
Présenté mercredi en conseil des ministres, le projet de loi sur la bioéthique aborde plusieurs sujets sensibles. En tête, l'élargissement de la PMA aux couples de femmes, une mesure promise par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle.
Reporté plusieurs fois, le projet de loi sur la bioéthique a été finalement présenté, mercredi 24 juillet, en conseil des ministres, avant d'être débattu à l'Assemblée nationale à la mi-septembre. Première grande réforme sociétale du quinquennat d'Emmanuel Macron, ce texte à haute valeur symbolique aborde plusieurs sujets sensibles, tels que l'élargissement de la procréation médicalement assistée (PMA), l'accès à l'identité du donneur de sperme, ou encore la conservation encadrée des ovocytes. Tour d'horizon des principales mesures de ce projet de loi porté par la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, et la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Frédérique Vidal.
Élargissement et remboursement de la PMA
Mesure phare parmi les 32 articles que compte ce texte, l'accès à la PMA, jusqu'ici réservé aux couples hétérosexuels souffrant d'infertilité, pourrait désormais être élargi aux couples de femmes et aux femmes célibataires. Un droit réclamé depuis des années par les associations LGBT+, et promis par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle. Interrogée dans Le Parisien , Agnès Buzyn estime que cette mesure "répond à une demande sociétale", puisque "les schémas familiaux ont changé". Cet accès élargi revient ainsi à fonder le recours à la PMA non plus sur une cause médicale, mais sur un projet parental.
Ces femmes bénéficieraient de la même prise en charge par la sécurité sociale que les couples hétérosexuels, à savoir un remboursement total. Une disposition approuvée par le Conseil d'État comme un "traitement égalitaire" en matière de protection sociale. "C'est la condition pour que ce droit devienne réalité. Aujourd'hui, nous savons que les couples de femmes qui ont projet de parentalité partent à l'étranger et seules celles qui en ont les moyens peuvent le faire… Ce n'est pas normal", souligne Agnès Buzyn auprès du quotidien. Selon la ministre, ce recours élargi à la PMA pourrait concerner environ 2 000 couples par an.
La reconnaissance anticipée de la filiation
Un autre arbitrage porte sur la reconnaissance de filiation de l'enfant. Si le projet de loi aboutit, les couples de femmes recourant à une PMA effectueront une "déclaration anticipée de volonté" devant notaire. À la naissance de l'enfant, les deux mères présenteront le document à l'officier de l'état civil et chacune sera ainsi reconnue comme parent. Une "procédure sécurisante", estime la ministre de la justice, Nicole Belloubet puisque "personne ne pourra venir dire ensuite, c'est moi la mère ou le père".
Cette déclaration anticipée serait mentionnée sur l'acte de naissance. Une précision qui pourrait toutefois stigmatiser les enfants nés par PMA, estiment plusieurs associations LGBT+. Car à l'inverse, les couples hétérosexuels garderont la liberté de révéler ou non à leurs enfants la manière dont ils ont été conçus.
L'accès à l'identité du donneur de sperme
Autre question délicate, celle de la fin de l'anonymat du don de sperme, pratiqué en France depuis 1973. L'enfant né d'un don pourrait, à ses 18 ans, avoir accès soit à des données non identifiantes (caractéristiques physiques, âge…), soit à l'identité complète du donneur, si celui-ci avait donné préalablement son accord. Pour rappel, 75 % des personnes interrogées dans un sondage Ifop réalisé en mai s'étaient déclarées favorables à ce que les enfants conçus par PMA puissent accéder à l'identité du donneur.
La conservation des gamètes
Le projet de loi ouvre également la possibilité pour tout individu de faire prélever et conserver ses gamètes, et ce, plus uniquement pour des raisons médicales comme c'est le cas aujourd'hui. Une femme pourra congeler ses ovocytes et un homme son sperme "en vue de la réalisation ultérieure, à leur bénéfice" d'une PMA, précise le texte. Un consentement écrit de la personne sera exigé avant toute conservation. Pour l'heure, la ministre de la Santé avait évoqué une ouverture dès l'âge de 30 ans ou 32 ans pour la congélation d'ovocytes. Côté remboursement, seuls le recueil et les prélèvements de gamètes seront pris en charge par la Sécurité sociale.
Faciliter les recherches sur les cellules souches
Le sujet reste sensible tant il soulève des questions éthiques au sein du monde scientifique. Le projet de loi pourrait toutefois permettre d'alléger les demandes d'autorisation de recherches sur les cellules souches embryonnaires. Celles-ci, menées dans le cadre de PMA, "peuvent être réalisées sur des gamètes destinés à constituer un embryon ou sur l'embryon (...), si chaque membre du couple ou la femme y consent", précise un nouvel article du projet de loi. Cet assouplissement pourrait permettre aux chercheurs de faire avancer certains traitements (insuffisances cardiaques, maladies du foie…). "Le texte ne permet pas de dérive ", a assuré la ministre de la Recherche, Frédérique Vidal, auprès du Parisien.
Délai de réflexion supprimé pour l'IMG
À la différence de l'interruption volontaire de grossesse (IVG), l'interruption médicale de grossesse (IMG) peut être pratiquée en France jusqu'au terme. Cet avortement thérapeutique s'effectue volontairement lorsque la santé de la mère ou de l'enfant à naître est en danger, dans le cas par exemple d'une affection reconnue comme incurable au moment du diagnostic. Dans ce cas, le délai de réflexion d'une semaine avant l'opération est supprimé.