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Volcan Taal : une éruption attendue et redoutée

Petit par la taille, mais costaud lors de ces éruptions : le volcan philippin Taal, qui s’est réveillé dimanche, est considéré comme l’un des plus dangereux du monde. Sa dernière phase éruptive avait duré de 1965 à 1977.

L’éruption du volcan Taal, à une soixantaine de kilomètres de Manille, la capitale des Philippines, était attendue. Cela faisait des années que les volcanologues anticipaient son réveil et plus le temps passait, plus il risquait d’être violent.

Taal, situé au sud de l’île de Luçon, est entré en phase d’”activité intense” dans la nuit du dimanche 12 au lundi 13 janvier, a indiqué le Philippine Institute of Volcanology and Seismology (Phivolcs). Au moins 20 000 habitants des villages voisins ont trouvé refuge dans les centres d’évacuation mis en place par les autorités. Des nuages de cendres se sont propagés jusqu’à 100 km au nord, entraînant la fermeture temporaire de l’aéroport de Manille.

READ: ERuption update for #TaalVolcano 13 January 2020, 04:00PM pic.twitter.com/iEqqRCT28q

— PHIVOLCS-DOST (@phivolcs_dost) January 13, 2020

Éruptions tous les 30 à 35 ans

Et ce n’est qu’un début. Le Phivolcs a mis en garde contre de nouvelles phases éruptives à venir et a réitéré l’importance d’évacuer tous les résidents de l'île volcanique et d'envisager cette évacuation à des populations situées à 14 km  de l'île. Sa période d’activité peut “durer des semaines, des mois, voire des années”, explique Jacques Zlotnicki, directeur de recherche au CNRS (laboratoire Magmas et Volcans), , contacté par France 24. Ce chercheur, qui a travaillé sur le volcan Taal, rappelle que lors de son dernier réveil, il est resté en éruption de 1965 à 1977, redessinant en profondeur le paysage autour de la montagne.

Les volcanologues attendaient un nouvel épisode éruptif, car Taal commençait à être en retard sur ses habitudes. 88% des eruptions se produisent avant 30 ans de repos. Cela faisait donc plus de quarante ans qu’il n’avait pas fait parler de lui. Un retard qui n’augure rien de bon car, “plus les périodes inter-crises sont longues, plus les éruptions risquent d’être violentes et destructrices”, souligne Jacques Zlotnicki.

Ce qui, dans le cas de Taal, peut engendrer d’importants dégâts. Petit par la taille (il culmine à 311 mètres d’altitude) il fait, cependant, partie du cercle très restreint des “volcans de la décennie”, une famille de 16 volcans (sur 1 500 potentiellement actifs) qui font l’objet d’une attention toute particulière à cause de leur activité passée, de leur potentiel destructeur et de leur proximité d'une zone peuplée. Environ 450 000 personnes habitent dans les environs du volcan Taal, d'après le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'Organisation des nations unies (ONU).

Cocktail explosif

Depuis la fin du XVIe siècle, il y a eu au moins 33 éruptions recensées de Taal, qui ont causé la mort de plus de 1 500 personnes. Un lourd passif qui en fait le volcan le plus meurtrier des Philippines.

La virulence de ses éruptions tient à un cocktail particulièrement explosif qui fait sa particularité. “Il y a deux lacs - l’un dans le cratère et l’autre qui enserre le volcan -, et lorsque l’eau passe à travers les failles qui se prolongent en profondeur vers le cratère, elle peut très vite entrer en contact avec une source de forte chaleur car le magma se trouve à faible profondeur, ce qui peut rapidement entraîner des phénomènes violents”, explique Jacques Zlotnicki.

Dans le cas de Taal, ce sont les nuées ardentes qui sont à craindre. Il s’agit, en effet, d’un volcan explosif, c’est-à-dire qu’il rejette d’importantes quantités de cendres dans l’atmosphère qui, en retombant, forment des nuages toxiques, composés de gaz brûlant et de débris de lave, qui peuvent se déplacer à très vive allure en causant d’importants dégâts. “En 1965, les nuées ardentes se sont déplacées à  plusieurs centaines de km/h sur des dizaines de kilomètres, détruisant tout sur leur passage”, rappelle le chercheur français. Dans une étude consacrée à l’activité volcanique de Taal, Jacques Zlotnicki estimait qu’une éruption de grande ampleur de ce volcan pourrait entraîner l’évacuation d’environ 100 000 personnes.