Oui, il était persuadé que l'Irak possédait des armes de destruction massive. Non, il n'a pas conclu d'accord secret avec Bush. Devant une commission d'enquête, l'ex-Premier ministre britannique justifie l'entrée en guerre de Londres en 2003.
Costume bleu, cravate rouge, Tony Blair l’assure : il pensait "sans le moindre doute que le régime de Saddam Hussein disposait d’armes de destruction massive". Devant la commission d’enquête Chilcot, l’ancien Premier ministre britannique a justifié des heures durant sa décision d’engager le Royaume-Uni en Irak, en mars 2003. En clair, l’ex-locataire de Downing Street n’a "aucun regret".
Bien que les armes de destruction massive, qui ont servi à justifier l’intervention en Irak, n’aient jamais été retrouvées, Tony Blair s’est défendu de tout "mensonge" ou de "complot". A ceux qui l’accusent d’avoir trompé l’opinion, il répond qu’il n’aurait "pas fait l'Irak" s’il n’avait "pas pensé que c'était juste", et affirme qu’il n’était pas question de s’engager dans un conflit dans le simple but de "changer le régime".
Pas d’accord secret avec George W. Bush
L’ancien chef du gouvernement britannique a expliqué comment les attentats du 11-Septembre avaient joué un rôle crucial dans la décision d’entrer en guerre. "Jusqu'au 11-Septembre, nous pensions que [Saddam] constituait un risque mais nous pensions que cela valait la peine de tenter de le contenir", a-t-il indiqué. Et d’ajouter : "le calcul du risque a changé. Après cela, mon avis était qu'on ne pouvait plus prendre aucun risque."
Tony Blair a toutefois ajouté que le Royaume-Uni acceptait désormais le fait qu'il n’existait aucun lien entre Saddam Hussein et le réseau Al-Qaïda. Mais il a assuré avoir été "absolument certain" que si le dirigeant irakien d’alors avait été autorisé à poursuivre son programme d'armes de destruction massive, il y aurait eu des conséquences pour l'Occident.
A la question de savoir s’il avait conclu un accord secret en 2002 avec George W. Bush pour envahir l’Irak, Tony Blair répond par la négative. Selon lui, la manière de répondre à la menace irakienne était restée "ouverte" à discussion, lors de sa rencontre avec le président américain dans son ranch de Crawford. D'autres témoins précédemment entendus par la commission estiment qu’il a, ce jour-là, promis son soutien militaire à Washington.
Les familles déçues
"Il n’y a pas eu de révélation fracassante, analyse Bénédicte Paviot, correspondante de FRANCE 24 à Londres. Tony Blair a l’habitude en tant qu’avocat de préparer ses dossiers, vous pouvez être sûrs qu’il avait bien préparé cette audition."
itIl n’a toutefois pas pu convaincu les proches de soldats tués en Irak. "J’ai parlé à la mère d’un d’entre eux, elle me dit être déçue parce qu’elle a trouvé que les questions posées lors de l’audition n’étaient pas assez dures", rapporte Bénédicte Paviot.
Les associations représentant les familles des 179 soldats britanniques tués en Irak ont expliqué que Tony Blair avait rejeté leur demande d'une rencontre le jour de sa déposition. Les familles ont pu assister à l'audience par une vidéo diffusée dans une salle annexe du centre de conférence où la commission entendait les témoins.
A quelques mois des législatives
Tony Blair reste très critiqué pour avoir engagé quelque 45 000 soldats malgré
l'absence d'une résolution de l'ONU et l'opposition d'une majorité de son opinion publique. Signe de l'engouement suscité par ce témoin spécial, la commission procédant depuis novembre aux audiences publiques dans une petite salle du centre de Londres a dû organiser un tirage au sort pour le public.
Retransmise à la télévision britannique toute la journée, en un léger différé, l’audition était très attendue. Les élections législatives doivent avoir lieu d’ici juin et l’image du Parti travailliste, que les sondages donnent largement distancé par l’opposition, est toujours très affectée par cette entrée en guerre controversée.