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Gilets jaunes : le retour de la violence sur les Champs-Élysées

L'acte 18 des Gilets jaunes à Paris a signé samedi le retour de la violence lors des manifestations. Magasins pillés, restaurants saccagés, kiosques incendiés : plus de 230 personnes ont été interpellées, dont 144 se trouvent en garde à vue.

Les Champs-Élysées de nouveau saccagés. Des Parisiens curieux, des touristes étrangers sous le choc, des Gilets jaunes venus constater le résultat, le tout sur fond de bruit de perceuses et de verre que l'on piétine : samedi soir, quelques heures après la marée jaune et noir, la célèbre avenue de Paris affichait un visage bien surprenant.

Au total, 32 300 personnes ont manifesté dans toute la France, dont 10 000 à Paris, selon les chiffres du ministère de l'Intérieur. Dans la soirée samedi, le bilan des interpellations est monté à 237 personnes, dont 144 se trouvaient en garde à vue à 21 h.

Tags et bris de verre

Un groupe de Toulousains s'arrête devant chaque vitrine, chaque mur, pour faire une photo des tags et "garder un souvenir". Ils étaient là dans l'après-midi pour manifester comme 10 000 autres Gilets jaunes pour cet acte 18 qui a donné lieu à de violents heurts avec les forces de l'ordre et à des scènes de pillage sur les Champs-Élysées.

"S'il faut ça pour se faire entendre, c'est malheureux, mais on le refera encore", explique Serge, qui ne donne que son prénom, et dénonce le "mépris d'un président qui va skier le jour d'une grosse manif'".

"On ne fait pas des révolutions avec des fleurs", renchérit Delphine, qui évoque déjà les prochaines journées de manifestation. "Je mets un Gilet jaune pour que mes enfants n'aient pas besoin de le faire", affirme la mère de famille, qui se dit "déterminée".

"Je suis très choqué"

Dans les boutiques, c'est l'effervescence, on balaye, on met de côté ce qui peut être sauvé et on s'active pour placer de grandes planches de bois en lieu et place des vitrines.

Quelques mètres plus loin, deux officiers de police se présentent devant la boutique du joaillier Mauboussin et sa vitrine fracassée.

À l'intérieur, un rapide coup d'œil permet de voir que tous les présentoirs sont vides. "Ça fait peur de voir tout ça", raconte Sandrine Polito, venue avec son mari d'Annecy pour un week-end à Paris. "On espérait trouver un endroit où manger mais là, on a un peu l'appétit coupé", se désole-t-elle avant d'ajouter et "pourtant on est tous Gilets jaunes".

Ramon Garcia, touriste mexicain de 29 ans, mitraille l'un des kiosques à journaux complètement carbonisés de l'avenue : "Je suis très choqué. Je prends des photos pour montrer à la famille, aux amis. Personne ne va nous croire sinon".

Grand débat devant le Fouquet's saccagé

Sur la chaussée, des dizaines des fourgons des forces de l'ordre sont encore stationnés et éclairent toute l'avenue de leurs gyrophares. Peu de voitures circulent mais beaucoup de camions de la propreté de la ville de Paris dont les agents s'activent à nettoyer les trottoirs et les caniveaux qui regorgent de pavés, de boulons, d'éclats de verre et de déchets en tout genre.

Malgré les samedis qui s'enchaînent à nettoyer après les manifestations, un employé de la ville de Paris, qui souhaite rester anonyme, confie comprendre la "colère de ceux qui ont tout cassé". "Tout le monde souffre, la France va mal. Nous, on survit tout juste alors qu'il y en a qui s'en mettent plein les poches", raconte-t-il, tout en continuant de balayer des débris calcinés.

"Ah, ça fait bien plaisir de voir ça"

Sur le trottoir d'en face, le restaurant Fouquet's est ouvert aux quatre vents. À l'intérieur des ouvriers s'affairent, protégés par une rangée de membres des forces de l'ordre. Et devant, un grand débat est engagé entre plusieurs jeunes et un groupe de Parisiens sortant d'un restaurant. Tout y est passé : le "système qui est pourri", les "institutions" qu'il faut "réinventer" d'un côté, la valeur du travail, l'importance de l'"effort" de l'autre...

Emmanuel Macron écourte son séjour au ski

Mitraillé par l'opposition qui dénonce "l'incompétence" de l'exécutif, Emmanuel Macron a dû écourter son week-end de ski samedi et promis des "décisions fortes" en réponse aux dégâts commis sur les Champs-Élysées. "Nous avons aujourd'hui des gens qui essayent par tous les moyens (...) d'abîmer la République pour casser, pour détruire au risque de tuer", a affirmé le chef de l'État depuis la cellule de crise du ministère de l'Intérieur.

"Beaucoup de choses ont été faites depuis novembre mais très clairement la journée d'aujourd'hui montre que sur ces sujet-là et ces cas-là, nous n'y sommes pas", a-t-il admis.

Avec AFP