantique, il est considéré comme un pays de transit pour le trafic de la cocaïne sud-américaine vers l'Europe.
L'armée est très influente dans ce petit pays, indépendant depuis 1974 et ravagé par une guerre civile à la fin des années 1990, et son implication dans le trafic de drogue a souvent été évoquée.
Le Portugal a "condamné avec véhémence" les troubles et appelé au "retour immédiat" de l'ordre constitutionnel dans son ancienne colonie.
Les Etats-Unis ont emboîté le pas: "Nous voulons voir l'ordre constitutionnel restauré dès que possible", a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine Philip Crowley, qui a souligné que les Etats-Unis étaient "de façon générale contre les coups d'Etat et la violence".
L'ONU a appelé les dirigeants à "résoudre les différends d'une manière pacifique", afin d'éviter "de mettre en péril les gains de la Guinée-Bissau dans ses efforts en cours pour consolider la paix".
Le ministre français des Affaires Etrangères, Bernard Kouchner, a dénoncé un "coup d'Etat" et la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) des "tentatives de déstabilisation".
Le président de la Commission de l’Union Africaine (UA), Jean Ping, a demandé aux militaires de "respecter la discipline républicaine".