
L'opposition vénézuélienne s'est prononcée vendredi pour la disparition du "gouvernement intérimaire" dirigé par Juan Guaido, qui s'était autoproclamé président en janvier 2019, alors que l'opposition et une partie de la communauté internationale ne reconnaissaient pas la réélection en 2018 de Nicolas Maduro. Cette instance n'avait pas de pouvoir réel mais contrôlait toutefois les actifs vénézuéliens à l'étranger.
Près de quatre ans après sa création et au lendemain de l'appel de Juan Guaido pour son maintien, l'opposition vénézuélienne a mis fin vendredi 30 décembre au "gouvernement intérimaire". Les députés de l'ancien Parlement, élu en 2015 et contrôlé par l'opposition, ont voté à 72 voix pour sa disparition et celle de sa "présidence" ((29 contre, 8 abstentions). Cet ancien parlement défend sa continuité en considérant frauduleuses les élections législatives remportées par le pouvoir en 2020.
Perte d'alliés internationaux
Le soutien international à ces gouvernement et présidence "intérimaires", reconnus notamment par les États-Unis et la France, s'était étiolé au fil des mois. Officiellement, les positions américaine ou française n'ont pas changé mais dans la réalité les chancelleries discutent depuis longtemps déjà avec le pouvoir de Nicolas Maduro.
La crise pétrolière provoquée par la guerre en Ukraine a entraîné un réchauffement des relations entre le président Nicolas Maduro et Washington, qui avait envoyé des émissaires discuter directement avec lui. La Maison Blanche a aussi assoupli en novembre les sanctions contre le Venezuela après une avancée dans les négociations entre pouvoir et opposition, permettant notamment au pétrolier Chevron d'opérer au Venezuela pendant les six prochains mois. Côté français, le président Emmanuel Macron avait rencontré, devant les caméras Nicolas Maduro dans les couloirs de la COP27 à Charm el-Cheikh, en Égypte, l'appelant "président" et indiquant qu'il allait lui téléphoner.
Juan Guaido a également perdu des alliés de poids parmi ses voisins sud-américains, avec le basculement à gauche ces derniers mois de pays comme la Colombie ou le Brésil qui étaient gouvernés par des droites dures très hostiles à Nicolas Maduro.
"Un saut dans le vide"
Mardi, trois des quatre grands partis d'opposition vénézuéliens (Primero Justicia, Accion Democratica et Un Nuevo Tiempo) estimaient dans un communiqué commun que le "gouvernement intérimaire" avait "cessé d'être utile (...)". "Le gouvernement intérimaire était une émanation, une urgence de l'Assemblée nationale. Ce qui était provisoire est devenu perpétuel", a assuré vendredi lors de la séance l'avocat constitutionnaliste Juan Miguel Matheus, favorable à la disparition du gouvernement intérimaire. "Les actifs ne sont pas en danger", a-t-il ajouté. "La loi fournit des outils suffisants pour protéger les actifs au Portugal, aux États-Unis et en Angleterre".
Pour Juan Guaido, "c'est un saut dans le vide. Aujourd'hui on capitule. 72 députés ont capitulé", a-t-il réagi après le vote, ajoutant sur un ton plus consensuel : "les différends que nous avons aujourd'hui, nous les dissiperons sans aucun doute". Le vote de l'Assemblée élue en 2015 survient dans un contexte de division de l'opposition qui n'a pas su s'unir lors des élections régionales de 2021 remportées par le pouvoir et alors que la présidentielle de 2024 aiguise les appétits.
L'opposition a annoncé récemment qu'elle organiserait des primaires afin de choisir un candidat unique pour affronter Nicolas Maduro lors de la présidentielle. "Il y a des leaders de l'opposition qui estiment que le gouvernement intérimaire était un avantage pour une éventuelle candidature de Guaido", a commenté le consultant Pablo Andres Quintero.
Avec AFP