
Vols annulés, exercices militaires, déclarations cinglantes : l’Irak, l’Iran et la Turquie continuent de mettre en garde le Kurdistan, qui organise lundi son référendum d’autodétermination.
La pression est à son comble alors que les bureaux de vote pour le référendum d’autodétermination du Kurdistan irakien viennent d'ouvrir, à 8 heures locales. Quelque 5,5 millions de Kurdes sont appelés à vote, lundi 25 septembre, dans les trois gouvernorats qui forment depuis 2003 la région autonome du Kurdistan, mais aussi dans les territoires que se disputent les Kurdes et les autorités de Bagdad, comme la riche province pétrolière de Kirkouk. Les bureaux de vote resteront ouverts jusqu'à 18 h (15 h GMT) pour permettre aux 5 375 000 inscrits de se prononcer.
Bagdad, farouchement opposé au scrutin, a mis en place ces derniers jours une série de sanctions pour tenter de garder le contrôle de la situation, avec l'Iran et la Turquie comme alliés. Les deux puissances voisines redoutent les répercussions qu'aurait une sécession du Kurdistan irakien sur leurs propres régions kurdes.
Dernière mesure en date : le gouvernement irakien a appelé dimanche 24 septembre tous les pays du monde à ne traiter qu'avec lui pour les transactions pétrolières. Le Kurdistan produit en moyenne 600 000 barils de pétrole par jour dont 550 000 sont exportés via Ceyhan en Turquie.
The National Security Council: All countries must deal with Iraq’s federal authorities for transactions involving border-crossings & oil.
Government of Iraq (@IraqiGovt) September 24, 2017Plus tôt dimanche, l’annulation de toutes les liaisons aériennes entre le Kurdistan et l’Iran a aussi été annoncée. "À la demande du gouvernement central irakien, tous les vols iraniens vers les aéroports d'Erbil et de Souleymanieh ainsi que tous les vols au départ du Kurdistan irakien transitant par l'Iran ont été interrompus", a déclaré Keyvan Khosravi, porte-parole du Conseil suprême de la sécurité nationale, cité par l'agence officielle iranienne Irna.
Keyvan Khosravi a également justifié cette décision par le fait que les responsables kurdes irakiens ont maintenu leur projet de référendum malgré "tous les efforts bienveillants" de l'Iran pour trouver une autre issue. Le pays compte environ 6 millions de Kurdes sur une population de 80 millions.
La télévision d'État iranienne a annoncé d'autre part dimanche que des manœuvres militaires avaient commencé dans la région d'Oshnaviyeh (nord-ouest), près de la frontière avec la province autonome kurde d'Irak. Les exercices militaires sont fréquents dans cette zone.
"Des troupes supplémentaire" en Turquie
Samedi, c’est le Parlement turc qui a réaffirmé sa position en votant – avec un peu d’avance sur le calendrier – le renouvellement du mandat qui permet à l'armée d'intervenir en Irak et en Syrie. Le texte approuvé par le Parlement liste une série de développements régionaux considérés par Ankara comme une menace pour sa sécurité nationale, parmi lesquels des "projets séparatistes illégitimes" en Irak, une référence au référendum des Kurdes d'Irak.
Confrontée à une sanglante rébellion séparatiste kurde sur son territoire, la Turquie, où vivent environ 15 millions de Kurdes, a multiplié les avertissements ces derniers jours, et l'armée turque, qui mène jusqu'à mardi des manœuvres à la frontière avec l'Irak, a annoncé samedi dans un communiqué que cet exercice se poursuivait "avec des troupes supplémentaires".
Ankara a développé ces dernières années les relations économiques avec la région kurde du nord de l'Irak et est aujourd'hui la seule porte permettant à Erbil d'exporter son pétrole via un oléoduc débouchant dans le port turc de Ceyhan.
Une délégation kurde pour "discuter" avec Bagdad
Les États-Unis ont également exhorté le gouvernement régional du Kurdistan à annuler le vote, tandis que le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté une déclaration mettant en garde contre son effet "potentiellement déstabilisateur" pour l'Irak.
De leur côté, les autorités autonomes du Kurdistan irakien ont envoyé samedi une délégation à Bagdad afin de "discuter du référendum", mais celui-ci "aura bien lieu", a martelé Hoshiyar Zebari, l'un des principaux conseillers de Massoud Barzani, le président du Kurdistan autonome.

Avec AFP et Reuters