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L'Otan réfléchit à lever les restrictions sur l'usage des armes fournies à l'Ukraine
L'Ukraine peut-elle frapper le sol russe avec les armes fournies par ses alliés ? C'est la question à laquelle vont tenter de répondre, jeudi et vendredi, les membres de l'Otan réunis à Prague. La France, notamment, y est favorable, tandis que les États-Unis se montrent beaucoup plus réticents. La fourniture de nouvelles armes et de munitions sera également au programme.

L'Otan se réunit à Prague, jeudi 30 et vendredi 31 mai, sous la pression de certains de ses membres, dont la France, qui veulent que l'Ukraine puisse désormais frapper le sol russe avec les armes que ses alliés lui fournissent.

Les ministres des Affaires étrangères de l'Alliance veulent en parler lors de cette réunion informelle, destinée également à trouver des armes et des munitions, en particulier des systèmes de défense anti-aérienne, en pleine offensive russe autour de Kharkiv, seconde ville ukrainienne.

Le débat sur l'utilisation ou non sur le territoire de la Russie de certaines des armes fournies à Kiev par les Occidentaux, en l'occurrence des missiles à longue portée, agite les capitales des pays de l'Alliance.

Son secrétaire général, Jens Stoltenberg, s'y est déclaré favorable, mais plusieurs pays alliés de l'Ukraine, dont les États-Unis, y sont beaucoup plus réticents, redoutant un conflit direct avec Moscou.

Mardi à Berlin, le président français Emmanuel Macron a estimé qu'on devait permettre à Kiev de "neutraliser" les bases militaires d'où la Russie tire ses missiles contre le territoire ukrainien.

"Il faut le dire clairement, elle est attaquée et peut se défendre", a dit de son côté le chancelier allemand Olaf Scholz, évoquant l'Ukraine, lors de la même conférence de presse. Il n'a toutefois pas levé explicitement son veto catégorique à un usage en territoire russe des armes allemandes fournies à Kiev.

Fournir à l'Ukraine batteries de défense anti-aérienne et munitions

Car sur le fond, la position de l'Allemagne n'a pas bougé, a-t-on insisté de sources diplomatiques à Bruxelles. Et cela d'autant plus que Berlin se refuse à fournir à l'Ukraine les missiles à longue portée qu'elle fabrique, les Taurus, pourtant instamment réclamés par le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

La France compte évoquer ce sujet à Prague dans l'espoir de faire changer d'avis les pays les plus réticents qui sont, avec l'Allemagne, l'Italie ou les États-Unis.

Si Washington maintient pour le moment ses réticences, le secrétaire d'État américain Antony Blinken a toutefois semblé ouvrir la porte à une évolution de la position de son pays. Les alliés de l'Ukraine vont "adapter" leur aide pour lui garantir un "succès", a-t-il déclaré mercredi lors d'une conférence de presse à Chisinau en Moldavie.

La discussion s'annonce à Prague "beaucoup plus active" sur ce sujet, a affirmé mercredi un diplomate à Bruxelles.

Elle devrait l'être également sur la nécessité chaque jour plus urgente de fournir à l'Ukraine les batteries de défense anti-aérienne et les munitions que les forces ukrainiennes, en difficulté sur le champ de bataille, réclame avec insistance depuis des mois.

"Aujourd'hui, nous avons 25 % de ce dont on a besoin pour défendre l'Ukraine, je parle de systèmes de défense aérienne", en particulier les puissants systèmes américains Patriot, a rappelé le 18 mai Volodymyr Zelensky dans un entretien avec l'AFP.

Et sa demande pour recevoir au moins sept de ces batteries n'a débouché pour l'instant que sur l'envoi d'une seule, par l'Allemagne.

Vers un passage de relais entre les États-Unis et l’Otan

Les Pays-Bas cherchent à convaincre plusieurs pays, dont l'Espagne, de céder certains des composants nécessaires à assembler une autre batterie de Patriot pour l'Ukraine, a indiqué mardi la ministre néerlandaise de la Défense, Kajsa Ollongren.

Les ministres vont aussi préparer le sommet de l'Otan prévu à Washington en juillet et discuter d'une enveloppe de 100 milliards d'euros pour aider l'Ukraine sur le long terme. Mais plusieurs pays alliés s'interrogent sur le contenu de cette proposition lancée par Jens Stoltenberg.

"Tout le monde comprend la nécessité d'annoncer quelque chose de conséquent, mais on ne veut pas non plus que ce soit seulement du vent", a résumé un diplomate à l'Otan.

Les Alliés semblent en revanche plus unis sur un passage de flambeau entre les États-Unis et l'Otan en ce qui concerne la coordination de l'aide militaire à l'Ukraine.

Washington assure actuellement cette coordination, l'Otan s'y refusant jusqu'à présent dans un souci d'éviter l'escalade avec Moscou. Ce transfert vers l'Otan, moins redouté aujourd'hui, permettrait aussi de garantir la continuité de cette aide militaire dans le cas d'un retour de Donald Trump à la Maison Blanche. Plusieurs pays de l'Otan redoutent en effet qu'il ne cherche à y mettre un terme, s'il devait être élu en novembre.

Avec AFP