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ETA contre État, une guerre sans fin

Le gouvernement espagnol assure que l’ETA n’a jamais été aussi faible. Le pays a pourtant été frappé par deux attentats en 48 heures. Si l'organisation basque ne les a pas revendiqués, les deux attaques portent sa marque de fabrique.

Mercredi, une explosion ravageait une caserne à Burgos, dans le nord de l’Espagne. Jeudi, une bombe placée sous une voiture a tué deux gardes civils dans une caserne de l’île de Majorque, dans l’archipel des Baléares. Les deux attentats n’ont pas été revendiqués, mais leurs méthodes portent la marque de fabrique de l’ETA.

Dans la péninsule ibérique, spécialistes, éditorialistes et population s’interrogent ; l’organisation séparatiste basque se montre toujours aussi offensive bien que privée de bon nombre de ses cadres, tombés aux mains de la police. Le soutien de la population basque à l’organisation s’est, de son côté, nettement amoindrie.  

Les jeunes membres montrent les muscles

Le gouvernement espagnol martèle pourtant que la guerre contre l’ETA, à l’origine de plus de 850 morts depuis sa fondation, le 31 juillet 1959, est en passe d’être gagnée. Jurdan Martitegi, un des éléments-clés de l’organisation, a été arrêté en France en avril; il s’agissait de la quatrième arrestation d’un dirigeant de l’organisation séparatiste en un an.

Les observateurs s’accordent pour dire que les attentats de cette semaine avaient pour but de décrédibiliser le discours du gouvernement. Pour Pascal Drouhaud, spécialiste en relations internationales à l’institut Choiseul, "l’ETA veut prouver que, 50 ans après sa création, l’organisation est toujours en vie, et qu’elle peut frapper sur tout le territoire espagnol".

Les attaques indiquent aussi que l’ETA survit aux coups de filets des polices espagnoles et françaises. Selon Pascal Drouhaud, on peut voir dans les violences de la semaine passée que les séparatistes ont lancé "un mouvement de régénération". Quand un chef tombe, il est aussitôt remplacé par un membre plus jeune, qui prend la place laissée vacante dans la hiérarchie.

Un mouvement de plus en plus marginal

L’ETA n’a certes pas été éradiqué, mais sa violence actuelle n’a rien de comparable avec ses coups de force lorsque l’organisation était au faît de sa puissance, dans les années 1980. Dans le passé, le mouvement a compté,  selon les estimations, jusqu’à 150 000 sympathisants qui soutenaient l’ETA en réaction à la dictature franquiste, à l’origine de l’interdiction de la langue et des éléments de la culture basque.

A présent, si une majorité de Basques se montre favorable à une certaine forme d’indépendance de leur région, le soutien à l’ETA s’est évanoui. Pascal Drouhaud explique que "la transformation d’un mouvement de résistance en mouvement terroriste les a exclu du jeu politique" qu’ils dominaient pourtant dans le nord-est de l’Espagne.

Le sentiment que l’approche de l’ETA est trop extrême et son objectif obsolète, ajouté au fait que les autorités arrêtent les dirigeants, a limité la portée de la menace malgré quelques soubresauts de violence.

Madrid reste concentré sur son objectif d’éradication du mouvement. Comme le souligne Sarah Morris, correspondante de FRANCE 24 dans la capitale de l’Espagne, "Il n’a jamais été question d’accord de paix. Le gouvernement fait clairement passer le message qu’il n’a aucune intention de relâcher la pression et que les arrestations se poursuivront".

Alors que l’Espagne se remet doucement du choc des derniers attentats, Sarah Morris note aussi que "l’ETA n’est jamais aussi dangereux que quand le gouvernement dit qu’il est à bout de souffle".